26 novembre 2008

Two lovers

Ce matin à la radio un journaliste en veine d'ironie a parlé du film de James Gray comme d'un mélo. Two lovers raconte l'histoire d'un homme dont le coeur balance entre deux femmes, c'est vrai, mais cela n'a rien d'un mélo et c'est bien mal connaître l'univers de James Gray que de parler de mélo !

J'ai beaucoup aimé ce film comme j'ai beaucoup aimé - voilà qui est nouveau - le dernier film de Woody Allen. Le rapprochement est peut-être inattendu mais ce sont deux films qui disent que les histoires d'amour ne sont jamais simples et qu'au moment de se lancer le coeur et la raison souvent s'étripent. Toutefois, dans le film de James Gray j'ai surtout vu "tout ce qui menace de ruine un jeune homme", l'amour bien sûr mais plus encore les pesanteurs familiales et sociales.

Léonard, a tout du "loser". Il n'est ni beau ni laid, juste lourd, il a la démarche traînante de ceux qui étouffent entre quatre murs mais n'ont nulle part où aller. La caméra de James Gray est particulièrement habile à rendre ce sentiment de confinement, limite claustrophobie, d'autant qu' à l'enfermement spatial (l'appartement, la blanchisserie, le quartier ) s'ajoute un enfermement social (milieu juif ashkénaze pétri de traditions). Manque d'espace ! Coincé dans un petit appartement super encombré, entre son père et sa mère, si évidemment soucieux de le voir enfin casé, Léonard manque d'espace. Et voilà pourquoi le film commence par une tentative de suicide, ratée cela va de soi ! Une des rares scènes d'extérieur !

Fils attentionné, Léonard, qui vient de connaître un échec sentimental, ne veut peiner personne et accepte sans se rebeller l'avenir que d'autres ont envisagé pour lui : épouser la fille de l'ami qui rachète la blanchisserie de son père.... Mais, une autre figure féminine, beaucoup plus délurée surgit soudain et bouscule les données de l'histoire. Un choix est possible et l'horizon soudain s'ouvre....



Sagesse ou folie ? Partir ou rester ? L'amour fou, la passion ? Un mariage de raison ? Une passade, une maîtresse pour quelques jours ? Une femme pour la vie ? Continuer ? Renoncer ? Couper les ponts ? Suivre un chemin tout tracé ? Etre soi ? Etre celui que les autres veulent que vous soyez ? Etre ou ne pas être ? Quel dilemme !

Oui, vu sous cet angle, ce film est shakespearien. Rien à voir avec un mélo !

Et si je me souviens bien, les précédents films de James Gray : Little Odessa, The Yards, La Nuit nous appartient parlaient déjà de choix et de rupture. Suivre sa famille, quelles que soient ses valeurs parce que la famille, "c'est sacré" ? Ou bien rompre parce que les valeurs familiales soudain ne sont plus les nôtres ?
Il ne me déplaît pas qu'un cinéaste creuse, d'un film à l'autre et sans en avoir l'air, le même sillon. C'est à cela, je crois qu'on reconnaît les grands.

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