25 mai 2009

La Sombra

L'exposition sur L'Ombre, présentée par le Musée Thyssen-Bornemisza et la Fondation Caja Madrid vient de s'achever et c'est bien dommage. Car c'est une exposition absolument passionnante.

Apparue à la Renaissance, lorsque les peintres, par souci de réalisme, l'ont introduite dans leurs tableaux, l'ombre s'est peu à peu émancipée jusqu'à devenir une figure à part entière, parfois inquiétante, comme dans le Portrait du Dr Haustein de Christian Schad, un peintre allemand proche de la Nouvelle Objectivité. A chacun de voir dans l'ombre sur le mur, le profil du patient que soigne le médecin - version lénifiante - ou ... un présage de la mort à venir. Après tout, dans un cabinet de médecin, c'est bien de cela qu'il s'agit !


Dans La Grande ombre, une aquarelle de Johann Heinrich Wilhelm Tischbein, l'ombre se glisse hors du personnage, monte sur le mur, se glisse au plafond...
Tischbein est l'auteur du célèbre portrait de Goethe dans la campagne romaine, un tableau lumineux, coloré, loin de cette pièce vide et de cette ombre qui s'allonge démesurément. S'agit-il bien du même peintre ? C'est à se demander.


Inscrit dans un parcours chronologique, le choix d'un thème comme l'ombre modifie forcément notre façon de voir et permet de redécouvrir d'un oeil neuf, des oeuvres que l'on croyait connaître par coeur . J'ai retrouvé avec plaisir Vuillard, Spilliaert, Hopper, De Chirico, Dali... Ce sont les peintres de la fin du XIXe et du début du XXe siècle qui, à mon goût ont su le mieux jouer avec les ombres.
Mais j'ai découvert, avec beaucoup de plaisir aussi des oeuvres que je n'avais jamais eu l'occasion de voir, d'autant que l'expostion ne se limite pas à la peinture mais inclut la photographie et le cinéma !

Parmi les images les plus intriguantes, il y a celles de Sam Taylor-Wood, une jeune photographe et vidéaste anglaise dont trois photos on été retenues pour l'exposition.

Bram Stoker's Chair II, 2005

Il y a bien sûr le jeu des ombres, celle que l'on voit et celle que l'on ne voit pas. Le titre, La chaise de Bram Stoker (auteur de Dracula) confirme la tonalité fantastique. Encore faut-il trouver une explication rationnelle à la position désarticulée du corps ! Un article de Justine Picardie trouvé sur le Net confirme mon hypothèse : le corps est suspendu par des cables dont la trace est ensuite effacée numériquement comme est effacée ... l'ombre de la chaise.

" These appear in her new book, along with a series of images in which Sam appears to be suspended in the air, yet her seemingly effortless acrobatics were achieved by being trussed up by a bondage expert and hung from wires in the ceiling; the constrictive harnesses and cables were later digitally removed from the finished images, though an ambiguity remains. (Is she floating or sleeping, liberated or controlled? Where, in fact, is she bound?)"
www.telegraph.co.uk/.../The-escape-artist.html

L'exposition a fermé ses portes le 17 Mai. Les rouvrira-t-elle ailleurs ? J'aimerais bien car à coups sûr, j'y retournerai !

En attendant, et puisque voyages et expositions finissent toujours par me ramener aux livres, en voici un qui vous permettra de ne pas quitter l'ombre : L'histoire merveilleuse de Peter Schlemihl ou l'homme qui a vendu son ombre d'Adelbert von Chamisso. Un récit fantastique dont la lecture a fait peiner plus d'un germaniste ! Mauvais souvenir mais très belle et très édifiante histoire. A moins que vous ne préfériez le roman d'un écrivain espagnol contemporain : L'ombre du vent, de Carlos Ruiz Zafon . Et si vous avez d'autres titres à me proposer, je suis preneuse !

Aucun commentaire: