04 juin 2009

Blaise Pascal (suite et fin ?)

- Alors ? Les Pensées ? Tu t'en sors ?
- A peu près, mais dis donc, il se répète pas mal.
- N'oublie pas que ce n'était qu'un brouillon. Pascal est un fin styliste, il affine, il cherche la bonne formulation; la plus juste, la plus parlante...
- Oui c'est vrai qu'il écrit pas mal. C'est un peu pompeux par moments mais j'aime bien. Tiens, cette phrase par exemple :
"Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie."
- L'effroi pascalien... Contagieux, tu ne trouves pas ? Camus, Malraux (qui a abondamment cité Pascal) éprouvaient la même angoisse. Il est vrai qu'ils ne la soignaient pas de la même manière. Mais pour en revenir à Pascal...
- Justement. Il y a un passage dont tu n'as pas parlé hier, une idée sur laquelle il revient avec insistance. Une histoire de divertissement ...
- "J'ai découvert que tout le malheur des hommes vient d'une seule chose qui est de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre."
- Justement. Qu'est-ce qu'il veut au juste ? Qu'on reste toute la journée le cul sur notre chaise ? Sans bouger ? Sans rien faire ? Tu parles d'une vie sociale ! Pas de portable, pas d'ordinateur, pas de Wifi ?
- Non. Parce que tout ce que tu fais te détourne de l'essentiel qui est...
- ... de chercher Dieu !
- En effet. Se di-vertir, au sens propre, c'est se dé-tourner. Et donc, même quand tu travailles, tu te di-vertis.
- C'est bien ce que j'avais cru comprendre. Donc ne rien faire et chercher Dieu.
- Attendre d'être touché par la foi puisque la raison est inutile. Attendre que Dieu se manifeste ... Attendre ....

- Encore une question : Pascal, il a convaincu beaucoup de gens ?
- Beaucoup je ne sais pas, mais s'il ne convainc pas, il fait réfléchir et c'est déjà beaucoup. A son époque, mine de rien, les questions métaphysique étaient sans doute plus vivement discutées qu'aujourd'hui bien qu'ils ne soient pas si nombreux à oser prendre position aussi fermement que Pascal. Car n'oublie pas que les Jansénistes n'étaient pas en odeur de sainteté. Les propositions contenues dans le livre de l'Evêque Jansen, à l'origine du mouvement, avaient été condamnées par le pape et l'abbaye de Port-Royal, QG des Jansénistes, sera fermée, puis rasée en 1713.
Finalement c'était assez courageux de la part de Pascal de s'engager comme il l'a fait aux côtés des Jansénistes.
Mais pour revenir à ta question, s'il a eu quelques amis, Pascal a surtout eu beaucoup d'ennemis. Le plus connu et le plus véhément étant sans doute Voltaire qui répond point par point à Pascal.
Pour lui, "L'homme est né pour l'action comme le feu tend en haut et la pierre en bas. N'être point occupé et n'exister pas est la même chose pour l'homme. " Voilà pour le divertissement.
L'angoisse existentielle ? Pas son truc non plus : "J'ose prendre le parti de l'humanité contre ce misanthrope sublime; j'ose assurer que nous ne sommes si méchants ni si malheureux qu'il le dit." Et enfin, à Pascal qui affirme "S'il y a un Dieu, il ne faut aimer que lui et non les créatures." Voltaire répond : [ ...] " Il faut aimer, et très tendrement, les créatures [ ...] Les principes contraires ne sont propres qu'à faire de barbares raisonneurs."
- Et toi, tu es du côté de Voltaire ou de Pascal ?
- Moi ? Du côté de la littérature, bien sûr. Celle qui fait réfléchir.

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