31 août 2010

Mario Giacomelli

Il y avait comme d'habitude à Arles, beaucoup de photographes et beaucoup de photos exposées. Trop peut-être parce que l'oeil parfois sature.

Mais devant les photos de Mario Giacomelli, non. Pas de risque ! L'oeil s'émeut et s'émerveille.
Que du noir et blanc. Du noir très noir et du blanc très blanc. Le photographe cherche le contraste, plus que l'harmonie, et obtient la force. La violence parfois. La tendresse souvent. Car il faut de la tendresse pour photographier comme il l'a fait ces visages, ces corps abîmés de vieillards aux portes de la mort.
Les photos de Giacomelli disent l'humilité des choses et des gens devant le temps qui passe, elles disent aussi la permanence des paysages, saisis d'en haut si bien que les champs labourés deviennent lignes ou figures géométriques, quasi abstraites si ce n'était pour la matière, lourde, limoneuse.

J'ai voulu en savoir plus sur ce photographe que je découvrais. Et plus j'en apprenais, plus il me passionnait. Orphelin de père à 9 ans, il accompagne parfois sa mère à l'asile de vieillards où elle travaille comme blanchisseuse. Plus tard il devient imprimeur. Ne découvre la photos qu'au début des années 50. Achète un appareil qu'il bricole, rafistole avec du scotch et n'en utilisera jamais d'autre. Il développe lui-même ses photos et en dehors d'un voyage à Lourdes, n'a jamais été voir plus loin que Senigallia où il est né.

Le site qui lui est consacré est en italien. Il présente beaucoup de photos, en petits formats certes, mais c'est déjà cela ! Certaines séries sont construites autour d'un titre souvent poétique, parfois même autour d'un poème . Io non ho mani che mi accarezzino il volto (Je n'ai pas de mains qui me caressent le visage), Verrà la morte et Avrà i tuoi Occhi (La mort viendra et elle aura tes yeux).
Une des émissions Contacts d'Arte était consacrée à Mario Giacomelli. A défaut de la retrouver, lisez la superbe entrevue du photographe avec Frank Horvat, lui-même photographe.

Juste un court extrait, qui vous donnera une idée du bonhomme :

"Mario Giacomelli : J'ai un appareil que j'ai fait bricoler, qui tient avec du scotch, qui perd des pièces. Je ne suis pas un passionné de mécanique, j'ai cet appareil, toujours le même, depuis que j'ai commencé à faire des photos. II a vécu avec moi, il a partagé de nombreux moments de mon existence, bons et mauvais. S'il venait à me manquer... enfin, la seule idée d'avoir à vivre sans lui me serre le cœur.

Frank Horvat : Mais d'où vient-il ?

Mario Giacomelli : Je l'ai fait bricoler. En mettant en pièces l'appareil d'un de mes amis et en faisant enlever ce qui me semblait inutile. Pour moi, il faut seulement la distance et l'autre chose - comment appelles-tu l'autre chose ? Je ne sais pas comment ces trucs fonctionnent, ce qui compte est que la lumière ne passe pas. C'est une boîte sans rien.

Frank Horvat : Et quel film utilises-tu ?

Mario Giacomelli : Le film que je trouve.

Frank Horvat : Du 35 millimètres ?

Mario Giacomelli : Ne me demande pas des millimètres ! J'utilise les films grands, pas les petits. Je n'ai jamais utilisé le petit format."

De quoi réconforter, tous ceux que la technique ennuie !

" Une photographie n'est pas faite seulement de ce que tu vois, mais aussi de ce que ton imagination y ajoute. Un autre y verra peut-être autre chose. Mais est-ce important qu'on y voie une chose plutôt qu'une autre ? "

L'entrevue date de février 1987. Mario Giacomelli est mort en 2000. Restent ses photos, les expositions et les livres qui lui sont consacrés.

30 août 2010

Bonnes adresses du côté d'Arles et d'Aigues-Mortes

Aigues-Mortes d'abord.
Une petite ville certes touristique, mais pleine de charme et dans l'Eglise de Notre Dame des Sablons, la lumière joue très joliment sur les vitraux de Claude Viallat.

Situé dans l'enceinte de la ville, L'Hermitage Saint Antoine, ajoute beaucoup au plaisir d'un séjour, même de courte durée dans la ville de Saint-Louis. Cette petite maison construite autour d'un patio intérieur abondamment fleuri, n'a que trois chambres à offrir à ses hôtes, mais elles sont toutes ravissantes.
Les maîtres du lieu sont très attentionnés et préparent des petits déjeuners aussi copieux que délicieux !






Un des nombreux attraits de ce lieu tient aux tableaux qui ornent les murs et qui sont tous signés Baranek. Mais de ces tableaux et de cette peintre, je vous reparlerai sans doute une autre fois.



Car j'aimerais vous parler aussi du Temps des Roulottes, un tout petit restaurant, 4 tables en terrasses et à peine plus en salle : décor ravissant, salades raffinées, travers de porc cuit et épicé juste comme il faut, brownie avec sa sauce au rhum ... à se damner ! Pas de site pour le Temps des roulottes (le restaurant vient d'ouvrir), mais une adresse : 14 rue Pasteur.

Arles ensuite !
Les bonnes adresses ne manquent pas, mais j'ai toujours plaisir à retourner à La Cuisine du Comptoir (10 rue de la Liberté) pour me régaler d'une de leurs inventives tartines. Décor moderne, à la fois simple et branché : un endroit sympathique où s'attarder entre deux expos !

Rien n'est jamais très loin à Arles mais disposer d'une chambre d'hôtel place du forum est un privilège apprécié. L' Hôtel du forum est un vieil hôtel, un peu labyrinthique; ses chambres sont spacieuses, le mobilier, un peu désuet mais c'est ce qui en fait le charme; la musique diffusée dans la salle de billard qui fait aussi office de bar, excellente; la piscine ceinte de hauts murs couverts de lierre, rafraîchissante et le personnel, disponible, efficace et aimable

Dormir, se restaurer... aussi court que soit le voyage, ce sont des points importants. Mais plus important encore ce que l'on voit, ce que l'on découvre, ce que l'on apprend.

21 août 2010

Cleveland contre Wallstreet

Dire de Cleveland contre Wallstreet que c'est un film engagé, n'est peut-être pas lui rendre service, car il y a peu encore, le mot faisait plutôt fuir !
Pourtant, la démonstration dans laquelle se lance Jean Stéphane bon, le réalisateur, est aussi intelligente que convaincante. En moins de 2 heures les mécanismes de la crise des subprimes sont démontés, expliqués, illustrés et le spectateur est aussi libre de son jugement que le sont les membres du jury populaire appelés à donner leur verdict à la fin du film.

On objectera que les témoins à charge, qu'il s'agisse des victimes prises au piège de leur "naïveté", du flic chargé des expulsions qui craque le jour où il doit expulser une vieille dame de 86 ans qui pourrait être sa grand-mère, de l'ancien dealer reconverti dans la vente des "subprimes", ou du concepteur du logiciel qui a permis de "monter" le système, constituent un pannel très - trop?- démonstratif. Mais ils sont vrais ! Ce ne sont pas des personnages inventés pour les besoins de la cause mais des gens qui, avant même d'avoir compris ce dont il s'agissait, ont été pris dans la tourmente. Tout aussi réel est le seul témoin de la défense, le conseiller gouvernemental, ardent partisan du libéralisme à tout crin au point de paraître grossièrement caricatural. Chacun dans ce film joue son propre rôle, y compris les deux avocats. Et le plus étonnant reste qu'un avocat ait accepté de prendre la défense de Wall Street; mais sous ses airs "bonhomme", c'est en fait, un redoutable sophiste : il désarçonne les témoins en leur posant des questions embrouillées pour lesquelles il exige une réponse par oui ou par non ! Et ça marche !

Cleveland contre Wall Street : un film bien fait sur un sujet a priori austère qui se révèle en fin de compte passionnant !
Mais qui ira le voir ?
Les traders ? les banquiers ? les financiers ? Cela m'étonnerait ! Ce sont de toute façon les grands absents du film.
Les gens qui ont tout perdu, leur maison, leurs économies, leur vie ? Il n'ont pas même les moyens de s'offrir une place de cinéma et sans doute pas envie de retrouver sur l'écran ce qu'ils vivent au quotidien.
Alors qui ?
Les intellos dans mon genre qui trouveront dans ce film la confirmation de ce qu'ils savaient déjà.
Dommage.

19 août 2010

Les Moissons du ciel

L'été est la saison pauvre du cinéma; il faut apprendre à se contenter de peu ou se consoler avec des DVD, ce qui vous l'avouerez, n'est pas tout à fait la même chose !
Mais il y a les reprises ! Et parmi elles Les Saisons du ciel de Terence Malick. Un vrai bonheur ! Bien qu'à vrai dire, je ne sois pas tout à fait convaincue que cela soit un chef d'oeuvre, mais a-t-on toujours besoin d'un chef d'oeuvre pour se faire plaisir au cinéma ?

Avec Richard Gere, Sam Shepard et Brook Adams à l'affiche, il serait de toute façon malvenu de se plaindre. Et le sujet, une histoire un peu sordide (une jeune femme est poussée par son amant dans les bras d'un jeune, riche et beau fermier) est par certains aspects très romantique (la jeune femme ne tombe-t-elle pas amoureuse du beau et riche fermier ? à moins que son coeur ne balance entre le voyou sans scrupules - un pléonasme - et celui qui est tombé fou amoureux d'elle ? ) Bref, un joli mélo sur ciel rougeoyant.

Ciel rougeoyant ? Coucher de soleil romantique ? Non, non ! Le rouge est celui de l'incendie qui ravage les champs après le passage d'un nuage de sauterelle qui n'a de tout façon rien laissé derrière lui. En effet, la dimension sociale du film n'est pas son moindre intérêt. Car la fortune du fermier dépend en grande partie des "hoboes", ces travailleurs manuels, libres et itinérants qui, bien avant la grande dépression voyageait clandestinement sur les trains de marchandises pour se faire embaucher au moment des récoltes et des moissons. Précaires, mais libres ! Enfin, jusqu'à un certain point...

Le film de Malick met en scène un Amérique qui n'existe plus, une Amérique rurale, celle des grands espaces marqués par la succession des travaux agricole plus encore que par l'alternance des saisons. Ah, les immenses champs de blés ondulant au gré du vent, les ciels infinis où courent les nuages, les changements incessants de lumière.... sur lesquels la caméra s'attarde avec une certaine complaisance. C'est en effet à Nestor Almendros et son assistant Haskell Wexler que l'on doit la qualité de la photo qui fait oublier le montage un peu chaotique, les ellipses pas toujours compréhensibles, les raccords inattendus.

Beauté de la photo, des couleurs; beauté des paysages, des visages. Est-ce l'objet photographié ou la qualité de la photo qui en fait une oeuvre d'art ? Je ne sais pas, mais je me suis régalée.

10 août 2010

Zygène et centaurée


Deux petits clics pour identifier la fleur, un de plus pour le papillon : facile, vraiment !

http://www.fleurs-des-champs.com/index.php

09 août 2010

Le Galilée de Brecht

- De plus en plus intermittents, tes lundi classiques, dis-donc !
- C'est vrai.
- Marre de tes vieux schnoques ? Tes écrivains des siècles passés ?
- Vieux schnoques, vieux schnoques... vieux peut-être ou plutôt anciens, mais certainement pas "schnoques" : ni imbéciles, ni séniles !
- Alors pourquoi tu traînes ?
- Sais pas ... Trop de choses à faire peut-être, trop de distractions, trop de ...
- Divertissements ?
- Sans doute
- Divertissement, détournement, déviation ... tu te divertis comme ... les libertins de Pascal?
- Peut-être ...
- Bon, alors, tu t'y remets ou tu ne t'y remets pas ?
...
- Allez un effort ! Je m'ennuie moi. J'ai lu tous les livres et ...
- Tous ? Vraiment ?
- Oui... enfin presque !
- Et alors ?
- Et bien, j'aimerais bien continuer. Parce que quand même, ente le XVIIe et le XXIe, il y a encore pas mal de chemin à parcourir.
- Justement et ce chemin n'est pas facile.
- Qu'est-ce que tu veux dire ? Je croyais que les querelles religieuses s'étaient apaisées, que l'Inquisition avait baissé la garde.
- Un peu ! Bien peu en réalité. De toute façon le pouvoir politique prend la relève du pouvoir religieux car l'un et l'autre se méfient comme de la peste de ceux qui osent penser librement.
- Eh, dis donc, tu ne te trompes pas de temps, là ? Tu ne devrais pas employer l'imparfait plutôt que le présent ? ou le passé composé ? "le pouvoir politique a pris ..."
- Passé composé, le temps de l'achevé.... je n'en suis pas si sûr...
- Ben, bonjour la déprime ! Ici, on a quand même le droit de penser comme on veut, et même de dire ce que l'on veut. T'as qu'à aller voir ailleurs, en Chine, en Iran ou en Inde !
- C'est bien ce qui me gène.
- Allez, en route ! C'est pas en traînant les pieds que tu vas les aider. Attache tes lacets et mets toi au boulot.
- ...
- Qu'est-ce qu'il y a encore ?
- Je ne sais pas par quel bout commencer. Voltaire ? Rousseau ?
- Eh, c'est pas à moi de choisir !
- Fontenelle ? Condillac ? La Mettrie ? ...
- Dis, t'en as encore beaucoup comme ça ?
- Le Baron d'Holbach ? D'Alembert ? ... Copernic ... Galilée ! ... ça te dit Galilée ?
- C'est pas un mec du XVIIe celui-là ?
- A peine : né en 1564, mort en 1642 et sa condamnation date de 1633 : le début du XVIIe.
- On revient en arrière alors ?
- Oui. Non. Pas vraiment! parce que, le Galilée que j'ai en tête c'est celui de Brecht.
- Comprends que dal, moi !
- Voilà. Bertold Brecht, un dramaturge allemand, a écrit en 1938 , ou peut-être en 41, une pièce intitulée La Vie de Galilée. Une pièce absolument passionnante. A condition bien sûr de la remettre en situation. De se souvenir que Brecht a été déchu de sa nationalité par le régime nazi, qu'il a été contraint à l'exil, qu'il s'est réfugié aux Etats-Unis d'où il a été chassé en 47 par ....
- Mac Carthy ?
- Peut-être pas directement, mais par la paranoïa anticommuniste que Mac Carthy a suscitée, certainement ! Brecht s'est alors réfugié en Suisse avant de s'installer à Berlin, côté Est.
- Côté République Démocratique Allemande, chez les communistes quoi !
- En effet.
- Et comme les démêlés de Galilée avec les autorités religieuses ressemblaient diablement aux démêlés de Brecht avec les autorités politiques, en racontant la vie de Galilée, c'est sa propre histoire qu'il a mis en scène.
- Pas mal ! Tu commences à bien te débrouiller ! Mais c'est encore mieux que cela : Brecht fait du procès de Galilée un récit emblématique de tous les conflits entre la connaissance et la foi, entre la science et la religion, entre les scientifiques, toujours avides d'en savoir plus et les autorités, religieuses ou politiques, soucieuses des bouleversements et des déséquilibres que ces nouvelles connaissances pourraient entraîner. Et comme Brecht a remanié sa pièce jusque dans les années 50, son Galilée a fini par ressembler à Einstein, Oppenheimer ou n'importe quel savant aux portes d'une découverte fondamentale pour l'humanité. Autrement dit c'est une pièce à valeur universelle, une de ces oeuvres dont l'intérêt ne se périme jamais. L'héliocentrisme, la fission de l'atome, les manipulations génétiques... chaque époque apparemment a des raisons de se prendre la tête.
- Tu vas pas un peu vite, là ? Tout à l'heure tu traînais les pieds et maintenant tu galopes !
- D'accord, d'accord. Qu'est-ce que tu veux savoir ?
- Et bien ... La vie de Galilée, c'est la vraie histoire de Galilée ?
- En gros oui !
- Mais en détails ?
- En détails ... Brecht n'est pas un biographe au sens propre du terme et la vérité historique n'est pas son principal souci. Ce qui l'intéresse - et ce qui nous intéresse - c'est le sens qu'il donne à un événement historique connu de tous : la révolution copernicienne.
- Copernicienne ou galiléenne ?
- L'usage attribue la "découverte" de l'héliocentrisme à Copernic, mais c'est Galilée qui en apporta la confirmation et c'est lui surtout qui s'en fit le propagateur. Copernic avait bien publié son grand oeuvre Des révolutions des sphères célestes, juste avant de mourir en 1543, mais sa théorie n'était connue que de quelques érudits; l'Eglise pouvait encore faire semblant de l'ignorer. Avec Galilée, ce n'était plus possible.
- Attends ! la science, c'est la science et la religion c'est la religion.
- Belle lapalissade ! Mais quand la science remet en cause les fondements de la religion, qu'est-ce que tu fais ?
- J'écoute la science .
- Trop facile ! Bien sûr, tu peux te la jouer tendance parano, en affirmant que la religion ne cherche qu'à garder son ascendant sur le peuple : le pouvoir, toujours le pouvoir ! Et que c'est pour cette raison qu'elle a refusé si longtemps les thèses de Galilée. Mais Brecht invente un petit moine - mon personnage préféré - qui au début de la pièce prend fait et cause pour Galilée, s'enthousiasme pour ses découvertes, pour les avancées de la connaissance, devient son disciple le plus zélé, jusqu'au jour où il se souvient de ses parents, de pauvres paysans illettrés qui ne supportent les misères de leur existence que parce que la religion leur a fait croire que "tout le théâtre du monde est construit autour d'eux". Que la terre est au centre de l'univers et qu'un Dieu bienveillant veille sur eux. Tiens écoute-le, ce petit moine qui vient dire à Galilée pourquoi il renonce à l'astronomie. " Que diraient les miens s'ils apprenaient de moi qu'ils se trouvent sur un petit amas de pierres qui, tournant à l'infini dans l'espace vide, se meut autour d'un autre astre, petit amas parmi beaucoup d'autres, passablement insignifiant de surcroit."
La religion leur permet de donner un sens à leur misère ; pas la science ! Et pour la paix de l'âme des pauvres gens, ce petit moine plein de charité est prêt à renoncer au travail scientifique qui pourtant le passionne. Et à garder une explication sans doute rassurante, mais fausse. Heureusement, Galilée est là pour s'emporter et même s'enrager : "Diable, je vois la divine patience de vos gens, mais où est leur divine colère ? " Divine patience, divine colère ? ça ne te rappelle rien ?
...
- Frère Jean des Entommeurs qui devant le massacre des vignobles de son abbaye, oppose le service du vin au service divin ! et entraîne derrière lui tous les petits moinillons pour aller défendre leurs vignes plutôt que de s'abîmer en prières.
- Ouh-là ! Avec toi on se retrouve toujours du même côté. Contre la religion ! Je ne suis même pas certain d'avoir bien compris comment tu es arrivé là. Brecht, Rabelais, Galilée... quelle salade !
- Mais non ! De toute façon mon petit moinillon ne résiste pas longtemps, il suffit que Galilée lui mette un livre entre les mains et il replonge dans ses lectures. La curiosité, la soif de savoir...
- ... riosité... vilain.... faut
- Quoi, qu'est-ce que tu marmonnes ? Si la curiosité est un vilain défaut, pourquoi est-ce que tu continues à me poser des questions ?
- Parfois je me demande ...
- Tu vois !
- Je me demande si tu n'es pas un peu soupe au lait !
- Pas plus que Galilée ! Parce que Brecht en fait un sacré personnage. Exigeant, impatient, coléreux, insupportable mais quelle passion, quel enthousiasme ! Il est infatigable. Du genre toujours plus.
- Un peu monomaniaque, non ? Du genre "savant fou" ?
- Sans doute. Bien que .... vois tu, plus encore que la science, c'est l'humanité qu'il aime et dont il voudrait soulager la misère, grâce à la science.
- Pourtant il a abjuré !
- Justement ! Un des intérêts de la pièce, c'est ce que Brecht a imaginé : la vie de Galilée après le procès. Galilée est mis au cachot puis assigné à résidence avec interdiction absolue de poursuivre ses recherches et encore plus de publier.
- Et que fait Galilée ?
- Qu'en penses-tu ?
- Il renonce ? Non, il continue, comme le moinillon ?
- Et bien, tu n'as plus qu'à lire la pièce ! Et tu découvriras à quel point elle est emblématique de tous les affrontements, passés ou à venir, entre les hommes de science et les hommes de pouvoir.
C'est pourquoi, bien que de façon détournée, elle constitue une excellente introduction à l'étude du XVIIIe siècle et permet de comprendre ce qui s'est passé à ce moment là entre les tenants de la raison et ceux de la foi. A mes yeux, il y a eu entre le XVIIe et le XVIIIe une sorte de bascule, un mouvement qui vient de loin, des libertins, des humanistes de la Renaissance et bien au-delà qui a permis au rationalisme, à l'esprit scientifique de marquer des points contre la croyance, la pensée magique, la religion. Pas grand chose, tout juste un frémissement.
- Si tu le dis .... parce que quand je lis les journaux, j'en doute un peu.
- Et bien continue de douter; c'est le début de la sagesse.


J'aime assez ce "portrait" de Galilée devant ses juges. Plutôt bravache, non ?

En 1644, dans un pamphlet passé quasi inaperçu, le poète anglais Milton écrivait « Qu’on me donne la liberté de connaître, de m’exprimer et de disputer librement, selon ma conscience, avant toute autre liberté. »

08 août 2010

Traces


Je n'aime pas spécialement le rose. Mais j'aime bien les traces sur les murs.

05 août 2010

Yvoire, le Jardin des sens

Le jardin des sens à Yvoire est un jardin passionnant et mérite certainement plusieurs visites.

Quelle est sa plus belle saison ? Quand les tulipes sont en fleurs ? ou les pommiers, élevés en espalier ? Quand les iris rivalisent avec les pivoines ? Quand la végétation se bouscule pour avoir le premier rang ou quand, les grandes floraisons achevées, le jardin s'achemine vers la maturité et ... la sérénité ?
Pourquoi faudrait-il choisir ente l'effervescence des débuts, la pleine maturité ou même la lassitude des fins de saison ? Quelle que soit la saison, chacun y trouvera son compte.

Construit comme un labyinthe le jardin propose 4 chambres de verdure, consacrées au goût, à l'odorat, au toucher et à la vue. Au centre de ces 4 chambres une volière et une fontaine ; le bruit de l'eau et le chant des oiseaux accompagne le visiteur où qu'il se trouve.


Le dispositif est simple mais charmant.
Le jardin du toucher a ma préférence et je ne me lasse pas de glisser ma main le long des feuilles pour sentir le velouté des oreilles d'ours, le piquant des mahonias, le rugueux, le volatile, le lisse... etc. Mais se pencher sur chaque fleur pour en respirer le parfum, découvrir que les pélargoniums peuvent sentir le citron, la menthe, la rose ou le gingembre, que les héliotropes sentent le pain d'épice, et les ellychrisum le curry, quel plaisir !

Avant d'entrer dans le labyrinthe proprement dit il y a un premier jardin, de type alpin, où de splendides panicauts et autres chardons bleus saluent le visiteur.















Et juste avant d'entrer dans le cloître des simples, il y a un drôle de jardin à damiers qui alterne roses blanches (Blanc double de Coubert) et avoines éternelles ! L'association est étonnante, mais ravissante ! Légère et parfumée.


Pourtant ce n'est pas dans le jardin, mais à l'extérieur du jardin, au bord de la route, que j'ai trouvé ma plus jolie scène, un composition toute simple de graminées : pennisetums et

04 août 2010

Musée Barbier-Mueller

Le musée Barbier-Mueller est un très petit musée : pas le temps de s'y ennuyer. Et chacune de ses expositions est une merveille.

L'exposition en cours est intitulée Bijoux de l'homme, bijoux de la terre; elle juxtapose dans ses vitrines de somptueuses parures ethniques parfois d'une étrange modernité et des minéraux, des cristaux tout aussi éblouissants. Pierres et bijoux ont été mis en scène avec un souci esthétique évident. On sort de ce petit musée, ébloui par tant de beautés : beauté des formes, beauté des matières, beauté des productions de la nature, beauté des créations humaines.


Les collections d'art primitif - auxquelles le musée est consacré - mais aussi de tableaux modernes (Matisse, Picasso, Cézanne ...) ont été constituées dès les années 20 par Joseph Mueller puis par son gendre Jean-Paul Barbier, longtemps avant que ne s'ouvre le musée qui désormais associe le nom de ces deux collectionneurs passionnés.

Le musée Barbier-Müller est installé rue Jean Calvin, dans la vieille ville de Genève et il est ouvert tous les jours, 365 jours par an !

03 août 2010

Edward Hopper à Lausanne

Edward Hopper à Lausanne, Nicolas de Staël à Martigny, Samuel Rousseau à Alex...
Trois expos pendant le week-end, trois expos qui n'ont en commun qu'une certaine proximité géographique et dont la plus intéressante n'est peut-être pas celle que l'on croit.

Edward Hopper est, depuis longtemps un de mes peintres préférés. Sans doute parce qu'il a su saisir quelque chose de l'Amérique, loin des clichés habituels sur ce pays du capitalisme triomphant. Je partais à Lausanne avec en mémoire l'éblouissante exposition que lui avait consacrée le musée Cantini de Marseille il y a quelques années. J'ai donc logiquement été déçue. L'exposition est intéressante, sans aucun doute, très instructive puisque la juxtaposition des dessins préparatoires et des tableaux permet de mieux comprendre comment travaillait Hopper. Oui mais voilà : j'espérais revoir ses "grands" tableaux : Cape Cod Morning, Hotel Room, Hotel by a railroad, Four Lane Road, People in the Sun ... qui n'y étaient pas.
Déçue donc !

Nicolas de Staël est un peintre que je connais mal, mais dont l'approche, aux limites de l'abstraction, m'intéressait. Le détour par Martigny était donc justifié d'autant qu'à la fondation Gianada sont souvent exposées des oeuvres provenant de collections particulières et donc invisibles en dehors de cette occasion. Mais de toutes les toiles exposées, je ne retiens guère que les plus colorées : les paysages siciliens qu'il a peint deux ans à peine avant de se suicider !

La troisième exposition s'est révélée finalement la plus passionnante : il s'agit de Samuel Rousseau, un jeune artiste qui travaille à partir de montages et découpages vidéo, une technique apparemment très complexe pour un résultat surprenant qui bouscule les repères et les références que nous pouvons avoir en matière d'esthétique et d'art. Les oeuvres exposées sont drôles souvent et cependant riches de sens. Ce qu'on demande à un artiste, c'est de nous faire partager son regard sur le monde et Samuel Rousseau y parvient remarquablement. Qu'il s'agisse du passage du temps comme dans l'Arbre et son ombre, du sens ou plutôt du non-sens de l'agitation perpétuelle des êtres humains comme dans Plastikcity où l'on voit passer et repasser des cohortes de "salary men" sur des bidons de plastique empilés comme des immeubles.
Quant au "P'tit bonhomme" coincé au pied d'une marche d'escalier plus grande que lui, on rit d'abord de ses essais infructueux avant de partager l'angoisse de celui qui se retrouve sans savoir pourquoi, coincé dans un monde démesuré et sans issue.

Difficile de décrire le travail de Samuel Rousseau; il faut prendre le temps d'aller jusqu'à Alex, une petite ville près du lac d'Annecy, d'aller jusqu'à la Fondation Salomon, qui deux fois par ans expose des artistes contemporains, connus ou moins connus mais toujours intéressants à découvrir.

02 août 2010

Une autre petite bête


Dangereusement armée, la petite bête. Un vrai "robocop" .... miniature (heureusement!)

Après vérification, il s'agirait d'un genre de scarabée, un lucane cerf-volant, mâle (ça, on le voit à ses grandes mandibules), tout à fait inoffensif. Mais j'ai du mal à le croire.