29 janvier 2014

12 Years a slave

Esclave pendant 12 ans.
Si l'on croit parfois tout savoir sur l'esclavage aux Etats-Unis, et le commerce du "bois d'ébène" entre l'Afrique et l'Amérique, on ignore souvent que certains individus n'hésitaient pas à kidnapper des Noirs libres pour les vendre comme esclave.

Solomon Northup, originaire de l'Etat de New York était un homme libre. Il était marié, avait deux enfants mais abusé par deux malfrats, il a été vendu à un marchand d'esclave. 12 ans d'esclavage, à passer de maître en maître jusqu'à ce qu'enfin il parvienne à prévenir sa famille et retrouve sa liberté.
Son témoignage, puisqu'il s'agit d'une histoire vraie, a été publié en 1853 sous le titre 12 Years a Slave et c'est ce livre que Steve McQueen vient d'adapter au cinéma.


Il s'agit bien sûr d'un film édifiant, classique dans sa facture, et comme tous les films historiques un peu alourdi par la nécessité de reconstituer l'époque, à travers décors et costumes.
Sans doute.
Mais il n'est pas inutile de rappeler les turpitudes dont sont capables certains individus que l'on hésite à qualifier d'humains. Il y a eu, c'est évident, des maîtres moins abominables que d'autres. Mais le film comme le livre rappelle que pour la plupart des planteurs, un esclave n'est jamais qu'un "outil de propriété animé",  selon la formule d'Aristote lui-même (!), un bien dont la valeur marchande est calculé d'après sa seule capacité à travailler. L'esclavagiste n'éprouve aucune culpabilité vis à vis de l'esclave puisqu'il ne le considère pas comme un être humain. Le personnage qui, à mes yeux, incarne mieux qu'un autre l'esprit esclavagiste, ce n'est pas un homme, mais une femme :  Maîtresse Epps.  La violence de ses propos m'a paru pire que tous les coups et sévices physiques infligées aux esclaves.  Son maintien, son port de tête, son accent en font pourtant la quintessence de la "Southern Belle".

L'histoire de Solomon Northup est véridique. Véridique aussi était l'histoire de Nat Turner que William Styron a raconté dans Les Confessions de Nat Turner, un livre auquel je n'ai cessé de penser en regardant le film.
Nat Turner n'était pas un homme libre, c'était un esclave; il est passé lui aussi d'un bon maître (qui lui avait appris à lire) à un mauvais maître.  Il a fini pendu pour avoir conduit une mutinerie qui s'est terminée dans le sang.

27 janvier 2014

Le Vent se lève


 Le vent se lève! ... Il faut tenter de vivre! 
Valéry, Le Cimetière marin 

Un de mes poèmes préférés.

Sous de tels auspices je ne pouvais manquer le dernier film d'Hayao Miyazaki. J'ai pourtant été déçue. Un peu. Bien que les images soient souvent magnifiques. Mais le propos de Miyazaki, dont on dit que c'est le dernier film, n'est pas aisé à comprendre.

Il est question, dans ce film,  d'un jeune japonais, passionné d'aviation qui, devenu ingénieur, n'a de cesse d'inventer un avion aussi léger qu'un ... avion de papier ? Les passionnés d'aéronautique et d'histoire auront reconnu l'avion Zéro, celui des kamikazes de la guerre de 40, avec lequel a été menée l'attaque contre Pearl Harbor.
Jiro, puisque tel est le nom du jeune ingénieur, construit donc son avion, sans trop se préoccuper de l'usage qui en sera fait. Ce qui l'anime avant tout c'est sa passion pour l'aviation, une passion dévorante qui lui fait négliger la femme que pourtant il aime; malade elle n'a pas très longtemps à vivre. 



Ainsi l'histoire de Jiro serait, si j'ai bien suivi, l'histoire de quelqu'un qui s'est aveuglé au point de ne pas voir la mort à l'oeuvre, dans sa vie personnelle comme dans la société japonaise, quelqu'un qui s'aperçoit, un peu tard, qu'il est passé à côté de sa vie, qu'il n'a pas fait les bons choix.

Constat trop pessimiste ? Narration trop décousue ? Toujours est-il que cette histoire ne m'a pas vraiment accrochée. Ce que j'ai préféré au fond dans le film de Mizayaki, c'est l'évocation nostalgique d'un Japon qui n'existe plus et que j'aurais aimé connaître. 

18 janvier 2014

Andres Rabago


 Llegué a la exposición por pura casualidad  paseando por la ciudad de Valencia,  distinguí  en la fachada de la Universidad un gran cartel que despertó mi curiosidad.


Entré y no salí enseguida porque los dibujos  fijados en las paredes me cautivaron inmediatamente

Dos frases en la pared:
 Todas las iglesias se acuerdan de sus mártires y  se olvidan de sus víctimas.”
“Ya no me llaman “negro”, me llaman “de color, pero me siguen tratando como cuando era negro. “

Andrés Rábago, conocido también con los seudónimos de Ops y El Roto es un  dibujante español que empezó su carrrera de humorista a mediados de los años sesenta cuando la dictadura todavía estaba. Después de la muerte de Franco, colaboró con muchas revistas y periódicos y ahora publica sus dibujos en El País. 


El trazo de sus dibujos es siempre simplísimo pero muy eficaz. Con mucha temeridad este librepensador se guasea de la religión y de la política, pica a todas las formas de poder porque dice:   El poder siempre es una forma de máscara ».
No se las ahorra  con nadie ni con nada, pica a los hombres como a las mujeres;  pica a los ricos como a los pobres. No es solamente un humorista que intenta hacer reír, es un humorista/caricaturista: sus dibujos provocan una sonrisa pero también una mueca cuando se entiende las implicaciones. 


De vez en cuando, Andrés Rábago deja su lapiz, toma pincels y  colores y se hace pintor !

 
  

Una larga  entrevista de Andrés  en el diario  (02/12/2012 )
http://www.eldiario.es/cultura/Andres-Rabago-Roto-penetracion-personas_0_74542884.html

 P.S.Ce billet sur Rábago est publié simultanément sur sendashispanicas.blogspot.fr,
un site tout en espagnol sur des tas de sujets concernant l'Espagne et l'Amérique latine. N'éhsitez pas à aller y faire un tour.

16 janvier 2014

Suzanne


Deux soeurs inséparables ! La plus jeune, Maria, est la plus raisonnable, mais elle est incapable de résister à sa soeur. L'ainée, Suzanne, est toute dans l'émotion, la passion. Incontrôlable le plus souvent.
Les deux filles, orphelines de mère, sont élevées par leur père, un chauffeur routier souvent absent mais père attentionné malgré tout.  Un premier dérapage et Suzanne se retrouve mère d'un petit garçon. C'est ensuite la rencontre avec un jeune malfrat et le début de la dérive tragique.

Le film tient essentiellement par la qualité de jeu des deux actrices, mais il touche parce que les personnages sont vrais : ils sont ancrés dans une réalité sociale précise et gagnent ainsi en crédibilité.  Suzanne c'est l'histoire d'une jeune femme, mais c'est aussi l'histoire d'un milieu, ni pire ni meilleur qu'un autre,  où elle peine pourtant à trouver sa place, elle qui depuis toute petite, s'accommode si mal du quotidien au point d'oublier d'aller déjeuner à la cantine tant elle est absorbée par ses jeux.

Suzanne est le deuxième long métrage de Katell Killévéré et c'est pour moi une découverte rafraîchissante. L'espoir d'un cinéma français différent.



15 janvier 2014

Philomena

Philomène, c'est forcément un nom de vieille dame, mais quelle vieille dame ! Elle est, au dire de son compagnon de voyage, un journaliste cynique et désabusé, "un parfait exemple de ce que la religion la télévision et les romans à l'eau de rose peuvent faire sur un cerveau humain."

Car bigote, elle l'est en effet, bien qu'elle ait toutes les raisons de haïr la religion et les religieuses qui l'ont obligée, alors qu'elle avait à peine 16 ans, à abandonner son enfant  "conçu dans le péché" et ont toujours refusé, lorsqu'elle en a fait la demande des années plus tard, de lui donner la moindre information qui lui aurait permis de retrouver son fils.
50 ans plus tard, aidée par un journaliste en mal d'emploi - passablement prétentieux et réticent à traiter d'un "sujet de société," lui qui il y peu encore jouait les spin doctors pour le premier ministre - elle part sur les traces de ce fils auquel elle n'a cessé de penser, année après année.

Le film de Stephen Frears s'inspire d'un fait réel. Sans doute. Mais ce qui m'importe c'est ce qu'il en fait. Or Philoména est avant tout un pamphlet virulent contre la religion, ou plutôt contre l'interprétation qui en est faite par des êtres frustrés et malfaisanst comme le montre la scène de rage de la vieille religieuse qui, même arrivée au bout de sa vie, continue de vouloir punir Philomena comme si elle n'avait pas déjà suffisamment souffert dans son corps et dans son âme. 
Le propos de Stephen Frears a de quoi réjouir les mécréants et choquer, sans doute, les âmes pieuses. C'est pourquoi très habilement le réalisateur construit son film autour du "couple" formé par le journaliste et la vielle dame, lui, le jeune intello sorti "d'Oxbridge, habitué des vols internationaux et des grands hôtels ; elle un modeste vieille dame, un rien obstinée qui juge avec son coeur plus qu'avec son intelligence. Le procédé a déjà beaucoup servi, il est vrai , mais il fonctionne ici parfaitement, sans doute grâce aux talents des deux acteurs, Judi Dench et Steve Coogan.



11 janvier 2014

Fruitvale station

C'est l'histoire d'un type qui s'est trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment. En l'occurrence Fruitvale station la nuit du 31 décembre 2009.  Sans doute avait-il aussi la mauvaise couleur. Un jeune homme  de 22 ans qui n'était certainement pas un ange et avait déjà commis suffisamment de délits pour se retrouver en prison à plusieurs reprises. Un impulsif plus qu'un mauvais bougre, la tête près du bonnet. Mais il avait décidé de changer. De s'amender. Et n'en a pas eu le temps.

Le film de Ryan Coogler s'appuie sur un fait réel, un de ces faits divers qui fait, brièvement, la une des journaux. Et si le film est réussi c'est parce que le réalisateur a choisi d'insister  sur l'enchaînement des faits, insignifiants a priori, qui mènent à la catastrophe. Quelque chose comme un destin en marche. Mais sans la pesanteur des idéologies car le cinéaste cherche moins à dénoncer qu'à montrer.  En effet, il ne s'agit pas de chercher qui est coupable, mais de comprendre que tout - sa couleur, son passé, l'envie de sa petite amie d'aller voir le feu d'artifice à San Francisco, la suggestion de sa mère de prendre le métro,  la jeune fille qui l'appelle par son nom,  l'ancien détenu qui le reconnaît et lance la bagarre, les flics survoltés, paniqués, la confusion générale - tout, cette nuit là, a joué contre Oscar Grant. Il n'y a pas de hasard, juste une suite de circonstances, toutes déterminantes.
Fruitvale est une station de métro entre San Francisco et Oakland.

10 janvier 2014

Tel père, tel fils

A l'ouverture du film on se dit que "c'est tellement japonais" !  La course à l'excellence,  la course aux meilleures écoles : le film commence par l'interview/examen de passage d'un petit garçon de 6 ans pour entrer dans une école privée très cotée !  .... et puis finalement non, le  film est sans doute très japonais, mais la question posée est universelle. Qu'est-ce que la paternité ? Comment se tissent les liens entre un père et son fils ?



Tel père, tel fils est bâti, en gros sur le même scénario que le film de Chatiliez, La Vie est un long fleuve tranquille : l'échange de deux enfants à la maternité, découvert alors que les enfants ont grandi dans des familles très différentes culturellement et socialement.  Mais alors que Chatiliez force la charge pour marquer l'écart qui sépare les Groseille des Le Quesnoy, une caricature souvent grossière dont le principal objectif est de faire rire,  le cinéaste japonais Hirokazy Koreeda met l'accent sur la relation entre un enfant et son père. 
Le père biologique de Keita est un homme jovial, un électricien habile de ses mains,  peu soucieux de réussite sociale, un gentil hurluberlu toujours prêt à jouer avec ses enfants, à passer du temps avec eux. Un père affectueux et attentionné.
L'autre père, est un architecte de renom, dont la réussite sociale est évidente, un homme exigeant, qui entend donner à son fils tous les atouts qui lui permettront d'entamer à son tour un parcours d'excellence. Un père affectueux sans doute, qui consacre néanmoins plus de temps à sa carrière qu'à son fils. Sa femme, en bonne Japonaise, a déjà renoncé à ses propres ambitions professionnelles pour se consacrer entièrement à l'éducation de l'enfant.
Deux exemples de père dont aucun n'est exactement un modèle.

Le cinéaste, sans pousser plus loin la caricature, se contente de montrer qu'il existe deux façons d'être père. Il propose ainsi au spectateur de s'interroger à son tour sur les liens du sang, sur une filiation qui se ferait essentiellement par les gènes ou, au contraire, par l'éducation. et tout simplement l'amour. En fin de compte, que les deux enfants soient "échangés",  chacun retournant dans sa famille "biologique" ou qu'il restent dans leur famille d'origine, importe moins que la prise de conscience de ce qui unit un père à son fils.
Vu du côté de l'enfant, le film suggère aussi qu'un fils ne ressemble pas nécessairement à son père ! Pas plus qu'il n'a l'obligation de se conformer aux expectations  de son père ou de combler ses aspirations quand ce n'est pas compenser ses frustrations.

09 janvier 2014

Ici et là dans la ville

Il faut un peu de tout pour faire une ville...
 


... des touristes à vélo devant le portail roman de la cathédrale


 ... une manif anti-avortement sur la place de la Vierge, devant la Basilique de Nuestra Señora de los Desemparados. Oui, l'Espagne est toujours très catholique et vient de faire passer une loi qui restreint l'accès à l'avortement. Et même pas de contre-manifestation pour réclamer 
"un enfant SI JE VEUX

 

Un pas en avant, un pas en arrière, ainsi va le monde ?

Continuant ma promenade j'ai vu :
 une vieille quincaillerie, plus riche de trésors insoupçonnés qu' une caverne d'Ali Baba


Des "azulejos" sur la façade d'un musée... 


et d'autres à l'intérieur d'un café où je me suis arrêtée le temps d'un "cafecito".


Une enseigne de magasin qui se lit comme un clin d'oeil, à une petite Lulu lointaine



Et puis surtout, pas très loin, à quelques kilomètres de Valencia,  il y a la mer !



08 janvier 2014

Paella valenciana



 D'abord les plats ...


Ensuite les fourneaux ...


Et la voilà, l'incontournable paella valenciana


dans une variante toutefois inhabituelle puisque réalisée avec des pâtes : la Fideuá. Son origine a fait naître toutes sortes de légendes dont la plus courante est celle des marins  (ou du cuisinier ? ) à cours de riz.

P.S. Pour des dîners plus sophistiqués, allez-voir le site de mon amie Alma : http://viaggiaconalma.blogspot.fr/


El mercado central


 Architecture, peinture... Valencia a certainement beaucoup à offrir sur le plan culturel. Mais ce n'est pas une raison pour dédaigner le nourritures terrestres surtout quand elles sont aussi appêtissantes qu'au Mercado Central, dont le bâtiment actuel a été inauguré en 1928 et porte visiblement les marques architecturales du début du XXe siècle. 




Bien que je n'ai pas réussi à trouver ce que signifient les deux L sur le vitrail central. 


 Sous la coupole, les étals des marchands sont plus beaux les uns que les autres et, en cette veille de Nouvel An, les chalands se bousculent.


Des régiments entiers de jambons, mais attention, pas n'importe lesquels, les "pata negra"seuls dignes des bonnes tables espanoles !


Des empilements de "calabazas" ...


..."pimientos", "berengeras",  (un mot qui ne peut venir que de l'arabe)


"gambas" bien entendu sans lesquelles la "paella valenciana" ne serait pas ce qu'elle est !
Et comme on est sur le point de changer d'année, il y a des étals entiers de raisins puisqu'il est de tradition lorsque sonnent les douze coups de minuit, d'avaler douze grains de raisin.  Et si l'on parvient à accomplir le rite sans faillir, c'est du bonheur assuré pour toute l'année !






07 janvier 2014

Le thé avec Nefertiti

L'IVAM (Instituto Vlenciano d'Arte Moderna) où je me suis arrêtée hier, proposait plusieurs expositions. Au dernier étage : La Abstracción de Rafael Canogar. Les tableaux présentés sont effectivement très abstraits, avec un travail sur la couleur et la matière pour le moins expressif.


Mais l'exposition la plus passionnante de l'Ivam était à n'en pas douter celle du premier étage, intitulée Te con Nefertiti. L'exposition a déjà été présentée à Doha et cet été, à Paris, à l'Institut du Monde arabe.
L'exposition ressemble d'abord à un grand fouillis où se côtoient des objets hétéroclites, deux bras de pelleteuse à côté d'une statue nubienne, une potiche islamique ou d'une machine à coudre de la marque Nefertiti. Peu à peu de ce désordre apparent émergent quelques pistes qui permettent de donner du sens à l'ensemble. Il s'agit en fait de provoquer une réflexion sur le statut de l'oeuvre d'art qui change selon le contexte dans lequel elle est présentée.  L'exposition est drôle, intelligente et surtout stimulante. Il faut pour l'apprécier prendre le temps d'y passer plusieurs heures, regarder les  les cartels, les vidéos; il faut surtout accepter d'être bousculé dans ses habitudes. Ce n'est pas une exposition sur l'art égyptien mais plutôt une réflexion sur ce que nous avons fait de l'art égyptien, à partir du moment où les oeuvres ont été mises dans un musée ou utilisées par les médias.





Pour vous faire une petite idée de l'exposition,  à défaut de pouvoir la voir puisqu'elle ferme le 7 Février, deux sites :
- pour les hispanophones, le site de l'IVAM qui a mis en ligne le catalogue de l'exposition.
http://www.ivam.es/exposiciones/2951-t-con-nefertitihttp://www.ivam.es/exposiciones/2951-t-con-nefertiti
- pour les francophones, le site de l'IMA avec une intéressante interview des deux commissaires : Sam Bardaouil et Till Fellrath
http://www.imarabe.org/exposition-ima-9175



L'institut d'art moderne de Valencia

A peine plus loin que le Centre del Carme, se trouve l'Institut d'Art Moderne de Valence : architecture contemporaine, béton et verre comme il se doit puisque le bâtiment inauguré en 1989 a été remanié en 2000 par le même architecte, Emilio Gimenez.


Au rez-de chaussée, un restaurant, "design" comme on pouvait s'y attendre. Pas d'autre clients que nous, pourtant l'heure était raisonnable pour un déjeuner espagnol : 14h30. J'y ai déjeuné d'un "arroz con asparrágos y setas" délicieux, à ne pas confondre avec le "risotto con asparago e funghi " sous peine de s'attirer le regard outragé du serveur ! Première leçon de gastronomie valencienne.

06 janvier 2014

Deux peintres valenciens


Au Centre del Carme - puisque tel est son nouveau nom - j'ai découvert deux peintres espagnols passablement différents, mais dont les oeuvres étaient remarquablement présentées.

Calo Carratal est un peintre Valencien qui, à l'occasion d'une résidence d'artiste en Norvège a exéctué une série de toiles représentant des paysages enneigés, à peine striés de noir, ou de marron. De rouge très sombre comme on imagine les fermes dans ces pays nordiques. Parfois un coin de ciel bleu...

Je ne sais pas si j'aurais aimé ces toiles dans un autre environnement. Mais la salle Ferreres (l'ancien musée des Beaux-Arts) dans sa blancheur absolue et son sol marbré de gris constitue un écrin précieux pour les oeuvres du peintre, magnifiquement mises en valeur.




Faute d'avoir pu photographier à mon gré j'ai emprunté deux photos au site : http://revistamito.com/noruega-2011-cronica-pictorica-de-calo-carratala/ et j'ai découvert incidemment d'autres toiles de Carratala, radicalement différentes non pas dans leur manière mais par l'usage de la couleur.

http://www.arteinformado.com/Eventos/37254/cuaderno-de-viaje/

De la couleur, il y en avait aussi dans les oeuvres de Marti Quinto exposées elles, dans l'ancien dortoir du Centre del Carme.  Etaient souvent juxtaposées des oeuvres réalisées sur le même sujet mais à quelques  années d'écart et parfois avec des medias différents, aquarelle, acrylique sur toile ou sur carton, collages ... ce qui permet d'entrevoir le travail de maturation ou plus simplement les questions que s'est posé l'artiste et les réponses qu'il y a apportées.
Quelques silhouettes élégantes, mais toujours solitaires. Des personnages isolés dans un environnement urbain, parfois absorbé dans leur lecture.


Quelque chose qui d'une certaine façon pouvait rappeler Hopper ...

 

Mais de loin, le tableau que j'ai préféré, c'est celui du lecteur, dans son lit ! 







05 janvier 2014

El convento del Carmen


Le Barrio del Carmen est un quartier populaire en voie de gentrification  bien que la crise  ait apparemment freiné cette évolution. Au coeur de ce quartier se trouve "el Real Monastero de Nuestra Señora del Carmen de Valencia". Le titre est pompeux, mais le couvent est un bijou à ne pas manquer ! 
Depuis 1281, date de sa fondation, il a subi tant de remaniements, de transformations, de modifications, qu'il ressemble désormais à un mille-feuille architectural. La dernière restauration a même permis de mettre à jour les ruines d'une habitation arabe, dont la construction est bien antérieure à celle du monastère  et que l'on peut désormais observer depuis un plancher en verre ! Un cloître gothique très dépouillé jouxte un autre cloître, roman celui-là et, selon la formule de mon Cartoguide, "délicieusement négligé".  La transformation du couvent en Musée à la fin du XIXe siècle lui a permis d'échapper à la "desamortización", cette entreprise économico-politique qui consistait à mettre aux enchères des biens improductifs détenus par des "mainsmortes" (essentiellement l'Eglise !)


 La dernière restauration de ce lieu étonnant s'est achevée en 2011 et désormais el Centre del Carme propose dans ses murs  toutes sortes d'activité culturelles.  Plusieurs salles sont consacrées à des expositions temporaires,  parmi lesquelles la salle Ferreres (du nom de l'architecte qui la conçut sur le modèle du Prado), le dortoir, le réfectoire... Ce qui permet de constater que l'architecture la plus classique, comme cette cage d' escalier du XVIIe siècle avec sa rotonde peinte, s'accorde parfaitement avec l'art contemporain.


Mais je parlerai un autre jour des deux expositions découvertes en ces lieux.

04 janvier 2014

Illusion



Un des sols en damiers de la Lonja de la Seda, et son étrange effet de perspective. Pour un peu, on se croirait dans un dessin de Escher, le génial graveur.

La Lonja de la seda

S'il est un monument dont les habitants de Valence sont fiers, c'est bien la Lonja de la Seda, La loge de la soie appelée aussi Loge des marchands.
Construit autour d'un patio d'orangers, le bâtiment, dont la construction a démarré à la fin du XVe siècle pour s'achever au milieu du XVIe a des allures de forteresse gothique, gargouilles comprises !



A l'intérieur, la salle la plus spectaculaire est le Salon aux colonnes, véritable temple du commerce où étaient réalisées les opérations boursières. Sa taille, sa magnificence témoignent de la puissance économique de la ville  ...  et de la moralité de ses marchands, si l'on en croit le phrase inscrite en lettre d'or sur ses murs :

"gustate et videte concives quoniam bona est negociacio que non agit dolum in lingua quae iurat proximo et non decepit quae pecuniam non dedit ad usuram eius mercatores sic de gens diviciis redundabit et tandem vita fruetur eterna." 

Une phrase qui fait l'éloge des marchands qui n'ont recours ni au mensonge, ni à l'usure ! Une conduite qui leur garantit richesse sur la terre et vie éternelle au-delà !

La salle, dont les colonnes torsadées montent jusqu'à 12 mètres est d'une folle élégance et me rappellent je ne sais plus quelle mosquée vue autrefois en Ouzbekistan.




Une petite chapelle sépare la salle des colonnes du Consulat de la mer, où se traitaient autrefois les affaires maritimes (pas de commerce sans vaisseaux marchands !) et qui servait également de tribunal. Sol à damiers noirs et blancs, rideaux de soie damassée grise aux fenêtres, plafond à caissons sculptés, l'ensemble est superbe.

La Lonja de la Seda  est une belle oeuvre architecturale et les Valenciens ont raison d'en être fiers, mais c'est avant tout une certaine image du commerce, à une époque où les marchands étaient de vrais aventuriers qui se risquaient à l'autre bout du monde pour y débusquer épices ou étoffes précieuses. Une image du commerce telle que la célébra Voltaire dans son poème Le Mondain.

" [...] O le bon temps que ce siècle de fer!
Le superflu, chose très nécessaire,
A réuni l’un et l’autre hémisphère.

Voyez-vous pas ces agiles vaisseaux
Qui, du Texel, de Londres, de Bordeaux,
S’en vont chercher, par un heureux échange,
De nouveaux biens, nés aux sources du Gange,
Tandis qu’au loin, vainqueurs des musulmans,
Nos vins de France enivrent les sultans [...] "

Beaucoup de sites sur la Lonja, mais celui-ci est vraiment très complet :
 http://www.jdiezarnal.com/valencialalonja.html