27 février 2014

Hypóthesis

Petit intermède cinématographique avant de poursuivre mon voyage égyptien vers Louxor.

J'ai vu dans la semaine deux films sud-américains, l'un argentin,  Gloria de Sebastián Lelio, un beau portrait de femme sans doute, mais légèrement ennuyeux, l'autre chilien, Hypothesis de Hernán Goldfrid avec l'incontournable Ricardo Darin.

Gloria, Ida, Philomena , sans oublier Tante Hilda ... rien que des portraits de femmes. Rien que des prénoms en "a". Simple coïncidence ... mais qui prête à confusion à la caisse des cinémas.

Rien de tel avec Hypothesis, un film un peu tortueux, dont il convient de ne perdre aucun détail si l'on veut suivre. Un film qui demande l'attention du spectateur, mais le laisse néanmoins dans l'incertitude à la dernière image. Ce professeur de droit pénal, qui soupçonne un de ses étudiants d'être l'auteur d'un meurtre commis sur le campus où il enseigne, a-t-il ou n'a-t-il pas raison ?  
Jamais à court d'arguments, il multiplie les hypothèses et le spectateur avec lui qui ne cesse de se demander s'il a raison ou si c'est simplement un homme qui déraille, qui s'égare dans une spirale paranoïde. 
Qu'importe l'hypothèse à laquelle on s'accroche en fin de compte, le film est construit comme certaines nouvelles de Maupassant, celles qui laissent toujours le lecteur sur la frontière entre explication réaliste ou fantastique. Un jeu intellectuel divertissant. Faute de mieux.

26 février 2014

Alexandrie aujourd'hui


Trêve de nostalgie. A force de se retourner sur le passé, on risque de passer à côté du présent qui lui est bien vivant.
Alexandrie est une ville qui vit et qui s'agite. Les rues sont pleines de monde. Les embouteillages sont permanents. On se bouscule gentiment, on s'interpelle. La ville est pleine de bruits, de cris, d'odeurs.

Marchands de tout, marchands de rien  ...


... dans des boutiques de rien du tout. 


Pas même besoin d'une échoppe...

... une charrette fait aussi bien l'affaire...

... pour y vendre ses pains ou ses loufahs

... un coin de rue entre deux voitures, et voici des oranges, des bananes.

Dans cette rue on vend un peu de tout.


Dans celle là, uniquement des planches de bois pour la construction.



Et dans celle-là, bizarrement des moitié de voitures.  De là à imaginer qu'avec l'avant d'une Renault et l'arrière d'une Peugeot on puisse faire un taxi typiquement égyptien, il n'y a qu'un pas.


Mais pourquoi, dans un pays où les filles sont brunes, aller coller dans la vitrine, ce manequin blond à l'air particulièrement stupide !

 





Les Jardins de Montazah




Au bout du bout de la Corniche d'Alexandrie, le palais d'été du khédive Abbas II ...


 une superbe pâtisserie italo-medievo-mauresque (!)


entourée d'un immense parc, lieu de promenade privilégié des Alexandrins ...


... et des amoureux !


 Avec vue sur la mer évidemment ! 

Sur les pas de Durrell


Pour les fans de Durrell, aller à Alexandrie c'est essayer de retrouver les traces de son roman dans la ville à défaut d'en retrouver l'ambiance. La quête est vaine, mais elle permet de se fixer un objectif pour visiter la ville.

Sur la place Saad Zaghloul, la statue de celui qui mena la première révolution égyptienne  (1919) et n'a cessé pas la suite, de lutter pour l'indépendance de son pays est toujours là. Haut perché sur son socle il a vraiment fière allure. Déporté à trois reprises par les Anglais, il n'a pas cédé pour autant, mais qui se souvient vraiment de lui ?



La façade de l'hôtel Cécil qui donne sur la place a été repeinte de neuf, et une fois franchie la porte à tambour, l'ascenseur qui mène au bar du premier étage est certainement le même qu'au temps de Durrell. Le Club France-Egypte donnait une soirée dans les salons de l'hôtel, soirée précédée d'une conférence sur le thème de l'avenir financier de l'Egypte par un éminent professeur de l'Université du Caire. J'aurais sans doute bien fait d'assister à cette conférence car l'avenir économique de l'Egypte en l'absence totale de touristes paraît bien sombre; le tourisme en effet constitue sa première ressource en devises.

  
Les très belles boiseries orientales de la pâtisserie Trianon située à quelques pas de la place, sont certainement les mêmes qu'au temps de Durrell. La vitrine de l'entrée présente un assortiment de gâteaux et confiseries irrésistibles et d'ailleurs je n'ai pas résisté. 


 L'endroit est calme, animé juste ce qu'il faut pour ne pas s'y ennuyer, le café est délicieux et les pâtisseries finalement plus légères qu'elles n'en ont l'air. Elles ont surtout un petit goût de l'Alexandrie d'autrefois. 

Une illusion  passagère, une réminiscence très localisée car l'Alexandrie de Durrell n'existe plus depuis longtemps et il est vain de s'obstiner à en retrouver le parfum. A moins d'avoir, comme moi, le goût des belles ruines. 




Sinon, pour vous consoler,  il vous faudra vous plonger (ou replonger) dans la lecture du Quatuor d'Alexandrie.


25 février 2014

Bibliotheca Alexandrina

Je ne pouvais imaginer me rendre en Egypte sans passer par la case "bibliothèque  qui était sous le règne des Ptolémées, le lieu de confluence des cultures grecques et moyen-orientales, un foyer où s'interpellent philosophes et mathématiciens, astronomes et géographes. Où les lettres répondent au sciences, où les artistes sont bienvenus.  Le "Museion" tel que je l'imagine devait être un lieu d'échanges intellectuels permanents et vivifiants. 4000 volumes, 7000 peut-être, tout le savoir d'une époque parti en fumée.  En l'absence  de preuves, les historiens en sont réduits à multiplier les hypothèses sur la destruction de cette bibliothèque; je ne me risquerai donc ni à trancher, ni a ajouter la mienne.
Mais je me souviens qu'Hypathia, mathématicienne et philosophe a été lapidée par une meute de fanatiques dont les moines chrétiens avaient attisé la colère.

Rien que pour le souvenir d'Hypathia je me devais, si j'allais en Egypte, de m'arrêter à Alexandrie et visiter la nouvelle bibliothèque construite approximativement à l'emplacement de l'ancienne.

Le projet, tel qu'il est exposé sur le site même de la Bibliotheca Alexandrina est extrêmement  ambitieux :
Elle est destinée à être un centre d’excellence pour la production et la diffusion du savoir ainsi qu’un lieu de dialogue et d’échanges entre les peuples et les cultures.
Elle se veut :

  • Une fenêtre du monde sur l’Egypte.
  • Une fenêtre de l’Egypte sur le monde.
  • Une institution pionnière pour relever les défis de l’ère numérique et avant tout.
  • Un centre de tolérance, de dialogue entre les peuples et les civilisations.


 et les moyens à sa disposition sont à la hauteur de ces ambitions : une bibliothèque générale, 6 bibliothèques spécialisées, 4 musées, un planétarium, des expositions permanentes, des centres de recherche...

Mais le plus important, dans une biblioothèque n'est-ce pas de s'y sentir bien ?
D'abord trouver sa place... juste un fauteuil et un bureau ou m'installer devant un ordinateur ? Ou bien réserver un de ces petits cabinets de lecture perso pour s'isoler du monde avec ses livres ?



Choisir ma "terrasse"  plutôt vers le ciel ou plutôt vers la mer ?




Partir ensuite explorer les rayonnages, au hasard ou de façon systématique ? références  bibliographiques ou le nez en l'air ?  Le fond est constitué en trois langues, arabe, français, anglais.  


Certains rayonnages sont encore un peu vides et la bibliothèque n'a pas encore atteint les 5 ou 8  millions d'ouvrages prévus. 
Mais elle n'a été  inaugurée qu'en 2002 et il faut du temps pour constituer un fond.  La Bibliothèque Nationale de France lui a offert 500000 ouvrages en 2010. Un début.

Viendra un jour où les rayonnages seront pleins... Peut-être  ...car le savoir numérisé n'a pas besoin de tant de place.





Mais en attendant, on peut déjà s'asseoir, ouvrir sa tablette rejoindre le wifi pour communiquer avec ses amis.

On peut surtout s'asseoir et regarder, se dire que les parois de ce côté là ont la couleur de l'eau.

Qu'en levant la tête on aperçoit les palmiers dont le vent secoue les branches, alors que les piliers qui soutiennent le toit ressemblent eux-même à des palmiers.

Pus bas c'est carrément la mer qu'on aperçoit puisque les derniers étages sont en-dessous du niveau de la mer.




Cette bibliothèque est tout simplement superbe et je m'y sens bien, très bien. J'aimerais pouvoir l'adopter, en faire mon QG, y donner rende-vous à mes amis du monde entier. Je la quitte à regrets.

24 février 2014

Alexandrie

Alexandrie, le nom à lui seul fait rêver et il est temps d'aller confronter cette ville imaginaire que nous avons tous dans la tête, avec la réalité.

Du phare je savais qu'il avait été érigé au 3e siècle avant notre ère, sous les Ptolémées,  et qu'aux dire de ceux qui l'ont vu il était considéré comme la septième merveille du monde !.
Je veux bien le croire.
Mais je savais aussi que du phare tant vanté, il ne reste rien sur la terre puisque le vent et les vagues, les raz de marée et les tremblements de terre se sont chargés de le faire tomber et d'emmener rouler les blocs de pierre qui le soutenaient et les statues qui l'ornementaient sous la mer.
Sur terre il ne reste donc que ce bête panneau marquant son emplacement et encore, sous le mode hypothétique : "most likely".



Sous l'eau, il reste des blocs de pierre et des statues que Jean-Yves Empereur et ses équipes de plongeur ont répertoriés et parfois remontés. Peut-être un jour un musée sous-marin permettra  d'aller contempler ce que d'autres ont vu.
En attendant les pêcheurs qui se sont installés sur ces blocs de pierre savent-ils qu'il a peut-être été autrefois, un élément essentiel du phare....
Quand il ne reste rien, on ne peut qu'imaginer...




 Le fort Quaytbay que l'on aperçoit depuis la ville,  est devenu un lieu de promenade pour les Alexandrins. On y vient en famille, on mange des glaces, on s'y photographie. Le touriste est une denrée rare alors on le prend lui aussi en photo. Comme si à lui seul il annonçait le retour de la manne économique.


Il est vrai que que la pierre blonde est jolie et que les ouvertures dans la muraille font agréablement jouer la lumière. Au fond d'une encoignure on aperçoit la mer.  Un coupe d'amoureux profite de la relative solitude de l'endroit pour se photographier. Tout de noir vêtue, elle porte un tchador et un léger voile sur la figure.  Est-ce comme cela qu'il la photographiera ?
Non, au dernier moment elle lève son voile et sourit. Je fais semblant de ne rien voir et passe mon chemin, rassurée. 

Depuis la muraille du fort on aperçoit la ville, les bateaux et les minarets au loin. 


En regardant vers l'Ouest et en cherchant bien on aperçoit, le toit, en forme de circuit intégré, de  la Grande Bibliothèque Alexandrine. 




23 février 2014

Chérine


Au départ nous ne devions pas nous rencontrer.

J'aime les villes et je voulais me promener dans le Caire comme dans toutes les villes où je me suis promenée jusqu'à maintenant. Mais 10 jours avant notre départ, les attentats se sont multipliés dans la ville, dont celui qui a coûté au Musée Islamique, sa façade et le bris de quelques belles pièces de verre et de céramique. Ce Musée était hélas placé tout en haut de ma liste. Le lendemain une manifestation se terminait par une cinquantaine de morts. 
Notre voyage en Egypte devenait problématique. Mais je ne voulais renoncer ni au Caire, ni à Alexandrie, ni même à l'hôtel "de charme" au centre du Caire.


 Très "fifties" le Longchamps, mais effectivement beaucoup de charme. Et idéalement situé dans un quartier où l'on peut se déplacer à pied pour trouver une librairie, des restaurants, des bars, des galeries.

Nous avons donc convenu avec Sanae du  Comptoir d'Egypte que nous ne changerions rien à notre itinéraire,  mais serions accompagnés par une voiture avec chauffeur et un guide francophone.

J'ai en règle générale beaucoup de mal à écouter les guides, mais dès la première rencontre, Chérine a su se faire écouter. Des explications claires, exposées avec vivacité, des anecdotes racontées avec drôlerie. Dans un français parfait alors que je suis tout juste capable d'écorcher deux mots d'arabe !

Aussi compétente que charmante  Chérine a su dès les premières minutes m'intéresser à l'archéologie égyptienne (l'archéologie en général n'a jamais été ma tasse de thé), a su me donner les repères minimum pour que je me retrouve dans les différents empires, les périodes de décadence, Alexandre le Grand et la période hellenistique, la conquête arabe.... et ainsi de suite.
Très attentives à nos attentes, à nos réactions, elle a parfaitement réglé nos déplacements, pour qu'en dépit des aléas de la circulattion nous parvenions à voir en deux jours tout ce que nous voulions voir et apprendre. Car Chérine parle aussi bien des dynasties pharaoniques que de l'économie égyptienne contemporaine.
Je luis dois surtout de m'avoir gentiment forcé la main pour entrer dans les mastabas de Saqqarah, moi qui avais juré que j'étais bien trop claustrophobe pour entrer dans une tombe. Je suis encore tout éblouie de ce que j'y ai vu.
J'avais rencontré une guide, j'ai eu l'impression de quitter une amie et c'est pourquoi je voulais ici-même faire son éloge. En espérant qu'elle n'en rougira pas trop.

Si vous allez en Egypte, n'hésitez pas à contacter Chérine Teleb. Si elle est disponible, elle sera certainement contente de vous aider et de vous faire aimer son pays.





22 février 2014

Le Sphinx de Gizeh


Non je ne l'ai pas oublié. Mais avant de le saluer, j'ai essayé d'emprunter, un moment les yeux des premiers découvreurs, de ceux qui n'ont vu d'abord autour d'eux que du sable et des pierres.


De ceux qui ont d'abord pensé que cet empilement de blocs n'était justement qu'un empilement de blocs, tout juste bons à escalader...


 ... avant de s'apercevoir qu'il s'agissait en fait des traces d'une très ancienne civilisation. 


J'aurais voulu être de ceux-là. J'aurais voulu découvrir le Sphinx comme David Roberts l'a vu et dessiné dans ses Carnets de voyage en 1838 !

Pique-nique au pied des pyramides...

Un sandwich aux boulettes de "foul" pour la gastronomie.   Et pour le spectacle,  le passage des nuages et les jeux de lumière sur les pyramides. Heureux comme ... un pharaon ?

 



21 février 2014

Saqqarah

C'était la première ! La première pyramide, construite il y a plus de 3000 ans. La première aussi que nous avons visitée.

Elle ne paye pas franchement de mine, avec son échafaudage qui semble avoir été posé là il y a plus de quatre mille ans aussi !  Et puis c'est une pyramide à degré, "primitive" en quelque sorte,  et même pas creuse.
Autant dire qu'elle n'est pas souvent visitée. Et ce jour là, il n'y avait pratiquement personne, juste quelques chameliers, quelques muletiers qui auraient bien voulu nous faire monter sur leurs bêtes...


C''est peut être pour cela que je l'ai aimée. Parce qu'elle a l'air si seule au milieu du désert, si seule et abandonnée de tous. Pour la trouver on avait quitté les embouteillages du Caire, longé non pas le Nil mais un canal d'irrigation, traversé une palmeraie; autour de nous tout n'était que verdure et soudain, le choc :  plus rien que la pierre et le désert.  Sans transition.


Dans les lointains brumeux, toutes les collines ont la forme d'une pyramide. Mais comment font les palmiers pour pousser jusqu'au milieu des ruines ? 


Pour accéder à la pyrmide de Djoser - car c'est à ce premier pharaon qu'elle est attribuée - il faut franchir un sas étroit aux parois lustrées,


 et avancer entre deux rangées de colonnes qui pour primitives qu'elles soient n'en sont pas moins impressionnantes. Comment ces colonnes ont-elles été édifiées ? Les pierres transportées ? Les cannelures sculptées ? Ces aspects techniques m'importent moins que leur couleur, leur rondeur, leur douceur. L'oeil à défaut de la mains les caresse avec tendresse.


On connaît le nom de celui pour lequel a été édifiée cette pyramide. On connaît aussi le nom de celui qui en fut le concepteur : Imhotep !  Architecte génial, élevé au rang de vizir, médecin, initiateur du culte d'Osiris. Cet homme avait décidément beaucoup de talents et j'aimerais bien en savoir un peu plus sur lui... 

Le musée de Saqqarah porte effectivement son nom,  mais il rend surtout  hommage à Jean-Philippe Lauer,  l'égyptologue alsacien, ce qui paraît justifié car sans l'un comment aurions nous connu le travail de l'autre ? 




Une pyramide, un musée, soit ! Mais le plus beau et le plus émouvant à Saqqarah ce sont certainement les mastabas. ces monuments "funéraires" que les pharaons, mais également les nobles, les hauts dignitaires faisaient édifier de leur vivant pour préparer leur voyage vers l'au-delà.
J'ai bien failli ne pas entrer dans ces mastabas, tant je craignais l'atmosphère confinée. Mais non ! Des lucarnes permettent un éclairage zénital discret mais suffisant. Et une fois à l'intérieur ce n'est qu'émerveillement. Toutes les parois sont décorées de bas-reliefs d'une finesse et d'un poli extraordianaire, d'une précision inouIe; les scènes qui nous parlent le plus sont, c'est évident, les scènes de la vie quotidienne : navigation, à voile ou à rame, pêche, chasse, travaux agricoles ... les positions des oies, des boeufs sont parfaitement réalistes, leurs images  comme saisies sur le vif. Ces fresques autrefois peintes (il reste encore quelques traces) sont autant de livres ouverts sur la vie des Egyptiens du 3e millénaire avant notre ère ! Fascinant ! 

Comme il est interdit de photographier, il faudra vous contenter des images que vous pourrez glaner sur le net. 
Le site proposé par le ministère de la cuture est particuièrement bien fait. Un peu compliqué de naviguer dedans, mais cela vaut la peine d'essayer.

Pour les photos  des bas-reliefs, un autre site :