01 avril 2016

Printemps du livre 2016 : Judith Perrignon

Pourquoi tombe-t-on amoureux d'une ville ? Surtout d'une ville comme Detroit. C'est pourtant ce qui m'est arrivé lorsque je l'ai découverte en 2012.  

Et c'est ce qui est aussi arrivé à Judith Perrignon qui depuis son reportage sur Les Jardins de Detroit paru dans le n° 12 de la revue XXI, est retournée plusieurs fois dans la ville de la General Motors. 
Judith Perrignon est journaliste; elle connaît bien l'histoire de Detroit, elle connaît ses habitants et elle en parle avec passion, mais sans illusion. 

Detroit, comme sans doute Berlin ou Pekin sont des villes qui ont connu des bouleversements radicaux; la rapidité des changements donne une impression de bouillonnement, de folle vitalité, mais aussi de fragilité et c'est peut-être ce qui fascine autant. En moins d'un siècle Detroit a connu tous les extrêmes : extrême opulence du début du siècle, lente déchéance depuis les années 30 jusqu'au marasme total. Vidée de l'essentiel de sa population (plus de 50% des habitants de Detroit ont fui quand ils le pouvaient encore), couverte de dettes au point de devoir se déclarer en faillite, la ville résiste pourtant, en économie de survie pour un temps, avec un futur qu'elle s'efforce de réinventer. 
Detroit c'est une leçon d'histoire en accéléré où tout se carambole, l'économie, la sociologie, la culture... Detroit, c'est une ville, mais surtout des habitants, qui aiment leur ville et en sont fiers. 

"Ma ville en ruine et moi on se ressemble, on est deux vieilles mal en point, on suffoque en août et on grelotte en janvier, on a les mêmes souvenirs, les mêmes fantômes, la même nostalgie, on a cru trouver de l'or, connu la folie des grandeurs et des cadences infernales, ici Ford, General Motors et Chrysler ont dicté la taille du capot et des routes, ici a été calibré le rêve américain, ici la fièvre des modernes fomentait les cancers des maris, hommes-machines soudés à l'usine douze heures par jour et brisés lorsqu'ils rentraient chez eux, mais jamais nous ne l'avouerons, ma ville en ruine et moi, nous sommes trop fières. "

C'est ce que fait dire Judith Perrignon à Mary Lee, l'un de ses personnages de son roman LES FAIBLES ET LES FORTS, un roman qui pour l'essentiel se passe en Louisiane et raconte le racisme et la difficulté des Noirs à se faire une place dans la société blanche. 
Un joli roman choral, qui montre que si elle  est effacée dans les lois, la ségrégation ne l'est pas encore tout à fait dans les têtes.


 Judith Perrignon est présente au Printemps du livre, aujourd'hui et demain encore.
Son dernier livre : Victor Hugo vient de mourir (que je n'ai pas encore lu).




Aucun commentaire: