27 février 2017

The Fits

Anna Rose Holmer. Royalty Hightower. Deux noms à retenir !

La première, Anna Rose Holmer est la réalisatrice, une jeune femme de 30 ans tout juste. Fits est son premier film.

La seconde, Royalty Hightower est une petite fille, une pré-ado dont on suit le parcours entre entraînement de boxe sous l'égide de son grand frère, côté garçons et découverte du hip hop et des ambiguïtés de l'adolescence, côté filles. Fits c'est l'histoire de ce glissement d'un monde à l'autre. Garçon manqué au début du film, Toni découvre peu à peu les codes de la féminité, tels qu'ils sont pratiqués dans sa banlieue : tatouages, oreilles percées, costumes clinquants ... codes superficielles dont elle se défait rapidement : la vrai féminité s'accommode aussi bien d'un sweat à capuche.

La grande réussite du film tient en grande partie au choix de cette gamine au regard perçant et à la mine boudeuse. Mais il tient également au choix de la réalisatrice de faire parler les images et de limiter le dialogue au minimum. Ce qui m'a toujours semblé le propre du cinéma. Quand il devient trop bavard, quand il se met à pencher du côté du théâtre ou de la littérature, il oublie que le cinéma est d'abord images en mouvement, car l'image peut tout dire ou plutôt suggérer.




Ainsi certains, dans le film d'Anna Rose Holmer verront non pas la marche d'une petite fille vers la "féminitude" (*), mais simplement le désir d'échapper à la solitude pour faire partie d'un ensemble et le lent cheminement vers l'intégration qui exige que soient assimilés les codes de fonctionnement du groupe. Lecture féministe ou lecture sociale, voire politique ne sont pas incompatibles et c'est ce qui fait à mes yeux la richesse du film.

 (*) Il existe trois états de femme possible. Le terme femme renvoie avant tout à une réalité biologique et anatomique, la féminité correspond à l'accentuation des caractères dans un rapport de différenciation par rapport à l'homme, aussi bien au plan psychologique que du comportement. La féminitude enfin, c'est le passage du stade de la femelle-femme à celui de l'individu-femme, de l'être pensant et agissant. (Malek Chebel, La Femme marocaine tire son épingle du jeu, 1997)


24 février 2017

L'Empereur




 Comment ne pas se laisser séduire par ces étranges palmipèdes ? 


 
 Comment ne pas se laisser séduire par ces paysages glacés, vertigineux de blancheur, dont les lointains bleutés se confondent avec le ciel.



Comment ne pas fondre de tendresse devant ces petites boules de poils, si fragiles, et pourtant si tenaces. 


Comment ne pas s'interroger sur la façon dont ces oiseaux se reproduisent, s'organisent pour s'alimenter et se protéger des blizzards,  et surtout se déplacent d'un bout à l'autre de la banquise, sans cartes et sans GPS ? 
A moins qu'ils n'aient un GPS intégré...



23 février 2017

L'histoire officielle




L'image même du bonheur ! Une famille tout sourire, une famille heureuse !  Oui mais....

La photo ne dit pas que l'enfant est l'un de ces nombreux enfants "disparus" pendant la dictature argentine, et adopté par un couple en mal d'enfant. La photo ne dit pas non plus que la mère ne s'est jamais soucié de connaître les conditions de l'adoption et que le père ne doit sa réussite sociale (et sa prétendue paternité) qu'à sa "collaboration" avec la régime.

L'intérêt du film  de Luis Penzo ne tient pas à sa facture, excessivement classique et même un peu datée (le film est sorti en 1985); ne tient pas non plus à la révélation des faits car il y a longtemps que les "folles de la place de Mai" ont fait savoir au monde entier qu'elles continueraient, leur vie durant, à rechercher la trace de leurs enfants et petits-enfants "disparus"; non l'intérêt du film tient au fait que c'est la mère, incarnation à la fois de la bourgeoisie et de l'autoritarisme en matière d'éducation, qui découvre peu à peu que l'histoire officielle, celle-la même qu'elle enseigne n'est pas la bonne. Et que la véritable histoire est infiniment plus tragique, mais elle aura au moins le courage d'aller jusqu'au bout de ses recherches, dût-il lui en coûter.

Le Concours


Concours de la Femis : terrible exemple de cet élitisme à la française où tout finalement se joue sur l'entretien, le "grand oral" c'est à dire la relation - toujours trop brève - entre un candidat, bien trop conscient des enjeux pour être simplement lui-même  - et trois membres de la la profession dont les critères d'appréciation sont, en fin de compte, terriblement subjectifs, car il n'est pas facile de prendre la mesure d'un individu à l'orée de sa vie, de comprendre son parcours, ses attentes, de deviner son potentiel. Surtout quand il s'agit d'un domaine créatif comme le cinéma.
Claire Simon consacre la plus grande partie de son film à cet exercice difficile, à la fois stressant pour les uns  et lassant pour les autres, mais peut-être faussé par la présence de la caméra. Les entretiens sont apparemment publics, mais les délibérations ne le sont certainement pas. D'où une certaine gène à voir le profil des candidats ainsi discuté à l'écran.




20 février 2017

Jackie

Hélas, je n'ai pas plus aimé Jackie que Neruda ! Cela doit avoir quelque chose à voir avec les biopics ! Ou avec Pablo Larrain.

Les reconstitutions historiques me paraissent toujours difficiles à réaliser parce que les décors, les costumes, les maquillages occupent nécessairement une place importante, proportionnelle au degré d'authenticité que le réalisateur veut atteindre. Et lorsqu'il s'agit d'un événement comme l'assassinat de JFK dont tout le monde a vu et revu les images, dont tout le monde connaît, à la minute près, le déroulement, c'est une gageure difficile.
Or Pablo Larrain, si j'en crois les 3 films que j'ai vus (No, Neruda, Jackie) semble surtout préoccupé par la distortion entre les faits tels qu'ils se sont déroulés et la façon dont ils ont été interprétés, entre la réalité et la légende ou le mythe. Dans le cas de Jackie Kennedy, le mythe préexistait à la tragédie et surtout le mythe avait déjà été passablement esquinté par le fil des ans.
En dépit de mes réserves, je crois malgré tout qu'il n'est pas inintéressant de voir un cinéaste creuser, de film en film, le même sillon.


19 février 2017

La sociale



Un peu trop démonstratif ce documentaire sur la sécurité sociale ?  Un peu maladroit à force de vouloir bien faire ? Mais quelle belle cause à défendre !
Que ceux qui récriminent contre les imperfections de la Sécu - et il y en a ! - que ceux qui se plaignent que notre système de protection sociale coûte trop cher, qu'ils aillent voir ce film pour mesurer l'écart entre avant et après 1947. Ou qu'ils aillent voir du côté des Etats-Unis pour mieux apprécier ce qu'Ambroise Croizat, Pierre Laroque et leurs collègues sont parvenus à mettre au point : un système de protection qui permet à chacun de se soucier de sa santé avant de se préoccuper de ce que cela lui coûtera. Même si 70 ans plus tard il y a sans doute un certain nombre de corrections et d'améliorations à faire.

18 février 2017

Norte Grande

Deux panoramiques pour se faire une petite idée de l'exposition présentée jusqu'à la fin du mois au troisième étage de chez Arthaud à Grenoble : des photos en noir et blanc, d'autres en couleurs sur le Nord du Chili, sur cette région si particulière où étaient autrefois exploitées des mines de salpêtre, désormais abandonnées; le désert a conservé les bâtiments, les structures métalliques, les machines... en même temps que le souvenir de ceux qui y ont vécu et travaillé  !
Le nom du photographe : Bernard Lazareff.


Evidemment,  sur les panoramiques, on aperçoit les photos, mais on ne les voit pas.  Il faudra donc vous déplacer ! ;-))


12 février 2017

Lumière : le début d'une aventure

Je fais encore partie de ces gens qui vont voir un documentaire à reculons : sans doute instructif  mais un peu barbant....  Et bien j'ai tort. En particulier lorsqu'il s'agit du film de Thierry Frémaux sur les débuts du cinéma.
Des frères Lumière, si bien nommés, je connaissais la sortie d'usine, l'arrivée du train en gare de Marseille et bien entendu l'arroseur arrosé. 


Mais c'était ne rien connaître. La sélection de films - jamais plus de 50 secondes - imputable je suppose à Thierry Frémaux est époustouflante, le montage remarquable puisqu'il souligne à la fois la continuité et la diversité de ces premiers essais cinématographiques. On s'étonne de la qualité de la restauration de l'image, de la pertinence du commentaire, avec l'impression d'assister à une leçon magistrale mais jamais ennuyeuse sur la lecture de l'image.
Au final un film aussi drôle qu'intelligent  ! Et je ne suis pas près d'oublier le ballet des chasseurs alpins - en uniforme mais sans leur arme -  : une succession de mouvements qui tient de la chorégraphie plus que de l'entraînement militaire.

09 février 2017

Yourself and yours

De l'intérêt de lire les critiques ....

"Quel ennui, mise en scène plate, personnages inintéressants."

Inintéressants peut-être pas, mais si différents de nous, puisque coréens, étrangers donc mais surtout étranges. Trop étranges pour que le film fonctionne sur l'empathie.

"Assurément, elle boit trop. Et lui ne peut pas se passer d'elle. Deux addictions dans un quartier tout à fait pittoresque de Séoul. C'est à peu près la trame de ce "Yourself and Yours" très discursif, et vaguement cinématographique."

Pittoresque soit puisque l'on va de bar en bar. Discursif ? Certainement  ! Car tout le mode parle, parle, parle... déambule, retrouve d'autres interlocuteurs et parle parle parle... déambule, parle, parle, parle... sans fin !

"Aussi romanesque et drôle que sensoriellement hypnotique, Yourself and Yours ressemble davantage à une sorte de monstre hybride entre Woody Allen et Apichatpong Weerasethakul."

Hypnotique ? Soporifique plutôt ! Et dans les références sentencieuses, manque Eric Rohmer.

Voilà en tout cas un film dont j'aurais pu me passer (si j'avais lu les crtiques ... avant ! ) 



08 février 2017

Corniche Kennedy

Plus modeste peut-être que Moonlight mais travaillant au fond sur les mêmes thèmes celui du déterminisme social, le film de Dominique Cabrera n'est pas inintéressant.
L'histoire de Suzanne dont le coeur et le corps balancent entre Marco et Medhi n'est pas sans rappeler - un peu - celle de Jules et Jim. Et c'est peut-être ce qu'il y a de plus juste dans le film. Parce que l'essentiel passe alors par les regards plus que par les mots.
Le jeu entre les classes sociales manque en revanche de subtilité, les marqueurs sociaux - bien qu'en partie abolis par la nudité des corps puisque jeunes gens et jeunes filles sont la plupart du temps en maillots  - sont un peu trop appuyés; à chacun son habitat, son langage, ses références musicales ... Ces jeunes gens venus des quartiers pauvres de Marseille pour plonger du haut de la Corniche, représentent sans doute la liberté aux yeux de la jeune bourgeoise, mais le film s'attache à montrer combien cette liberté est illusoire. Et c'est sans doute la partie la plus faible du film : autant la réalisatrice filme superbement la lumière, les corps dans l'eau,  le côté solaire de l'histoire, autant le film devient pesant dès qu'il s'agit de mettre en scène l'intrigue policière et la part d'ombre des personnages. Dommage.


07 février 2017

Moonlight

De la pièce de théâtre adaptée au cinéma par Barry Jenkins, je ne sais ce qu'il reste, mais je peux parier sans trop de risques sur la structure en trois actes et la justesse des dialogues. Cependant  Moonlight  n'a rien à voir avec du théâtre filmé : Moonlight est avant tout un film, et un bon film.

Grandir dans un ghetto noir,  grandir sans père mais avec une mère accro au crack, grandir entouré de delaers et de malfrats, se faire pourchasser et tabasser par les garçons de sa classe, se sentir différent mais sans savoir pourquoi ... le premier acte déroule les fils que le film va continuer de tirer au fur et à mesure que l'enfant devient adolescent puis adulte.

La trame de Moonlight est connue, c'est celle du roman de formation. Il suffit de suivre la progression d'un personnage de l'enfance à l'adolescence et de montrer son évolution en fonction des rencontres qu'il est amené à faire. En s'intéressant à Chiron, un enfant noir dans une banlieue pauvre de Miami, en faisant de lui un individu qui s'interroge sur son identité autant que sur sa sexualité, le réalisateur se lance dans un exercice difficile, celui  qui consiste à utiliser tous les clichés sur le milieu  (détails vestimentaires, langage, attitudes) sans pour autant les caricaturer mais en montrant que la réalité est plus complexe que les apparences ne le laissent entendre.


D'une façon plus générale, le film propose une réflexion sur le conditionnement d'un être par le milieu. Ces gamins de Miami ne sont ni plus ni moins conditionnés que les adolescents qui vivent dans les quartiers chics de Paris, préparent leur bac à Henri IV ou Louis Le Grand avant d'intégrer Sciences po ou HEC .  Quelle est la part du choix, quelle est la part du déterminisme social ? Comment un individu lambda peut-il résister au laminage de son milieu ?  Porter une chemisette à carreaux, alors que le sweat à capuche, la casquette de travers, le collier en or et les dreadlocks imposent leur loi.
Moonlight est un excellent film parce que rien n'est dit mais tout est suggéré, parce que Barry Jenkins utilise les images autant que les mots pour laisser le spectateur libre de son interprétation.

06 février 2017

La La Land

C'était certainement audacieux de la part de Damien Chazelle de vouloir renouer avec la comédie musicale. Mais son film du souffre d'un excès de références et du coup, de la comparaison avec les classiques du genre à commencer par Chantons sous la pluie ou même Les Parapluies de Cherbourg qu'il aime citer dans ses interviews.
Emma Stone et Ryan Gosling ne s'en sortent pas trop mal il est vrai (malgré, à mon goût,  l'excès d'expressivité de la première et le manque d'expressivité du second), mais les chorégraphies sont tellement calquées sur celles de Fred Astaire que la comparaison  - inévitable - joue en leur défaveur. 
L'idée d'ouvrir le film sur une autoroute embouteillée de Los Angeles était excellente, mais je n'ai pas pu m'empêcher d'imaginer qu'un cinéaste de Bollywood aurait fait de la séquence.


Bien que déçue par ce qui fait l'essentiel d'une comédie musicale, la musique et la danse, je reconnais les efforts du cinéaste pour montrer la difficulté de faire un choix entre ses rêves et la réalité et l'impossibilité de concilier l'un et l'autre. D'où la tonalité douce amère du film. Son principal atout à mes yeux. 


04 février 2017

Méduses


En vrai, elles ont gâché plus d'une baignade. 
Mais à l'état d'objets, elles sont juste belles. 


Qu'elles soient couleurs de feu ou couleur d'eau.


03 février 2017

Pierrot Coquillages

A Marseille bien sûr !


355 av. du Prado 13008 Marseille

02 février 2017

Harmonium

Le film de Kôji Fukada est pour le moins étrange. Aussi étrange que le son de cet harmonium, dont s'acharne à jouer Hotaru, la fille de Toshio et Akie. Un couple, un enfant, une petite vie tranquille... Pas vraiment  !  Parce que, lorsque intervient le quatrième personnage, Asaka, un ancien ami de Toshio qui a fait 10 ans de prison pour meurtre, tout vole en éclat ... En effet, Asaka, ce personnage peu disert, toujours vêtu de blanc et "raide comme la justice " fait à la fois figure de tentateur, de justicier et sans doute d'ange exterminateur. 


Si le film paraît aussi étrange, et même troublant c'est qu'il semble creuser des thèmes très judéo-chrétiens comme le péché, le sentiment de culpabilité, le remords, la pénitence ...
Les intentions de ce jeune cinéaste sont certainement louables mais son film est un peu pesant. 

01 février 2017

Le Nouveau Colosse

J'emprunte au site du NPS (National Park Service) le texte du poème gravé sur le socle de la statue de la Liberté. 


The New Colossus

Not like the brazen giant of Greek fame,
With conquering limbs astride from land to land;
Here at our sea-washed, sunset gates shall stand
A mighty woman with a torch, whose flame
Is the imprisoned lightning, and her name
Mother of Exiles. From her beacon-hand
Glows world-wide welcome; her mild eyes command
The air-bridged harbor that twin cities frame.
"Keep ancient lands, your storied pomp!" cries she
With silent lips. "Give me your tired, your poor,
Your huddled masses yearning to breathe free,
The wretched refuse of your teeming shore.
Send these, the homeless, tempest-tost to me,
I lift my lamp beside the golden door!"
 Emma Lazarus

Et voici la traduction des derniers vers.

Envoyez-moi vos fatigués, vos pauvres,
Envoyez-moi vos cohortes qui aspirent à vivre libres,
Les rebuts de vos rivages surpeuplés
Envoyez-les moi, les déshérités, que la tempête m'apporte,
De ma lumière, j'éclaire la porte d'or !
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