Depuis que le film La Chambre de Mariana est sorti, on parle beaucoup de cet écrivain né en Roumanie, en 1932, rescapé des camps, réfugié en Israël depuis 1946 et considéré comme un écrivain majeur de la Shoah. Histoire d'une vie, paru en français en 2004 était plus classiquement autobiographique que La Ligne, écrit en 1991 et publié en français en mars de cette année. Mais si La Ligne emprunte un peu plus au genre romanesque, puisque le narrateur est un homme qui refait inlassablement depuis des années le même circuit en train à la poursuite de l'homme responsable de la mort de ses parents, les éléments biographiques sont toujours là, en arrière-plan. . Les paysages défilent; les gares, les pensions où le narrateur revient toujours, les gens qu'il retrouve régulièrement au rythme des ses voyages soulignent le côté obsessionnel d'une mémoire qui ne parvient à oublier ni la permanence de l'antisémitisme, ni le renoncement au communisme. La Ligne ressemble à un récit de voyage, mais un voyage en boucle; ressemble aussi à un polar, puisqu'il s'agit de retrouver un assassin; mais c'est plus encore un texte qui, sous des dehors romanesque, pousse à réfléchir sur ce que signifie être juif, dans un siècle qui après tant de pogroms a connu la Shoah.