Je mentionnais récemment trois (très bons) films noirs et pensais en avoir fini avec le noir.
Et bien non, en voici deux de plus.
Mais d'un noir un peu différent.
Dans No country for old men des frères Cohen, la noirceur frôle quasi l'abstraction.
En effet Aton Chigurth, le tueur solitaire représente le mal absolu. Celui que rien n'arrête. Croiser son regard c'est croiser sa mort. De son pas lent et mesuré il traverse l'écran et le coeur s'affole. Comme devait s'affoler le coeur des Grecs devant le caractère inéluctable du destin.
Il tue de sang-froid mais pourquoi ? Pour récupérer un magot ? Pour se venger de ceux qui lui ont subtilisé ce magot ? Pour le plaisir de tuer et de jouer le sort de ses victimes à pile ou face ? Je me souviens que dans l'Iliade, lorsqu' Athéna intervient auprès de Zeus pour lui demander d'intercéder en faveur de ses protégés, Zeus se contente de sortir sa petite balance pour voir de quel côté elle penche....la mort, la vie, la mort...
Il y a décidément quelque chose de métaphysique dans le film des frères Cohen.
Dans celui de Tim Burton, Sweeney Todd, le noir est moins métaphysique qu'esthétique. C'est un film en couleurs ... d'où toutes les couleurs sont bannies sauf le noir et le blanc. Et le rouge, bien sûr, comme le sang ! Je compte pour rien les quelques images suaves, souvenirs d'un bonheur depuis longtemps disparu. Bien qu' inspiré d'un roman, lui-même inspiré d'une histoire vraie, le film reflète avant tout l'univers fantasque et cauchemardesque de Tim Burton, un univers qui fait irrésistiblement penser aux Histoires extraordinaires d'Edgar Allan Poe. De quoi donner des frissons aux âmes sensibles vous en conviendrez ! Pourtant l'univers de Tim Burton est aussi un univers musical puisque tous les personnages s'expriment en chantant ! Mais je ne me risquerai pas pour autant à parler de "comédie" musicale .... à moins que .... on parle bien d'humour macabre !
J'avoue que tant de noirceur finit par lasser et je suis toute prête à aller voir la première niaiserie sentimentale qui me tombera sous la main.
Bien que, en vérité, ces deux derniers films m'aient paru moins désespérants que les précédents. Plus stylisés, il permettent au spectateur de garder ses distances, de ne pas se laisser happer par le désespoir parce qu'il y a, entre lui et la réalité l'espace de la fiction; l'attention portée à l'écriture cinématrographique le protège en quelque sorte. Un peu. Pas beaucoup.
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