06 juillet 2015

The Longest Road

La route la plus longue ! En partant du point le plus au Sud des Etats-Unis : Key West en Floride, pour arriver au point le plus au Nord : Dead Horse en Alaska. Depuis le golfe du Mexique, jusqu'à l'océan Artic  !  Le kilométrage est impressionnant - surtout en tenant compte des tours et détours - le temps passé sur la route tout autant, mais l'essentiel n'est pas dans les chiffres ni la performance. L'essentiel est dans l'esprit du voyage.

Pour Philip Caputo, journaliste et écrivain, il s'agit avant tout de s'interroger sur l'état de l'Amérique, un peu comme l'avait fait J. Steinbeck qui, en 1960, tentait de renouer avec un pays dont il s'était un temps éloigné. (Travels with Charley, in search of America)
50 ans plus tard, l'Amérique est secouée par une grave crise économique et traversée par des courants politiques antagonistes  qui font douter de sa capacité à rester unie.  L'écrivain entame son voyage avec l'intention de savoir ce qu'il en est vraiment. "But was the country really as fractured as it appeared in the media ? As bitter and venomous ? [...] I thought I'd ask people, when possible, the question I'd put to myself : what holds us together ? "

Et voilà pourquoi The Longest road est un livre tout à fait passionnant. C'est bien sûr un récit de voyage, une extraordinaire traversée de l'Amérique qui commence et finit sur des routes qui à elles seules constituent déjà une aventure : l'US 1, la route des Florida Keys est presque entièrement construite sur pilotis comme un gigantesque pont au-dessus d'une mer turquoise; la Dalton Highway empruntée par l'auteur pour terminer le voyage est à elle seule un mythe, celui de la route la plus dangereuse du monde, la plus isolée, la plus soumise à des conditions climatiques insensées, la plus fascinante aussi. Entre l'US 1 et la Dalton Highway il y a toutes les routes ordinaires,  routes à deux voies de préférence, empruntées par l'auteur au volant de sa Toyota Tundra qui tracte une Airstream de 1962.
Sa femme, Leslie est du voyage et leurs deux chiens.



Mais en dehors des descriptions des lieux traversés et des anecdotes propres à ce genre de récit, il y a le travail de journaliste accompli par Philip Caputo qui au fil de la route ne cesse de faire parler les gens qu'il rencontre et de leur poser sa "grande" question. "What holds us together ? " Qu'est-ce qui fait de nous une nation, un peuple uni ?
Les réponses sont bien entendu très variées,  en fonction des individus interrogés, des Américains très ordinaires, rencontrés dans les bars, les stations-service, les campings. Pas de statistique, pas de théories élaborées, juste un ressenti, une série d'instantanés livrés tels quels le plus souvent.

L'Amérique dont parle Caputo n'est ni celle de la côte Est, ni celle de la côte Ouest; ce n'est pas l'Amérique des intellectuels, ni celle des surdoués de l'informatique et des entreprises innovantes, pas non plus celle des banquiers et de leurs cohortes de traders. Non, juste l'Amérique ordinaire. Celle dont on ne parle pas dans les médias, mais à laquelle Caputo donne la parole. En restituant jusqu'à leur façon de parler et même leur accent !


Le thème du voyage, de la route est très présent dans la littérature américaine. D'ailleurs Philip Caputo se réfère fréquemment à ses prédécesseurs, Lewis et Clark en particulier, mais aussi bien Francis Parkman (La piste de l'Oregon), Kerouac, Steinbeck ... The Longest Road s'inscrit aisément dans cette lignée dont elle constitue le fleuron le plus récent. Un seul regret : le livre n'est pas encore traduit en français mais je serai contente d'être rapidement démentie.

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