09 juillet 2015

Kim Zupan, Les Arpenteurs


Encore une découverte des éditions Gallmeister qui depuis quelques années se sont fait connaître par l'excellence de leurs choix en matière de littérature américaine.

Les Arpenteurs est le premier roman de Kim Zupan, un roman qui frappe fort dès les premiers chapitres, lorsque sont mis en scène les deux protagonistes : Vals, jeune shérif consciencieux, désireux d'aider son prochain, et Gload, un vieil homme de 77 ans, redoutable tueur en série dénué apparemment de toute conscience morale.

L'ouverture du roman, franchement morbide peut rebuter, mais la force du romancier est de ne pas en rester là car au fur et à mesure que progresse le récit, on perçoit que les choses ne sont jamais aussi simples que l'on croit, et qu'un être humain, fût-il un personnage de roman, ne peut se réduire à quelques qualificatifs.
Vals a écopé des gardes de nuit dans le couloir de la prison où est enfermé le tueur. Insomniaque celui-ci est apparemment en mal de confidences ou simplement dans l'attente d'une écoute qu'il a enfin trouvée avec le jeune shérif. Comment se construisent puis se délitent les vies, tel est finalement le propos de l'écrivain qui choisit de confiner ses personnages dans l'obscurité nocturne et carcérale d'où ils s'échappent néanmoins en évoquant des vies antérieures, qui sont autant de pastorales lumineuses et justifient pleinement l'insertion du roman dans la série Nature Writing des éditions Gallmeister.  Néanmoins ...

Bien que Kim Zupan soit originaire du Montana et bien qu'il réside aujourd'hui à Missoula  (Montana) où il enseigne ... la menuiserie, je ne crois pas nécessaire de rattacher son roman à une soit-disant "école du Montana". C'est une étiquette commode dont abusent les critiques français mais qui ne semble pas vraiment faire sens aux Etats-Unis, une étiquette qui a surtout le tort de mettre dans le même panier tous les écrivains du moment qu'ils parlent de grands espaces, de chasse, de pêche, de sexe et de ... tradition (?). Kim Zupan situe effectivement son roman dans le Montana, mais les descriptions qui ponctuent le récit ont une véritable fonction dramatique, un peu comme un projecteur qui se concentre sur un personnage, et l'éclaire sous un autre angle; instants fugitifs mais révélateurs comme l'évocation du verger, le temps de l'enfance et de l'innocence perdue. Insomnies,  conversations à bâton rompu, longue remontées des souvenirs,  silences, un lien se crée peu à peu entre les deux personnages que leurs choix de vie pourtant oppose. Mais ont-ils jamais eu vraiment le choix ? Il y a dans le roman de Kim Zupan quelque chose peut-être qui rappelle la tragédie grecque;

Il serait vraiment dommage de ne voir dans Les Arpenteurs  qu'un roman noir de plus, qu'un titre de plus à ajouter à la littérature des grands espaces. Il est tout cela, mais avec un quelque chose en plus qui en fait tout l'intérêt.

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