Ce doit être le Stetson sur la tête de Joachim Phoenix qui pousse les critiques à parler de western. Mais non, Eddington n'est pas un western, pas vraiment un polar non plus, juste un film d'un genre pas très défini, qui fait le tour de tous les problèmes qui menacent la démocratie américaine. Cela commence par des disputes à propos du port du masque et des vaccins, complotistes et illuminés à l'affut, cela continue avec le racisme endémique, mais de plus en plus insupportable, les manifestations et l'éveil à la conscience politique des "blancs privilégiés", les droits tribaux constamment bafoués, les violences sexuelles et pour aggraver le tout, l'omniprésence des téléphones qui permettent à chacun de poster n'importe quoi - mais toujours hors contexte - sur les réseaux sociaux... l'énumération n'en finit pas, mais se résume en deux mots "fanatisme" et surtout "bêtise". Voilà pourquoi le film joue en permanence sur l'excès, le manque de retenue, tourne parfois au grand guignol et se termine dans une apothéose de violence.
Je n'ai vu aucun des précédents films de Ari Aster, connu pour jouer sur l'horreur et le fantastique. Mais ce qu'il donne à voir de l'état de l'Amérique m'a paru terriblement réaliste, d'autant qu'il le situe non pas dans une des villes comme Los Angeles ou Chicago régulièrement traversées par des accès de violence, mais dans une petite ville, certes imaginaire, du Nouveau Mexique. Une petite ville tranquille où d'habitude il ne se passe rien. Mais là, d'un seul coup, tout dérape et il n'y a pas de retour en arrière possible. Le cauchemar des années à venir ? Pour Eddington, Ari Aster a peut-être renoncé au fantastique mais certainement pas à l'horreur : celle d'une société totalement chaotique, sans repères communs, où chacun est persuadé de tenir la vérité et s'enferme dans une bulle paranoïaque, où plus personne n'essaye de comprendre personne et finit par croire que seules les armes résoudront le problème. "Stop the world, I want to get out... " Mais ouf, ce n'est que du cinéma n'est -ce pas ? Ou bien ....