27 octobre 2013

Chris Marker

Sacré bonhomme, ce Chris Marker !
Et quel plaisir de revoir, sur grand écran, La Jetée.
Mais aussi de découvrir d'autres films tout aussi étonnants. Comme Dimanche à Pékin, un documentaire d'une vingtaine de minutes sorti en 1956, qui permet de mesurer l'écart entre l'enthousiasme et les illusions qu'avait fait naître la grande révolution maoïste et la situation actuelle de la Chine telle qu'elle est montrée par Jia Zhang Ke dans A Touch of Sin.

http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-chrismarker/

Le Pékin de Marker est un Pékin en rouge et bleu, un Pekin ensoleillé et souriant. Un instantané triomphant trop vite démenti par l'histoire. Mais il est bon que le cinéma garde le souvenir de ce moment, aussi trompeur qu'il ait été.

D'autres films de Marker sont annoncés pour les semaines à venir dans mon cinéma préféré et il n'est pas question que j'en manque un seul.

25 octobre 2013

Chiennes de vie

Je n'avais pas encore "digéré" le film de Jia Zhang Ke que je suis tombée sur un livre aussi noir que le film. Etrange, mais fructueuse coïncidence.

Chiennes de vie, sous titré Chroniques du Sud de l'Indiana est le premier ouvrage traduit en France d'un jeune romancier américain, Frank Bill. Les dix-sept nouvelles qui composent le recueil ont en commun non seulement un lieu, le Sud de l'Indiana, mais une population de petits Blancs pauvres passablement cabossés par la vie : des vétérans qui n'ont jamais oublié ce qu'ils ont vu ou fait en Corée ou au Vietnam, des filles abandonnées avec un enfant sur les bras, des fermiers fatigués de se battre contre les éléments. Ce sont les laissés pour compte de l'Amérique, ravagés par l'alcool et la drogue autant que par la misère. Dans cette région de chasse, ils sont tous habitués au maniement des armes depuis l'enfance. La violence, pourrait-on dire est leur élément naturel. Avec de pareils ingrédients, difficile d'imaginer la vie comme un long fleuve tranquille. Lire les nouvelles de Frank Bill, c'est comme boire un alccol qui frôle les 90° ! Et pourtant je les ai lues !  J'ai lu l'histoire de ce grand-père qui vend sa petite fille de 13 ans à un souteneur pour acheter des médicaments pour le cancer de sa femme, ou ... de la gnole pour sa propre consommation  Et l'histoire de cet ancien du Vietnam dont rien ne vient calmer les pulsions meurtrières.

Le recueil une fois refermé, la question se pose de la nécessité d'une telle littérature. Qu'est-ce qui pousse un jeune écrivain à écrire des histoires aussi sordides ? Et qu'est-ce que leur lecture apporte à un lecteur ?

Il y a peut-être dans la production éditoriale américaine des effets de surenchère; pour être publié, pour se faire remarquer, il faut aller toujours plus loin, taper toujours plus fort. C'est possible. Et le soupçon de complaisance, n'est jamais bien loin.  Mais ce qui malgré tout m'intéresse dans ces nouvelles comme dans le film de Jia Zhang Ke chroniqué hier, c'est la part de réalité que ces fictions révèlent. Oui il existe une Amérique pauvre, violente, comme il existe une Chine miséreuse, et brutale. Et il est bon de savoir que certains écrivains, certains cinéastes ont choisi de s'intéresser, comme avant eux Gorki ou Zola,  à la part la plus fangeuse de la société. Au lecteur de se demander comment des systèmes politiques, économique et culturels très opposés aboutissent en fait au même résultat. Peut-on continuer à fermer les yeux et ne pas voir ces rebuts de l'humanité ?  Peut-on ne pas chercher à comprendre le pourquoi et le comment ? Le constat, la prise de conscience ne font pas la solution. Mais il me plaît que ce soit la littérature et le cinéma qui se chargent de réveiller notre vigilance.

Néanmoins, après tant de noirceur littéraire et cinématographique, je ne serai pas fâchée de trouver un roman ou un film un peu plus ... un peu moins ... bref, aussi intelligent mais pas tout à fait aussi sombre. 
Parce que les alcools forts, ça finit quand même par soûler !




24 octobre 2013

A Touch of Sin


Pour avoir déjà vu un certain nombre de films chinois contemporains dont le récent People mountain, people sea et, en particulier,  plusieurs films de Jia Zhang Ke  (Still life), je savais à peu près à quoi m'attendre en allant voir A Touch of Sin : du noir, très noir !  Et c'est effectivement ce que j'ai trouvé. En pire !

A Touch of Sin s'apparente beaucoup plus au film documentaire qu'au film de fiction; c'est un film qui, en quatre volets, fait le point sur l'évolution de la Chine depuis qu'elle a renoncé à l'idéologie communiste pour entrer dans l'ère du capitalisme sauvage.
Sauvage, tout est dit. Tous les personnages du film se comportent effectivement comme des sauvages : ils exploitent, ils tuent, ils violent sans scrupule ni remords, malgré ce que le titre du film peut laisser croire.  Le premier épisode met en scène un ouvrier exaspéré par la corruption et l'exploitation des "migrants", ces travailleurs sans droit. Il réclame justice au nom des idéaux qui ont été autrefois ceux de son pays (l'égalité, le partage des richesses etc... ). Exaspéré de se heurter sans cesse  à des fins de non recevoir quand ce ne sont pas des manoeuvres d'intimidation et des coups, il attrape son fusil et bannière tigrée au poing se charge de rétablir la justice en tuant tous les pourris.
Les épisodes suivants sont tout aussi sanglants; seules changent les motivations (et les circonstances bien sûr!) Tous présentent la violence et le crime comme seules alternatives possibles à l'état de déliquescence morale du pays. Et le cinéaste ne fait rien pour édulcorer son propos ni ses images. Son art n'est pas celui de la litote.  On sort du cinéma avec des éclaboussure de sang sur le visage et sans aucune envie de retourner immédiatement en Chine.


L'effet de sidération passé, reste à s'interroger sur le sens à donner à cette débauche de violence. Car le propos du cinéaste est politique : il ne montre pas la Chine de la croissance à 2 chiffres,  celle des nouveaux milliardaires, des immeubles pharaoniques et des voitures de luxe. Il montre l'autre Chine, la plus misérable, celle qui ne cherche même plus à vivre, juste à survivre.
Le titre du film - si du moins sa traduction est correcte - se réfère peut-être, comme je l'ai lu à un film de sabre sorti en 1969, A Touch of Zen mais, à mon avis  il se réfère plus directement au sens du bien et du mal, car si commettre un meurtre c'est commettre un "péché", acculer quelqu'un au meurtre ou au suicide n'est-ce pas aussi un "péché" ?  Et tant pis pour la terminologie judeo-chrétienne !

23 octobre 2013

Les marges d'un livre


Il y a deux sortes de livres : ceux que j'achète (ou que l'on m'offre ), qui vont ensuite rejoindre leurs semblables sur les étagères des bibliothèques qui ont peu à peu envahi toutes les pièces de la maison.
Ce sont les miens et j'en fais ce que je veux. 

Et puis il y a ceux que j'emprunte aux bibliothèques de la ville. Encore plus nombreux peut-être, mais ils ne m'appartiennent pas et ne résident que de façon très provisoire à la maison. Ils ne font hélas que passer !

Sans les livres des bibliothèques, j'irai certainement à la ruine.

Mais il n'y a rien qui m'énerve plus que d'ouvrir un livre et de le trouver annoté, souligné, commenté.  C'est peut-être une façon de s'approprier un livre mais c'est surtout une façon de gâcher définitivement ma lecture. Car, malgré mes efforts, mes yeux tombent sur le petit zigouilli dans la marge et je ne peux m'empêcher de m'interroger sur cette trace  : le précédent lecteur signifiait-il son approbation ou au contraire son mécontentement ? était-il interloqué ? transporté ? exaspéré ?

Furieuse en tout cas je le suis de ces interférences avec ma lecture. Car au lieu de m'intéresser aux seuls personnages du roman et de les laisser imprimer leur marque en moi, je m'intéresse à celui ou celle qui a lu le livre avant moi.

Laisser ses traces dans les marges des livres, n'est pas une manifestation d'intelligence, mais d'égoïsme et d'indifférence à autrui ! Moi d'abord et les autres je m'en fous !

Les livres de bibliothèques appartiennent à tous et un lecteur digne de ce nom ne devrait pas avoir besoin de marquer son territoire comme le font les chats ou les chiens.

17 octobre 2013

Julie Otsuka


 Certaines n’avaient jamais vu la mer.

C’est un roman dont on a beaucoup parlé l’an passé, et qui vient de sortir en poche. Il est donc grand temps de le lire d’autant qu’il fait à peine plus d’une centaine de pages, mesure idéale pour qui déteste les gros et lourds romans.

Le sujet du roman ? L’immigration japonaise aux Etats-Unis, ou plutôt l’histoire de ces centaines de jeunes japonaises qui sont parties en Amérique pour y épouser un homme dont elles n’avaient jamais vu qu’un vague portrait. Mariages arrangés comme il était d’usage au début du XXe siècle.  Ce que Julie Otsuka raconte au delà de la rencontre avec un homme et le début d’une vie de couple, c’est la découverte d’un pays étranger et les conditions de vie des immigrants engagés le plus souvent comme journaliers pour des travaux pénibles et mal payés, la pauvreté, la difficulté à se faire à d’autres moeurs, d’autres coutumes.
Au lieu de se concentrer sur un seul personnage emblématique l’auteur a choisi au contraire de raconter simultanément des centaines de vies anonymes, mais toujours du point de vue de ces femmes. Le procédé est original et très efficace pour rendre compte du désarroi et du courage de ces jeunes japonaises qui vont subir les conséquences de la crise de 29 et, après Pearl Harbour, l’internement d’office  et la déportation. Ecrit comme un roman, ce livre est en fait un émouvant témoignage sur des faits dont l’Amérique ne s’enorgueillit pas.

14 octobre 2013

Lettre à Momo


Lettre à Momo est un délicieux film d'animation japonais, dont le personnage principal est une petite fille. On en conclut un peu vite qu'il s'agit d'un film pour enfants. En fait c'est un film sur un sujet très grave : le père de Momo est mort et sa maman a décidé de déménager et de retourner dans l'île où elle est née. Du jour au lendemain, Momo a perdu tous ses repères : sa mère travaille et la laisse seule, elle n'a pas d'amis, s'ennuie beaucoup; elle n'a que son chagrin et la lettre de son père, trouvée dans un tiroir,  une lettre qu'il a commencé mais n'a pas eu le temps de terminer.

Raconté comme cela, le film paraît tragique et déprimant. Mais il n'en est rien. Il est au contraire poétique et souvent drôle car Momo reçoit l'aide d'amis imaginaires, des esprits messagers venus d'ailleurs qui vont permettre à Momo de reprendre confiance en elle et d'embrasser à nouveau la vie.


Lettre à Momo est un film intelligent, qui illustre parfaitement la théorie de Bettelheim sur les contes de fée : chaque spectateur trouve dans le film l'histoire qui lui convient, en fonction de son âge, en fonction de son vécu.

10 octobre 2013

To be or not to be

Pas d'accord ! Aussi intelligente et savante que soit la présentation du film de Lubitsch que j'ai entendue ce matin, je ne peux pas vraiment être d'accord. Mettre en valeur les figures de style, la mise en scène, s'intéresser avant tout à l'aspect formel d'une oeuvre au point de tenir pour secondaire son sens et les valeurs qu'elle incarne me paraît toujours dangereux.

To be or not to be ne serait pas véritablement un film de propagande ...
To be or not to be EST un film de propagande, dans la mesure où il indique, de façon évidente,  où est le bien, où est le mal. Et ceci dès les premiers plans. Pour dater et situer géographiquement le film, Lubitsch montre, en ouverture, des panneaux accrochés au-dessus des magasins qui portent des noms bien polonais. Quelques scènes plus tard, les mêmes panneaux sont cassés en deux, brûlés, la ville est en ruine : les "méchants" sont clairement désignés !  Septembre 1939. Les Allemands ont envahi la Pologne

Lubitsch ne s'en prendrait pas véritablement à l'idéologie nazie mais plutôt à l'aspect mécanique du système .... mais n'est-ce pas justement là le problème, un système qui fait de chacun une marionnette dont on tire les fils ? Dans le film, les nazis ne pensent pas, ils agissent par réflexe conditionnés, ils obéissent. Une des scènes les plus réjouissantes est bien celle où Bronski, déguisé en Hitler ouvre la porte de l'avion et ordonne aux deux pilotes de sauter ce qu'ils s'empressent de faire. Et Bronski de conclure "Very obliging people". Souligner que Bronski s'est ainsi conduit en meurtrier m'a paru un tant soit peu déplacé. J'ai plutôt vu dans cette scène la dénonciation (propagande donc) d'une machine à décerveler. Et je n'ai pu m'empêcher de penser à l'argument de la défense au procès de Nürenberg. "Ils ont obéi aux ordres." Je n'oublie pas non plus que le professeur Siletsky, celui qui trahit son pays, ne porte, lui, aucun uniforme, il ne suit aucun ordre : il s'est engagé auprès des nazis par conviction.

Si l'on regarde maintenant de l'autre côté, du côté de cette troupe de comédiens qui met en échec le rouleau compresseur nazi, ils ne brandissent aucun drapeau, et ne s'encombrent d'aucune idéologie. Certes ! Ils sont jaloux, mesquins, bouffis de vanités. Certes encore ! Mais qui peut un instant croire à la perfection des héros ? D'ailleurs, le personnage le plus intéressant, le plus humble et le plus fort en fin de compte,  n'est ce pas Greenberg (*),  le hallebardier qui a toujours rêvé d'un grand rôle et ne cesse de répéter la fameuse tirade de Shylock dans Le Marchand de Venise : " If you prick us, do we not bleed? If you tickle us, do we not laugh? If you poison us, do we not die? And if you wrong us, do we not revenge? If we are like you in therest, we will resemble you in that."  Si Lubitsch a choisi de n'utiiser que la fin de la tirade et non son début  : "I am a Jew. Hath not a Jew eyes? Hath not a Jew hands, organs, dimensions, senses, affections, passions; fed with the same food, hurt with the same weapons, subject to the same diseases, heal'd by the same means, warm'd and cool'd by the same winter and summer, as a Christian is? ", c'est peut-être pour ne pas alourdir son film par une tirade trop longue, mais plus vraisemblablement pour lui donner une tournure  universelle. Greenberg, qui pour la première fois de sa vie va jouer un premier rôle, un rôle dont dépend le sort de toute la troupe "if you don't play right, we are all lost, and if you do, I still can't guarantee.... d'un simple "What do I have to do ? " et sans aucun effet de manche, signe son engagement dans le combat contre les sbires du nazisme.  Il est aussi celui qui rappelle la nécessité du rire au théâtre, au cinéma ou dans la vie. Un rire qui sonne comme un défi lancées aux forces du mal. Greenberg, l'humaniste, n'a qu'un petit rôle à côté de Carole Lombard  et de Jack Benny, mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est lui le vrai porte-parole de Lubitsch.


Je sais que le terme de propagande n'a pas bonne presse parce que la propagande est considérée comme un moyen de manipulation des esprits simples. Lubitsch, de toute évidence ne prend pas les spectateurs pour des imbéciles.  Il ne cherche pas à manipuler leurs émotions. C'est à l'intelligence qu'il s'adresse. Alors, mettons que To be or not to be n'est pas un film de propagande, mais c'est définitivement un film engagé. Le film date de 1942.


* Félix Bressart est le nom de l'acteur qui incarne le personnage de Greenberg. Il est né en Prusse orientale en 1882. Juif, il a été contraint d'émigrer en Autriche d'abord puis aux Etats-Unis.





05 octobre 2013

Ma vie avec Liberace


Plus kitsch ce n'est pas possible. Et dans le clinquant, Soderberg en a mis une couche : costumes, décors, jeu des personnages, tout est trop !  Mais un film sur un personnage aussi extravagant que Liberace se devait d'être à la hauteur du personnage. On ne boit que du champagne, on ne dort que dans la soie, on ne se baigne que dans des bulles... mais derrière tout cela il y a deux êtres humains pitoyables dans leur besoin d'affection.

Car l'argent et la gloire ne suffisent apparemment pas à combler les vides. Le propos est un peu cliché mais parfaitement illustré dans le film. La générosité de Liberace est à la mesure de ce qu'il attend de ses protégés et la passion ne peut être vécu qu'à son paroxysme. Quitte à ce que cela se termine très mal.





Les Amants du Texas

Voilà un film sur lequel certains feront la fine bouche : une romance à l'eau de rose ! un polar mal ficelé ! 
Et bien non !
Une romance ? Le film de David Lowery raconte bien une histoire d'amour passionnée et tumultueuse parce qu'elle concerne deux individus, pris lors d'un braquage. Lui est en prison; elle élève seule leur petite fille.  Il s'évade impatient de reprendre l'histoire d'amour où il l'avait laissée, mais quatre ans ont passé. Aussi romantiques que soient les histoires d'amour à leurs débuts, elles finissent souvent comme dans la chanson douce-amère de Prévert, car " la vie sépare ceux qui s'aiment tout doucement sans faire de bruit" et parfois plus violemment !
Un polar ? Certainement puisqu'il y a une fusillade pour commencer, des policiers, une évasion etc... Mais c'est au spectateur de reconstituer les événements car le réalisateur en dit le moins possible, il suggère, il laisse entendre, il pratique l'art de l'ellipse et celui des silences.  Ce sont les images qui parlent. David Lowery va à l'essentiel - les relations entre les êtres - et débarrasse son film de tout le superflu. Ainsi, peu importent les conditions du braquage qui tourne mal,  ce qui compte, c'est la séparation des deux amants; et le temps qui change la donne.


Reste que ce film est parfaitement situé dans son environnement rural, une petite ville où tout le monde se connaît. Et c'est là l'argument supposé imparable des détracteurs du film. En effet pour quelques photos bien léchées, quelques effets de lumière sur les herbes d'un champ, le jeune réalisateur est aussitôt soupçonné de faire du Terence Malik. En moins bien évidemment !
Mais pourquoi faut-il toujours que l'on compare ceux qui en sont à leurs premiers essais, avec ceux qui ont déjà toute une oeuvre derrière eux. Si Les Amants du Texas était un livre, c'est Faulkner qu'on dégainerait ! comme on le fait régulièrement pour tout jeune écrivain qui s'essaye à parler du Mississippi ou de n'importe quel Etat du Sud.
Et bien non, David Lowery ne fait ni du Malik, ni du Arthur Penn, ni du Faulkner. Il fait du David Lowery et c'est déjà pas mal !

03 octobre 2013

Le Majordome

On ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments. Ni de bon cinéma. Et c'est franchement dommage ! Car Le Majordome n'est pas un très bon film et son sujet aurait mérité mieux.

De quoi s'agit-il ? De faire l'histoire des Noirs américains - oui je sais, je devrais dire Afro-américains, mais pourquoi se cacher derrière les mots ?  -  l'histoire donc des Noirs américains depuis les champs de coton jusqu'à l'élection d'Obama, en prenant comme prétexte la biographie d'un majordome de la Maison Blanche. Personnage bien réel au deumeurant.

Le film n'est qu'un long retour en arrière : le majordome se souvient de sa mère, violée par un maître blanc dans un champ de coton, de son père tué par le même odieux personnage, de son apprentissage d'homme "invisible". Black boy de Richard Wright, Invisible man de Ralph Elison  autant de références à la littérature noire américaine et au dilemne des générations qui ont grandi après l'abolition de l'esclavage : se comporter en "bon noir", en Uncle Tom ou revendiquer haut et fort ses droits à l'égalité. Le fils du majordome s'engage auprès de Martin Luther King, puis auprès de Malcom X et des Black Panthers  pendant que son père reste un homme soumis, dont la soumission permet de faire vivre sa famille et de payer les études universitaires du fils ! Le sit-in de Woolworth, l'intégration des premiers étudiants noirs à l'université du Mississippi, le massacre du pont de Selma, l'assassinat de Martin Luther King et celui de Robert Kennedy, le défilé des présidents à la Maison Blanche, en deux heures de temps, c'est toute l'histoire  américaine du XXe siècle qui défile sur l'écran. C'est beaucoup, c'est trop. Et surtout l'effort didactique est beaucoup trop visible. Les personnages, même le grand Whitaker, ont l'air d'être là pour servir la démonstration : chacun incarne une option dans la marche des Noirs vers l'égalité.

Le Majordome n'est pas un mauvais film, c'est juste un film plein de bonnes intentions. Un outil didactique, plutôt bien fait. Un film utile à défaut d'être un chef-d'oeuvre cinématographique.  

Vieux, moches et ... abandonnés

... tous les jours au même endroit. Le petit brun surtout avait l'air bien mal en point, vieux, galeux, boiteux, arthroseux...


Jimmy P.

J'ai vu le dernier film de Woody Allen, Blue Jasmine et je me suis ennuyée.
J'ai vu Jimmy P., le film d 'Arnaud Desplechin et je ne me suis pas ennuyée.
Pourtant les deux films sont construits sur des dialogues parfaitement écrits.

Mais dans Blue Jasmine les dialogues sont justement trop écrits et les acteurs ont du mal à se les approprier (à l'exception de Cate Blanchett). Du coup ils sont toujours surjoués et j'ai fini par me demander si c'était la faute des acteurs, ou celle ...  du dialoguiste. A moins que ce ne soit la direction d'acteur qui soit problématique. Bref j'avais l'impression d'être au théâtre, où la parole est toujours survalorisée par rapport à l'image. Mais j'étais au cinéma ....

Dans Jimmy P. la parole est tout aussi importante puisqu'il s'agit de la psychothérapie d'un Indien des Plaines. Mais là, le dialogue a l'air de s'inventer au fur et à mesure, comme il se doit dans une telle situation. Que la parole soit celle de l'Indien ou celle du psy, à tel point que parfois l'on ne sait plus qui est le "patient" dans l'histoire tant l'échange de paroles entre les deux hommes a l'air bénéfique à l'un et à l'autre. On progresse ainsi dans l'histoire des deux personnages sans jamais savoir à quoi s'attendre exactement. On essaye de deviner, d'anticiper, en vain. Mais du coup, puisque rien n'est prévisible on ne s'ennuie pas, d'autant que le réalisateur varie sans cesse ses angles, ses cadrages donc les points de vue. La cure pyschanalitique filmée par Depleschin est tout, sauf statique. 


Et puis il y a autre chose encore qui différencie les deux films : dans Blue Jasmine, Woody Allen a l'air au mieux condescendant, mais le plus souvent méprisant vis à vis de ses personnages qu'il caricature façon Groseille et Lequesnoy ! Woody Allen, le misanthrope, n'a aucune tendresse pour la race humaine, et l'accable de ses sarcasmes. Alors que l'empathie de Georges Devereux, le psy joué par Mathieu Amalric, pour son patient et pour l'humanité en générale, est patente et n'interdit pas l'ironie. Elle est patente et communicative. Desplechin aime ses personnages et manifeste une certaine tendresse pour la race humaine ou tout du moins une certaine indulgence.

Un dernier point, une virgule plutôt : le film de Woddy Allen se déroule entre New York, les Hamptons et San Francisco . Celui d'Arnaud Depleschin à Topeka (Kansas). Des lieux codés dans les deux cas. En particulier dans ma topographie personnelle.

02 octobre 2013

La grande misère des musées italiens

qui ne diffère sans doute  pas de la misère des musées français


01 octobre 2013

Mac Laren

Le musée de Nuoro, le seul musée d'art contemporain de Sardaigne. Trois étages que nous arpentons consciencieusement de haut en bas. Dernière salle, celle du rez-de-chaussée...Une video est en cours ... l'oeil s'excite ... quelque chose de neuf, de jamais vu ...

Et pourtant, Norman Mac Laren est né en 1914,  mort en 1987,  a commencé de "bidouiller" des films et des vidéos en 1933 ! Pas franchement contemporain, mais quelle créativité, quel humour, quelle poésie dans ses films. Et sans prise de tête.

Pas d'autres solutions que d'aller chercher sur Internet si ses films sont visibles et, surprise, ils le sont! Je ne les ai pas encore tous vus mais voici déjà, dans le désordre, une petite sélection :

Pas de deux (1968 )pour les effets cinétiques
Boogie Doodle (1940)pour l'accord entre l'image et la musique (mais on pourrait dire cela de chacun de ses films, alors mettons pour le rythme
Chairy Tale (1957) pour l'imagination et l'humour
Le Merle  (1958) pour les mêmes raisons sans doute
Les Voisins (1952) pour sa morale (et oui!)
Dancing with twice himself, mon préféré peut-être, pour la poésie et .... pour la musique de Vila Lobos. 


Pour trouver les films, de Nomran Mac Laren,  deux solutions : L'Office national du film canadien  ou Youtube ! Mais méfiez-vous, c'est vite addictif .