26 août 2008
Achinto Bhadra
Parmi toutes les photos exposées à Arles cet été, celles d'Achinto Bhadra se démarquent nettement parce qu'il y a, derrière le travail de ce photographe indien, non seulement un projet artistique mais une tentative pour aider des jeunes filles massacrées par la vie, à trouver un "autre moi", c'est à dire retrouver en même temps qu'une certaine estime d'elles-mêmes, un sens à leur vie.
Toutes les explications en anglais sur le site
http://www.anotherme.org
et en français sur celui des Rencontres d'Arles
http://www.rencontres-arles.com
25 août 2008
Avedon et Walker
Ces deux photographes ou plutôt les oeuvres qu'ils présentaient sur les cimaises d'Arles m'ont littéralement enchantée, alors qu'elles sont radicalement différentes des photos que je présentais dans mon précédent billet : fini le réalisme, plus de témoignage, rien sur l'état du monde. Voici venu le temps du rêve.
L'un et l'autre mettent en scène un univers imaginaire, macabre sans être morbide dans les photos de Richard Avedon ...
... féérique et parfois surréaliste dans celle de Tim Walker.
Je ne vois pas pourquoi il faudrait choisir entre le rêve et la réalité.
L'un et l'autre mettent en scène un univers imaginaire, macabre sans être morbide dans les photos de Richard Avedon ...
... féérique et parfois surréaliste dans celle de Tim Walker.
Je ne vois pas pourquoi il faudrait choisir entre le rêve et la réalité.
24 août 2008
Atwood et Demos
Deux autres photographes ont retenu mon attention : Jane Evelyn Atwood et John Demos dont le travail est proche, à mon sens, de celui de Françoise Huguier.
Alors que le noir et blanc semble conférer à la photo en général sa valeur "artistique", l'un et l'autre utilisent sans vergogne la couleur. Ce qui pose bien entendu la question du statut de ces photos : oeuvre d'art ou simple document ?
On peut gloser à l'infini sur le sujet, mais la question est sans intérêt : Atwood, comme Demos, comme Huguier ont choisi de jouer sur la double fonction de la photo: photo d'art et photo-reportage ?
Jane Evelyn Atwood est américaine mais vit en France depuis longtemps. Habituée des reportages en noir et blanc sur la misère urbaine, pour Haïti, sujet de l'exposition mais aussi d'un très beau livre paru chez Actes Sud, elle a choisi la couleur. Et le résultat est éblouissant.
John Demos est grec et ses photos sont autant de témoignages sur l' Albanie des années 90, au moment où la dictature lâche enfin prise. Passionnant.
Si ces photographes, plus que d'autres ont retenu mon attention, c'est sans doute parce qu'ils font ce que j'aimerais faire lorsque je voyage. Photographier le monde tel qu'il est, mais de façon à ce que la photo ait un sens même pour celui qui n'a pas fait le voyage.
Alors que le noir et blanc semble conférer à la photo en général sa valeur "artistique", l'un et l'autre utilisent sans vergogne la couleur. Ce qui pose bien entendu la question du statut de ces photos : oeuvre d'art ou simple document ?
On peut gloser à l'infini sur le sujet, mais la question est sans intérêt : Atwood, comme Demos, comme Huguier ont choisi de jouer sur la double fonction de la photo: photo d'art et photo-reportage ?
Jane Evelyn Atwood est américaine mais vit en France depuis longtemps. Habituée des reportages en noir et blanc sur la misère urbaine, pour Haïti, sujet de l'exposition mais aussi d'un très beau livre paru chez Actes Sud, elle a choisi la couleur. Et le résultat est éblouissant.
John Demos est grec et ses photos sont autant de témoignages sur l' Albanie des années 90, au moment où la dictature lâche enfin prise. Passionnant.
Si ces photographes, plus que d'autres ont retenu mon attention, c'est sans doute parce qu'ils font ce que j'aimerais faire lorsque je voyage. Photographier le monde tel qu'il est, mais de façon à ce que la photo ait un sens même pour celui qui n'a pas fait le voyage.
23 août 2008
Françoise Huguier
Immédiatement séduite par les photos de Françoise Huguier exposées à Arles cet été.
Oui mais...
Lorsque je m'interroge sur les raison de cette séduction, les réponses ne sont peut-être pas si évidentes que cela.
Le sujet ? Un appartement communautaire de St Petersbourg dans lequel Françoise Huguier a vécu pendant quelques mois. L'appartement en question est petit, encombré, passablement décati, moche, voire sordide. Mais les photos sont belles : couleurs vives, crues; effets de lumière; cadrage soigné. De belles photos vraiment.
Certains commentaires toutefois laissent entendre qu'il est indécent de photographier ainsi la misère, que le regard posé par le photographe (et le spectateur) s'apparente à du voyeurisme d'autant que dans ce "décor" miséreux Françoise Huguier a photographié des jeunes filles nues.
Je conçois que l'on puisse être gêné et même choqué par ces photos. Pourtant je ne crois pas que Françoise Huguier puisse être accusée de voyeurisme. Sa démarche est plutôt celle du reporter-photographe comme en atteste son parcours professionnel et les sujets qu'elle a traités auparavant. Et dans le cas présent, elle a choisi de louer une chambre dans cet appartement et d'en partager, avec les locataires, les conditions de vie. Pour un temps limité il est vrai, mais elle porte ainsi sur les sujets qu'elle photographie un regard à la fois emphatique et distancié.
C'est ce regard qui lui permet, je crois de trouver la beauté là où elle n'est pas. Et s'il faut lui trouver une caution, il suffira de rappeler le projet baudelairien : "extraire la beauté du mal".
D'ailleurs, n'est-ce pas ce que les plus grands écrivains comme les plus grands photographes ont toujours tenté de faire ? Je pense à Sebastiao Salgado par exemple. J'attends d'une oeuvre d'art qu'elle ait une valeur esthétique, mais j'attends aussi qu'elle nous dise quelque chose de l'état du monde.
Reste la question de la nudité. Pourquoi la nudité de ces jeunes filles nous embarrasse-t-elle ? Parce que ces femmes ne sont pas des mannequins au corps parfait, mais des femmes ordinaires avec des corps imparfaits, trop gros, trop maigres, photographiés dans des poses peu avantageuses, en slip et chaussettes... Pas d'érotisme mais une certaine indécence, celle de la promiscuité à laquelle sont contraints les habitants de cet appartement communautaire. La nudité, à condition qu'elle soit enveloppée d'un voile esthétisant ou dissimulée sous une dénomination mythologique embarrasse moins le spectateur que la vraie nudité. On admire la Venus du Titien; on hurle au scandale devant l'Olympia de Manet.
Bien que je ne le connaisse pas encore très bien, le travail de Françoise Huguier m'intéresse énormément. J'admire en particulier sa capacité à passer d'un sujet à un autre, de reportages à forte dimension sociale, à un travail très sophistiqué sur la haute-couture, sans oublier ce qui relève du récit de voyage, parfois intimiste comme dans J'avais huit ans, reportage réalisé au Cambodge sur les traces de sa propre enfance.
http://pagesperso-orange.fr/francoise.huguier/
Oui mais...
Lorsque je m'interroge sur les raison de cette séduction, les réponses ne sont peut-être pas si évidentes que cela.
Le sujet ? Un appartement communautaire de St Petersbourg dans lequel Françoise Huguier a vécu pendant quelques mois. L'appartement en question est petit, encombré, passablement décati, moche, voire sordide. Mais les photos sont belles : couleurs vives, crues; effets de lumière; cadrage soigné. De belles photos vraiment.
Certains commentaires toutefois laissent entendre qu'il est indécent de photographier ainsi la misère, que le regard posé par le photographe (et le spectateur) s'apparente à du voyeurisme d'autant que dans ce "décor" miséreux Françoise Huguier a photographié des jeunes filles nues.
Je conçois que l'on puisse être gêné et même choqué par ces photos. Pourtant je ne crois pas que Françoise Huguier puisse être accusée de voyeurisme. Sa démarche est plutôt celle du reporter-photographe comme en atteste son parcours professionnel et les sujets qu'elle a traités auparavant. Et dans le cas présent, elle a choisi de louer une chambre dans cet appartement et d'en partager, avec les locataires, les conditions de vie. Pour un temps limité il est vrai, mais elle porte ainsi sur les sujets qu'elle photographie un regard à la fois emphatique et distancié.
C'est ce regard qui lui permet, je crois de trouver la beauté là où elle n'est pas. Et s'il faut lui trouver une caution, il suffira de rappeler le projet baudelairien : "extraire la beauté du mal".
D'ailleurs, n'est-ce pas ce que les plus grands écrivains comme les plus grands photographes ont toujours tenté de faire ? Je pense à Sebastiao Salgado par exemple. J'attends d'une oeuvre d'art qu'elle ait une valeur esthétique, mais j'attends aussi qu'elle nous dise quelque chose de l'état du monde.
Reste la question de la nudité. Pourquoi la nudité de ces jeunes filles nous embarrasse-t-elle ? Parce que ces femmes ne sont pas des mannequins au corps parfait, mais des femmes ordinaires avec des corps imparfaits, trop gros, trop maigres, photographiés dans des poses peu avantageuses, en slip et chaussettes... Pas d'érotisme mais une certaine indécence, celle de la promiscuité à laquelle sont contraints les habitants de cet appartement communautaire. La nudité, à condition qu'elle soit enveloppée d'un voile esthétisant ou dissimulée sous une dénomination mythologique embarrasse moins le spectateur que la vraie nudité. On admire la Venus du Titien; on hurle au scandale devant l'Olympia de Manet.
Bien que je ne le connaisse pas encore très bien, le travail de Françoise Huguier m'intéresse énormément. J'admire en particulier sa capacité à passer d'un sujet à un autre, de reportages à forte dimension sociale, à un travail très sophistiqué sur la haute-couture, sans oublier ce qui relève du récit de voyage, parfois intimiste comme dans J'avais huit ans, reportage réalisé au Cambodge sur les traces de sa propre enfance.
http://pagesperso-orange.fr/francoise.huguier/
22 août 2008
Arles 2008
Retour à Arles pour l'édition 2008 du festival photo avec, encore, de très belles découvertes !
Mais, avant même de m'intéresser aux oeuvres exposées, je continue d'être fascinée par les lieux d'exposition : églises désaffectées, cinéma abandonné, anciens ateliers, autant de lieux qui ont connu des jours meilleurs et qui, le temps d'un été, reprennent vie.
Ces friches, en particulier les ateliers SNCF, devraient un jour être remplacées par un centre grandiose. J'espère simplement que les architectes parviendront à préserver l'esprit des lieux.
Mais, avant même de m'intéresser aux oeuvres exposées, je continue d'être fascinée par les lieux d'exposition : églises désaffectées, cinéma abandonné, anciens ateliers, autant de lieux qui ont connu des jours meilleurs et qui, le temps d'un été, reprennent vie.
Ces friches, en particulier les ateliers SNCF, devraient un jour être remplacées par un centre grandiose. J'espère simplement que les architectes parviendront à préserver l'esprit des lieux.
Libellés :
Photos et photographes,
Voyage en France,
Voyages
13 août 2008
Arnaldur Indridason
Je viens de lire mon premier polar islandais. Il était temps ! Car cela fait déjà un moment que la réputation de cet auteur m'étais venue aux oreilles. Mais je n'avais pas encore trouvé l'occasion de le lire.
C'est chose faite : le hasard m'a mis dans les mains La Cité des Jarres, qui se trouve être son premier roman et me voici immédiatement convaincue de lire tous les autres.
L'histoire est sombre et glauque, la météo est à l'avenant. Les paysages mais aussi les noms sont typiquement islandais. La police scientifique est à l'oeuvre et la génétique croisée avec la généalogie donne des résultats inquiétants.
Si vous aimez les romans noirs autant que moi, n'hésitez pas d'autant que le 10 Septembre - je viens de l'apprendre - sort Jar City, adapté bien sûr du roman d'Indridason. Je ne sais pas si j'irai le voir parce que c'est une chose d'imaginer une morgue, un cadavre d'enfant, une autopsie; c'en est une autre de le voir.
C'est chose faite : le hasard m'a mis dans les mains La Cité des Jarres, qui se trouve être son premier roman et me voici immédiatement convaincue de lire tous les autres.
L'histoire est sombre et glauque, la météo est à l'avenant. Les paysages mais aussi les noms sont typiquement islandais. La police scientifique est à l'oeuvre et la génétique croisée avec la généalogie donne des résultats inquiétants.
Si vous aimez les romans noirs autant que moi, n'hésitez pas d'autant que le 10 Septembre - je viens de l'apprendre - sort Jar City, adapté bien sûr du roman d'Indridason. Je ne sais pas si j'irai le voir parce que c'est une chose d'imaginer une morgue, un cadavre d'enfant, une autopsie; c'en est une autre de le voir.
12 août 2008
Eldorado
Ou... quand la Belgique ressemble à l'Amérique !
Ses grand paysages plats, ses ciels immenses toujours changeants. Ses routes droites, à l'infini, sans rien au bout de l'horizon qu'un autre paysage plat.
Eldorado pourrait être un road movie américain, mais c'est un road movie belge; un pur régal de cinéphile.
Comme dans tout road movie qui se respecte il y a une voiture, une vieille Chevrolet bleue et dans la voitures deux énergumènes : Yvan, franchement gros et pas très soigné de sa personne, dealer à l'occasion de voitures d'occasion et Elie, franchement maigre, junkie recyclé dans le cambriolage. Quelque chose de Laurel et Hardy ? oui sans doute... mais beaucoup plus que cela car si le film tourne parfois à la farce surréaliste, il frôle souvent la tragédie, la vraie, celle de ses vies gâchées sans que l'on sache très bien pourquoi et sans que rien ni personne ne puisse y changer quoi que ce soit.
Les acteurs sont remarquables, les deux personnages principaux, mais aussi tous les personnages secondaires qui donnent au film sa chair et son âme : le caravaniste naturiste, le collectionneur de voitures "impactées" , la mère d' Elie/Didier au visage quasi immobile mais si expressif.
Le dialogue est d'une justesse rare; le scénario, assez mince au départ s'enrichit au fil de la route de toutes les rencontres et situations improbables auxquelles les deux hommes sont confrontés. La caméra est aussi efficace que discrète (efficace parce que discrète ? ). L'image, un peu sale à la façon des bons vieux films en technicolor des années 60 est parfaitement accordée à la bande son et aux chansons qui ponctuent le film. Oui, définitivement, ce film est un régal pour les cinéphiles.
Mais était-il vraiment nécessaire de souligner par une courte scène donnée en prologue la mission "christique" d'Yvan ? Peut-être pas... D'autant que... mais pas question de raconter la fin. De toute façon cet incipit s'oublie assez vite et le film est, du début jusqu'à la fin, jubilatoire.
Le nom du réalisateur ? Bouli Lanners qui joue aussi dans le film le rôle d'Yvan !
Belle performance dans les deux cas.
Ses grand paysages plats, ses ciels immenses toujours changeants. Ses routes droites, à l'infini, sans rien au bout de l'horizon qu'un autre paysage plat.
Eldorado pourrait être un road movie américain, mais c'est un road movie belge; un pur régal de cinéphile.
Comme dans tout road movie qui se respecte il y a une voiture, une vieille Chevrolet bleue et dans la voitures deux énergumènes : Yvan, franchement gros et pas très soigné de sa personne, dealer à l'occasion de voitures d'occasion et Elie, franchement maigre, junkie recyclé dans le cambriolage. Quelque chose de Laurel et Hardy ? oui sans doute... mais beaucoup plus que cela car si le film tourne parfois à la farce surréaliste, il frôle souvent la tragédie, la vraie, celle de ses vies gâchées sans que l'on sache très bien pourquoi et sans que rien ni personne ne puisse y changer quoi que ce soit.
Les acteurs sont remarquables, les deux personnages principaux, mais aussi tous les personnages secondaires qui donnent au film sa chair et son âme : le caravaniste naturiste, le collectionneur de voitures "impactées" , la mère d' Elie/Didier au visage quasi immobile mais si expressif.
Le dialogue est d'une justesse rare; le scénario, assez mince au départ s'enrichit au fil de la route de toutes les rencontres et situations improbables auxquelles les deux hommes sont confrontés. La caméra est aussi efficace que discrète (efficace parce que discrète ? ). L'image, un peu sale à la façon des bons vieux films en technicolor des années 60 est parfaitement accordée à la bande son et aux chansons qui ponctuent le film. Oui, définitivement, ce film est un régal pour les cinéphiles.
Mais était-il vraiment nécessaire de souligner par une courte scène donnée en prologue la mission "christique" d'Yvan ? Peut-être pas... D'autant que... mais pas question de raconter la fin. De toute façon cet incipit s'oublie assez vite et le film est, du début jusqu'à la fin, jubilatoire.
Le nom du réalisateur ? Bouli Lanners qui joue aussi dans le film le rôle d'Yvan !
Belle performance dans les deux cas.
08 août 2008
Fabienne Verdier
J'ai d'abord découvert L'Unique trait de Pinceau.
Et j'ai été séduite.
Puis, quand le livre est sorti en 2003, j'ai lu Passagère du silence. Dans la foulée j'ai été écouter Fabienne Verdier qui venait parler de son livre, de sa vie en Chine, de sa peinture dans ma librairie préférée.
Et j'ai été fascinée.
Je viens d'emprunter à la bibliothèque son dernier opus : Entre ciel et terre.
Et je suis subjuguée.
Mais comment parler de Fabienne Verdier ? Comment dire mon admiration pour cette femme étonnante ? Comment surtout donner envie, à ceux qui ne la connaissent pas, de la découvrir.
Sans doute faut-il commencer par lire le livre où elle raconte comment, âgée d'une vingtaine d'années, elle part en Chine à la recherche d'elle-même; comment elle a partagé la vie ordinaire des étudiants chinois à une époque - le début des années 80 - où la Chine n'était pas encore entrée dans l'ère de la marchandisation; comment, dans son école de Chongqing, elle a pratiqué la calligraphie avec passion et obstination jusqu' à y trouver la clef de son art.
C'est un récit de vie comme on en lit peu, celui d'une femme hors du commun. Et pourtant, elle parle de ce qu'elle fait avec une telle simplicité, qu'elle paraît très proche de nous.
Ensuite, quand vous aurez fini le livre, vous ferez sans doute comme moi, vous le relirez et vous vous précipiterez sur tous les articles, tous les livres qui parlent de Fabienne Verdier et surtout qui montrent son travail. Quitte à faire autant de kilomètres qu'il faudra pour voir sa prochaine exposition.
Et j'ai été séduite.
Puis, quand le livre est sorti en 2003, j'ai lu Passagère du silence. Dans la foulée j'ai été écouter Fabienne Verdier qui venait parler de son livre, de sa vie en Chine, de sa peinture dans ma librairie préférée.
Et j'ai été fascinée.
Je viens d'emprunter à la bibliothèque son dernier opus : Entre ciel et terre.
Et je suis subjuguée.
Mais comment parler de Fabienne Verdier ? Comment dire mon admiration pour cette femme étonnante ? Comment surtout donner envie, à ceux qui ne la connaissent pas, de la découvrir.
Sans doute faut-il commencer par lire le livre où elle raconte comment, âgée d'une vingtaine d'années, elle part en Chine à la recherche d'elle-même; comment elle a partagé la vie ordinaire des étudiants chinois à une époque - le début des années 80 - où la Chine n'était pas encore entrée dans l'ère de la marchandisation; comment, dans son école de Chongqing, elle a pratiqué la calligraphie avec passion et obstination jusqu' à y trouver la clef de son art.
C'est un récit de vie comme on en lit peu, celui d'une femme hors du commun. Et pourtant, elle parle de ce qu'elle fait avec une telle simplicité, qu'elle paraît très proche de nous.
Ensuite, quand vous aurez fini le livre, vous ferez sans doute comme moi, vous le relirez et vous vous précipiterez sur tous les articles, tous les livres qui parlent de Fabienne Verdier et surtout qui montrent son travail. Quitte à faire autant de kilomètres qu'il faudra pour voir sa prochaine exposition.
05 août 2008
Notre science universitaire
Je ne sais pas comment ce volume a atterri sur la pile "des livres à lire". Offert par un ami ? Acheté sur un coup de tête ? Ou sur le conseil avisé d'un critique ? Peu importe au fond, puisqu' un été sédentaire, propice à la lecture, m'a permis de découvrir ce petit bijou d'ironie savante.
Dmitri I. Pisarev est un journaliste russe né en 1840, mort en 1868 qui, du haut de ses 20 ans et avant d'être emprisonné pour un article où il fustige la dynastie des Romanov, fait le bilan de ses études universitaires. Bilan catastrophique !
Ecrit d'une plume alerte, ce petit texte bien tourné (merci au traducteur), vif, drôle et percutant permet à son auteur de défendre, avec beaucoup de conviction, l'idée que l' Université est une entreprise crétinisante. Où l'on apprend beaucoup de choses, mais certainement pas à penser.
"L'étudiant lit un auteur, puis un autre et n'en devient pas plus intelligent, et attend toujours que son cerveau s'éclaire, il entasse fait sur fait, et, soudain, un beau matin, est tout surpris de se retrouver une espèce de valise historique, bourrée à craquer, semblable à son prototype et guide bien-aimé. Pour moi un tel danger n'existait pas. je n'ai jamais pu m'occuper très longtemps de ce qui ne me donnait pas de plaisir intellectuel. "
Pisarev, bien entendu ne parle que de l'Université russe du XIXe siècle, mais sa réflexion n'a rien perdu de sa pertinence. Il fait de certains de ses professeurs des portraits savoureux, archétypes que l'on retrouve dans toutes les facultés, quelle que soit la discipline. Ses premiers essais journalistiques, entrepris alors même qu'il se trouve encore à l'Université, le convainquent assez rapidement que penser par soi-même est infiniment plus satisfaisant que d'ingurgiter l'un après l'autre sans les comprendre tous les volumes d'une bibliothèque.
Je trouvais du plaisir à une lecture attentive et réfléchie de livres et d'articles, parce que je percevais un but proche et à ma portée pour cette attention et cette réflexion. J'avais plaisir à exposer par écrit mes idées et mes opinions, parce qu'elles étaient effectivement miennes, je comprenais de quoi au juste je parlais et je me mettais tout entier dans ce que je cherchais à expliquer ou à démontrer. Je ne produisais rien de nouveau ni d'original, mais c'était nouveau et original pour moi. Je ne copiais pas dans un livre, je ne répétais pas les paroles des autres - je pensais par moi-même, et quand je débouchais par ma propre réflexion sur des vérités bien connues, j'arrivais néanmoins à communiquer à ces vérités le sceau d'une conviction vivante et sincère, témoignant à l'évidence qu'une pensée a réellement pris naissance dans la tête de celui qui écrit. " et il conclut "Une année de travail journalistique profita plus à mon développement intellectuel que deux années studieuses passées à l'université et à la bibliothèque."
Ce que je retiendrai de ce livre en fin de compte c'est moins la critique du système universitaire que la prise de conscience des infinies possibilités d'une pensée active.
Les livres, les bibliothèques, les ordinateurs sont des sources infinies de connaissances qui ne servent à rien si l'étudiant n'a pas appris à penser par lui-même. J'ai toujours considéré que la seule tâche de l'enseignant, de la maternelle à l'université, était de pousser ses élèves vers cette autonomie intellectuelle.
Nathanaël, maintenant jette ce livre.
Dmitri I. Pisarev est un journaliste russe né en 1840, mort en 1868 qui, du haut de ses 20 ans et avant d'être emprisonné pour un article où il fustige la dynastie des Romanov, fait le bilan de ses études universitaires. Bilan catastrophique !
Ecrit d'une plume alerte, ce petit texte bien tourné (merci au traducteur), vif, drôle et percutant permet à son auteur de défendre, avec beaucoup de conviction, l'idée que l' Université est une entreprise crétinisante. Où l'on apprend beaucoup de choses, mais certainement pas à penser.
"L'étudiant lit un auteur, puis un autre et n'en devient pas plus intelligent, et attend toujours que son cerveau s'éclaire, il entasse fait sur fait, et, soudain, un beau matin, est tout surpris de se retrouver une espèce de valise historique, bourrée à craquer, semblable à son prototype et guide bien-aimé. Pour moi un tel danger n'existait pas. je n'ai jamais pu m'occuper très longtemps de ce qui ne me donnait pas de plaisir intellectuel. "
Pisarev, bien entendu ne parle que de l'Université russe du XIXe siècle, mais sa réflexion n'a rien perdu de sa pertinence. Il fait de certains de ses professeurs des portraits savoureux, archétypes que l'on retrouve dans toutes les facultés, quelle que soit la discipline. Ses premiers essais journalistiques, entrepris alors même qu'il se trouve encore à l'Université, le convainquent assez rapidement que penser par soi-même est infiniment plus satisfaisant que d'ingurgiter l'un après l'autre sans les comprendre tous les volumes d'une bibliothèque.
Je trouvais du plaisir à une lecture attentive et réfléchie de livres et d'articles, parce que je percevais un but proche et à ma portée pour cette attention et cette réflexion. J'avais plaisir à exposer par écrit mes idées et mes opinions, parce qu'elles étaient effectivement miennes, je comprenais de quoi au juste je parlais et je me mettais tout entier dans ce que je cherchais à expliquer ou à démontrer. Je ne produisais rien de nouveau ni d'original, mais c'était nouveau et original pour moi. Je ne copiais pas dans un livre, je ne répétais pas les paroles des autres - je pensais par moi-même, et quand je débouchais par ma propre réflexion sur des vérités bien connues, j'arrivais néanmoins à communiquer à ces vérités le sceau d'une conviction vivante et sincère, témoignant à l'évidence qu'une pensée a réellement pris naissance dans la tête de celui qui écrit. " et il conclut "Une année de travail journalistique profita plus à mon développement intellectuel que deux années studieuses passées à l'université et à la bibliothèque."
Ce que je retiendrai de ce livre en fin de compte c'est moins la critique du système universitaire que la prise de conscience des infinies possibilités d'une pensée active.
Les livres, les bibliothèques, les ordinateurs sont des sources infinies de connaissances qui ne servent à rien si l'étudiant n'a pas appris à penser par lui-même. J'ai toujours considéré que la seule tâche de l'enseignant, de la maternelle à l'université, était de pousser ses élèves vers cette autonomie intellectuelle.
Nathanaël, maintenant jette ce livre.
04 août 2008
03 août 2008
La porte de l'école
02 août 2008
Lentille de Fresnel
01 août 2008
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