Un régal pour les yeux autant que pour le ventre !
Soit un tout petit port au bout d'une ria, quelques bateaux sagement amarrés, une lumière de fin d'été qui donne aux photos de vagues couleurs sepia.
Depuis le port on aperçoit les parcs à huîtres qui ont fait la renommée du lieu et comme l'huitrier du Château de Bélon a eu la bonne idée d'installer quelques tables rustiques sous les arbres, c'est là qu'on déguste ce met délicat, accompagné de pain de seigle, de beurre salé et d'un verre de Muscadet judicieusement choisi. Un régal vraiment, pour les yeux comme pour le ventre.
La bonne adresse ? Celle que j'ai essayée ? La voici !
Mais il y en a certainement d'autres .
30 septembre 2009
29 septembre 2009
Les Démineurs
Aller voir les Démineurs ...oui ? peut-être... peut-être pas...
Pas vraiment drôle le film. Plutôt brutal en fait.
Mais comment un film qui prend pour sujet la guerre d'Irak ne le serait-il pas ? Comment un film qui suit jour après jour une équipe de démineur dans les rues de Bagdad pourrait-il faire l'impasse sur les attentats, les explosions, le sang, les morts, les cadavres déchiquetés. La tension est à son comble dès les premières minutes et ne faiblit pas un instant.
Mais le principal intérêt du film est ailleurs. Il est dans cette façon de montrer la toute puissance de l'armée américaine se heurtant aux bricolages non moins meurtriers de leurs adversaires; dans cette façon de montrer comment les barrières linguistiques, culturelles provoquent malentendus, incompréhension et ressentiments. De part et d'autre.
Et puis il y a cette petite phrase, reprise sur l'affriche : "War is a drug." qui donne son véritable sens au film. Le personnage principal, présenté comme un démineur particulièrement audacieux bien que ses méthodes soient tout sauf orthodoxes et le mettent constamment en danger ainsi que son équipe, ne semble pas connaître la peur. Alors que ses compagnons vivent dans l'angoisse, le stress permanent, et comptent les jours qui les séparent de la fin de leur mission, lui prend des risques toujours plus insensés, shooté à l'adrénaline comme d'autres le sont à l'héroïne. Accro à sa drogue et incapable de s'en passer ! Si bien qu'à peine rentré et confronté aux rangées de céréales dans les travées d'un supermarché, superbe image de la vanité, il choisit de repartir vers le seul univers qui pour lui a du sens.
Le thème du soldat si bien adapté à la guerre qu'il est incapable de retourner à la vie "normale" n'est pas nouveau. Je me souviens du film de Tavernier, Capitaine Conan, héros sur les champs de bataille, alcoolique, déclassé social et meurtrier en dehors.
J'avoue néanmoins que l'image finale du film de Kathryn Bigelow m'a tout d'abord laissée perplexe. Le démineur, filmé de dos, Lonesome cowboy s'éloigant sur un ciel rougeoyant, petite musique héroïque à l'appui, c'était trop ! Comme un hymne à l'Amérique triomphante !
Oui, mais voilà : la musique est trop guillerette pour être honnête et mise en parallèle avec une autre scène, celle où un militaire s'émerveille naïvement et stupidement devant les prouesses du démineur, elle prend un autre sens et le propos de la réalisatrice paraît soudain plus ironique qu'il n' en a l'air. Non, cet homme, ce démineur qui affronte sans sourciller les pires dangers, n'est pas un héros : juste un drogué. Drogué à la guerre. Terrifiant constat !
Pas vraiment drôle le film. Plutôt brutal en fait.
Mais comment un film qui prend pour sujet la guerre d'Irak ne le serait-il pas ? Comment un film qui suit jour après jour une équipe de démineur dans les rues de Bagdad pourrait-il faire l'impasse sur les attentats, les explosions, le sang, les morts, les cadavres déchiquetés. La tension est à son comble dès les premières minutes et ne faiblit pas un instant.
Mais le principal intérêt du film est ailleurs. Il est dans cette façon de montrer la toute puissance de l'armée américaine se heurtant aux bricolages non moins meurtriers de leurs adversaires; dans cette façon de montrer comment les barrières linguistiques, culturelles provoquent malentendus, incompréhension et ressentiments. De part et d'autre.
Et puis il y a cette petite phrase, reprise sur l'affriche : "War is a drug." qui donne son véritable sens au film. Le personnage principal, présenté comme un démineur particulièrement audacieux bien que ses méthodes soient tout sauf orthodoxes et le mettent constamment en danger ainsi que son équipe, ne semble pas connaître la peur. Alors que ses compagnons vivent dans l'angoisse, le stress permanent, et comptent les jours qui les séparent de la fin de leur mission, lui prend des risques toujours plus insensés, shooté à l'adrénaline comme d'autres le sont à l'héroïne. Accro à sa drogue et incapable de s'en passer ! Si bien qu'à peine rentré et confronté aux rangées de céréales dans les travées d'un supermarché, superbe image de la vanité, il choisit de repartir vers le seul univers qui pour lui a du sens.
Le thème du soldat si bien adapté à la guerre qu'il est incapable de retourner à la vie "normale" n'est pas nouveau. Je me souviens du film de Tavernier, Capitaine Conan, héros sur les champs de bataille, alcoolique, déclassé social et meurtrier en dehors.
J'avoue néanmoins que l'image finale du film de Kathryn Bigelow m'a tout d'abord laissée perplexe. Le démineur, filmé de dos, Lonesome cowboy s'éloigant sur un ciel rougeoyant, petite musique héroïque à l'appui, c'était trop ! Comme un hymne à l'Amérique triomphante !
Oui, mais voilà : la musique est trop guillerette pour être honnête et mise en parallèle avec une autre scène, celle où un militaire s'émerveille naïvement et stupidement devant les prouesses du démineur, elle prend un autre sens et le propos de la réalisatrice paraît soudain plus ironique qu'il n' en a l'air. Non, cet homme, ce démineur qui affronte sans sourciller les pires dangers, n'est pas un héros : juste un drogué. Drogué à la guerre. Terrifiant constat !
28 septembre 2009
Rias et abers
Ria est le terme géographique officiel - aber le nom breton - qui désigne l'endroit où la mer, à marée haute envahit le lit d'un fleuve; mais à marée basse, elle se retire, ne laissant derrière elle qu'une vasière d'où émergent quelques pierres moussues ou quelques branchages rongés par les flots.
La force poétique de ces lieux tient justement, pour moi, à cet air de désolation qui répugne sans doute à d'autres. J'aime les ruines, qu'elles soient industrielles ou marines; j'aime sans doute cette lente érosion des choses par le temps, ou peut-être ... leur résistance à l'usure.
C'est pourquoi je ne me lasse pas de la promenade le long du chemin de halage qui va de Loctudy à Pont-L'abbé ...
d'autant qu'une barque oubliée, comme abandonnée au milieu des herbes ajoute à la désolation.
Mais j'aime tout autant ce lieu magique découvert par hasard, sur la rivière Aven. Il pleuvait un peu ce jour là, tout était gris, vert et mouillé.
Rien en tout cas, qui puisse faire renoncer un Anglais à son pique-nique estival !
Mais ce que j'aime par dessus-tout, ce sont les jeux de couleurs infinis : un éclat de soleil, l'ombre d'un nuage suffisent à modifier le paysage.
Terne et gris il y a quelques instants seulement, le voici soudain paré d'argent.
La force poétique de ces lieux tient justement, pour moi, à cet air de désolation qui répugne sans doute à d'autres. J'aime les ruines, qu'elles soient industrielles ou marines; j'aime sans doute cette lente érosion des choses par le temps, ou peut-être ... leur résistance à l'usure.
C'est pourquoi je ne me lasse pas de la promenade le long du chemin de halage qui va de Loctudy à Pont-L'abbé ...
d'autant qu'une barque oubliée, comme abandonnée au milieu des herbes ajoute à la désolation.
Mais j'aime tout autant ce lieu magique découvert par hasard, sur la rivière Aven. Il pleuvait un peu ce jour là, tout était gris, vert et mouillé.
Rien en tout cas, qui puisse faire renoncer un Anglais à son pique-nique estival !
Mais ce que j'aime par dessus-tout, ce sont les jeux de couleurs infinis : un éclat de soleil, l'ombre d'un nuage suffisent à modifier le paysage.
Terne et gris il y a quelques instants seulement, le voici soudain paré d'argent.
27 septembre 2009
Good bye solo
Le nez dans mes images, j'ai failli oublier de parler de Good bye Solo, un de ces "petits" films qui mérite, comme tout bon film de trouver son public, mais, bizarrement c'est toujours plus difficile pour les petits.
Solo est un chauffeur de taxi à qui un vieux bougon vient de réserver une course pour un trajet sans retour. Solo est d'origine sénégalaise, un pays où l'on prend soin de sa famille, de ses vieux et alors qu'il se traîne lui même un bon sac de problèmes, il s'attache au vieux schnoque et met tout en oeuvre pour le faire changer d'avis.
Le cinéma regorge d'histoires de personnages mal assortis qui, malgré leurs différences, vont peu à peu blah, blah, blah... et l'on se dit que l'on connaît déjà l'histoire. Mais celle là est différente. On bascule en permanence d'un individu à l'autre, des soucis de l'un aux rébuffades de l'autre, des rêves aux espoirs déçus de l'un ou de l'autre et le réalisateur, Ramin Bahrani, parvient jusqu'au bout à maintenir son film sur le fil ténu qui sépare la comédie de la tragédie.
Les acteurs sont excellents, le rythme plutôt allègre et le dénouement... et bien ce sera à vous de voir ! Mais il est difficile à propos de ce film de ne pas parler d'humanité, des choix que chacun fait à un moment ou à un autre de sa vie et du respect de la liberté d'autrui.
Solo est un chauffeur de taxi à qui un vieux bougon vient de réserver une course pour un trajet sans retour. Solo est d'origine sénégalaise, un pays où l'on prend soin de sa famille, de ses vieux et alors qu'il se traîne lui même un bon sac de problèmes, il s'attache au vieux schnoque et met tout en oeuvre pour le faire changer d'avis.
Le cinéma regorge d'histoires de personnages mal assortis qui, malgré leurs différences, vont peu à peu blah, blah, blah... et l'on se dit que l'on connaît déjà l'histoire. Mais celle là est différente. On bascule en permanence d'un individu à l'autre, des soucis de l'un aux rébuffades de l'autre, des rêves aux espoirs déçus de l'un ou de l'autre et le réalisateur, Ramin Bahrani, parvient jusqu'au bout à maintenir son film sur le fil ténu qui sépare la comédie de la tragédie.
Les acteurs sont excellents, le rythme plutôt allègre et le dénouement... et bien ce sera à vous de voir ! Mais il est difficile à propos de ce film de ne pas parler d'humanité, des choix que chacun fait à un moment ou à un autre de sa vie et du respect de la liberté d'autrui.
26 septembre 2009
Peintres de Cornouaille
Non ! Pas de topo sur l'école de Pont-Aven. Pas vraiment ma tasse de thé. Bien qu'un jour de pluie - ah bon ? il pleut en Bretagne ? - je n'aie pas dédaigné m'abriter au musée, d'où je suis ressortie, essorée sans doute, mais avec un vague sentiment d'ennui. Et le tour des galeries ne m'a pas convaincue non plus.
A l'exception de celle de EA Kerbiriou qui était d'ailleurs fermée ce jour là. Mais comme j'avais eu l'occasion - ailleurs - d'apprécier l'un de ses tableaux, j'ai été voir son site perso et effectivement j'aime bien ses "marines" (et seulement ses marines!) parce que contrairement à ce qu'on pouvait attendre, elles ne sont ni bleues ni rouges mais plutôt couleur de sable et de dunes et parce qu'elles savent rendre cette impression d'immensité que l'on a dès que l'on franchit le cordon dunaire de la baie d'Audierne.
A Pont L'Abbé, c'est la galerie de Patricia Oranin qui a retenu mon attention, ne serait-ce que pour sa profession de foi : "Loin des écueils régionalistes qui enferment trop souvent l’art et les artistes dans une vision locale, passéiste et pittoresque, la galerie Patricia Oranin a pour objectif de proposer un autre regard, ouvert sur la modernité. "
Quand je suis passée à la galerie, Jacques Godin exposait une série de tableaux intitulée Sables et dunes, dont le réalisme confine parfois à l'abstraction : plus dénudée la plage, plus vide le tableau, ne laissant sur la toile que le passage des couleurs.
Dans le catalogue de Patricia Oranin j'ai retenu d'autres noms, des noms de peintres comme Dominique Abraham ou Maryvonne Jeanne-Garrault dont j'aime tout particulièrement la Germaine aux chaussons rouges, le graveur Daniel Guillotin ou le photographe Olivier Garros.
Si vous passez par Pont L'Abbé, vous savez ce qu'il vous reste à faire. La galerie se trouve dans une petite rue entre la Place de la République et la place Carnot, très facile à trouver.
A l'exception de celle de EA Kerbiriou qui était d'ailleurs fermée ce jour là. Mais comme j'avais eu l'occasion - ailleurs - d'apprécier l'un de ses tableaux, j'ai été voir son site perso et effectivement j'aime bien ses "marines" (et seulement ses marines!) parce que contrairement à ce qu'on pouvait attendre, elles ne sont ni bleues ni rouges mais plutôt couleur de sable et de dunes et parce qu'elles savent rendre cette impression d'immensité que l'on a dès que l'on franchit le cordon dunaire de la baie d'Audierne.
A Pont L'Abbé, c'est la galerie de Patricia Oranin qui a retenu mon attention, ne serait-ce que pour sa profession de foi : "Loin des écueils régionalistes qui enferment trop souvent l’art et les artistes dans une vision locale, passéiste et pittoresque, la galerie Patricia Oranin a pour objectif de proposer un autre regard, ouvert sur la modernité. "
Quand je suis passée à la galerie, Jacques Godin exposait une série de tableaux intitulée Sables et dunes, dont le réalisme confine parfois à l'abstraction : plus dénudée la plage, plus vide le tableau, ne laissant sur la toile que le passage des couleurs.
Dans le catalogue de Patricia Oranin j'ai retenu d'autres noms, des noms de peintres comme Dominique Abraham ou Maryvonne Jeanne-Garrault dont j'aime tout particulièrement la Germaine aux chaussons rouges, le graveur Daniel Guillotin ou le photographe Olivier Garros.
"Germaine aux chaussons rouges" huile sur toile H 65 x L 50 cm. (c) DR
(Un grand merci à Maryvonne Jeanne-Garrault pour son aimable autorisation;
sur son site vous trouverez l'ensemble de son oeuvre, ainsi qu'un lien vers les site de son époux Jean-Pierre Garrault )
(Un grand merci à Maryvonne Jeanne-Garrault pour son aimable autorisation;
sur son site vous trouverez l'ensemble de son oeuvre, ainsi qu'un lien vers les site de son époux Jean-Pierre Garrault )
Si vous passez par Pont L'Abbé, vous savez ce qu'il vous reste à faire. La galerie se trouve dans une petite rue entre la Place de la République et la place Carnot, très facile à trouver.
25 septembre 2009
Le Port
En complément de mon billet de ce matin, ce petit poème en prose de Baudelaire.
"Un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie. L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux sans les lasser. Les formes élancées des navires, au gréement compliqué, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent à entretenir dans l'âme le goût du rythme et de la beauté. Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n'a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir. "
"Un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie. L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux sans les lasser. Les formes élancées des navires, au gréement compliqué, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent à entretenir dans l'âme le goût du rythme et de la beauté. Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n'a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir. "
Le port-musée de Douarnenez
Des musées maritimes, j'en ai déjà visité beaucoup : des grands, des prestigieux comme celui d'Amsterdam, le musée Viking de Ribe au Danemark ou le musée Vasa de Stokholm ou bien encore la Cité de la voile à Lorient; j'en ai visité aussi de très petits, modestes et sans prétention comme celui de Beaufort en Caroline du Nord ou le musée de l'étang de Thau à Bouzigue.
Tous passionnants et le dernier visité, le port-musée de Douardenez n'échappe pas à la règle.
A Douardenez vous trouverez, place de l'Enfer (!), un musée "classique" avec quelques bateaux à voile grandeur nature et de très beaux gréements, une reconstitution de l'ancien port, du temps où il n'était encore qu'un abri de marin bien sommaire, une exposition sur les sardineries, une autre sur les "boat people" , des ex-votos imaginés par Anne-Emmanuelle Marpeau et beaucoup d'autres objets liés à l'histoire de ce port sardinier.
Et puis, amarrés au quai mais toujours à flot, quelques vieux bateaux, fatigués d'avoir beaucoup navigué, sur lesquels vous pourrez monter et que vous pourrez explorer de la cabine du commandant jusqu'à la salle des machines !
Le vent qui siffle dans les haubans, l'odeur du goudron mélangé à celui du diesel, le bruit des machines, l'exiguïté des lieux .... de là à se retrouver l'estomac un peu brassé avec un début de mal de mer ... il vaut mieux se dépêcher de regagner la terre ferme.
J'aime bien la mer et les bateaux, mais la pêche au large... dur, vraiment. Et les tempêtes, et les naufrages...
Faut-il vraiment quitter le port ?
"Il est doux, quand la vaste mer est soulevée par les vents, d'assister du rivage à la détresse d'autrui;non qu'on trouve un si grand plaisir à regarder souffrir; mais on se plaît à voir quels maux vous épargnent ! " écrivait Lucrèce dans son De Natura rerum. Parole de terrien assurément, plus que de marin !
Tous passionnants et le dernier visité, le port-musée de Douardenez n'échappe pas à la règle.
A Douardenez vous trouverez, place de l'Enfer (!), un musée "classique" avec quelques bateaux à voile grandeur nature et de très beaux gréements, une reconstitution de l'ancien port, du temps où il n'était encore qu'un abri de marin bien sommaire, une exposition sur les sardineries, une autre sur les "boat people" , des ex-votos imaginés par Anne-Emmanuelle Marpeau et beaucoup d'autres objets liés à l'histoire de ce port sardinier.
Et puis, amarrés au quai mais toujours à flot, quelques vieux bateaux, fatigués d'avoir beaucoup navigué, sur lesquels vous pourrez monter et que vous pourrez explorer de la cabine du commandant jusqu'à la salle des machines !
Le vent qui siffle dans les haubans, l'odeur du goudron mélangé à celui du diesel, le bruit des machines, l'exiguïté des lieux .... de là à se retrouver l'estomac un peu brassé avec un début de mal de mer ... il vaut mieux se dépêcher de regagner la terre ferme.
J'aime bien la mer et les bateaux, mais la pêche au large... dur, vraiment. Et les tempêtes, et les naufrages...
Faut-il vraiment quitter le port ?
"Il est doux, quand la vaste mer est soulevée par les vents, d'assister du rivage à la détresse d'autrui;non qu'on trouve un si grand plaisir à regarder souffrir; mais on se plaît à voir quels maux vous épargnent ! " écrivait Lucrèce dans son De Natura rerum. Parole de terrien assurément, plus que de marin !
24 septembre 2009
Les tellines de la baie d'Audierne
Il est déjà difficile de connaître exactement le nom des poissons puisque ces noms changent parfois ? souvent ? selon la région où ils sont pêchés. Connaître le nom des coquillages est encore plus difficile !
Comment s'appellent ces délicieux petits bivalves, joliment striés de rose, de beige ou de jaune ?
Sont-ce des coques ? des palourdes ? des patelles ? des berniques ? des praires ou des clams ? des "vongole" peut-être?
Comme je ne dispose pas du Larousse des poissons, coquillages et crustacés de Jacques Le Divellec, me voici bien embarrassée !
Un tour sur le site du CNC (Comité National de la Conchyliculture) ne m'apporte pas de réponses vraiment satisfaisantes : les coques sont bien identifiées, mais les palourdes, les clams et les praires sont mises dans le même panier. Comment les distinguer ?
A gauche les praires, à droite les coques et au milieu une palourde
De toute façon elles ne ressemblent pas à mes petits coquillages, si délicats ! Beaucoup trop rustiques ! Merci quand même au site de cuisine Fruits de la mer pour ces photos et les recettes qui vont avec !
Non, mes petits coquillages à moi sont des tellines ! Après bien des recherches et bien des errances, je confirme et voilà comment on les pêche :
Matériel indispensable : un énoooorme 4x4, genre pick-up américain, un chariot métallique avec des roulettes, des cagettes de plastique et sans doute une combinaison en néoprène en fonction de la température de l'eau.
La pêche se fait à marée basse, ou juste remontante. On tire le chariot, à la limite de l'eau et on drague le sable où logent, à quelques centimètres de profondeurs, les tellines.
Bizarrement, l'essentiel de la production part vers l'Espagne et on n'en voit jamais sur les étals des poissonniers. Dommage !
Mais il y a une autre façon de les pêcher, plus artisanale : il suffit, m'a-t-on dit, de fouiller le sable avec les doigts pour ramasser .... juste assez de tellines pour votre appétit ! En tout cas, pas plus d'1,5 kg par jour et par personne !
Vous voulez une recette ? Oh, cela n'a pas l'air difficile mais comme je n'ai pas essayé moi-même, vous pouvez faire un tour sur ce blog ; l'auteur y parle de "sebettes" et de "donax" mais ce sont bien des mêmes coquillages dont il s'agit ! A preuve cette très jolie photo publiée sur le blog de la glaneuse Cécile Conti.
Mais aussi jolies, délicates et sans doute délicieuse qu'elles soient, les tellines continuent de m'intriguer. Ou plutôt leur ramassage. Depuis quand existe-t-il sous forme professionnelle en Bretagne ? S'agit-il d'une espèce contingentée ?
Victoire !
J''ai enfin trouvé la réponse à mes questions sur Doris qui regroupe les Données d'Observations pour la Reconnaissance et l'Identification de la faune et de la flore Subaquatique !! Rien que ça !
Bon, mes tellines ne sont pas des tellines mais des dorax truncullus, leur pêche se pratique en Bretagne depuis les années 80. Elles doivent atteindre au moins 2,5 cm et leur pêche est interdite en Juillet-Août. Maintenant si vous voulez en savoir plus, n'hésiter pas à consulter la fiche consacrée à la ...
Et comme si cela ne suffisait pas, je suis tombée sur cette page du Télégramme, datée du 27 Janvier 2009 rapportant comment un 4x4 de pêcheur s'était fait piéger par l'exutoire de l'étang de Tunvel, photo à l'appui.
La vengeance des tellines !
Et des amoureux des plages désertes ?
Mais non, la plage est assez grande pour tout le monde. Enfin je crois....
Comment s'appellent ces délicieux petits bivalves, joliment striés de rose, de beige ou de jaune ?
Sont-ce des coques ? des palourdes ? des patelles ? des berniques ? des praires ou des clams ? des "vongole" peut-être?
Comme je ne dispose pas du Larousse des poissons, coquillages et crustacés de Jacques Le Divellec, me voici bien embarrassée !
Un tour sur le site du CNC (Comité National de la Conchyliculture) ne m'apporte pas de réponses vraiment satisfaisantes : les coques sont bien identifiées, mais les palourdes, les clams et les praires sont mises dans le même panier. Comment les distinguer ?
A gauche les praires, à droite les coques et au milieu une palourde
De toute façon elles ne ressemblent pas à mes petits coquillages, si délicats ! Beaucoup trop rustiques ! Merci quand même au site de cuisine Fruits de la mer pour ces photos et les recettes qui vont avec !
Non, mes petits coquillages à moi sont des tellines ! Après bien des recherches et bien des errances, je confirme et voilà comment on les pêche :
Matériel indispensable : un énoooorme 4x4, genre pick-up américain, un chariot métallique avec des roulettes, des cagettes de plastique et sans doute une combinaison en néoprène en fonction de la température de l'eau.
La pêche se fait à marée basse, ou juste remontante. On tire le chariot, à la limite de l'eau et on drague le sable où logent, à quelques centimètres de profondeurs, les tellines.
Bizarrement, l'essentiel de la production part vers l'Espagne et on n'en voit jamais sur les étals des poissonniers. Dommage !
Mais il y a une autre façon de les pêcher, plus artisanale : il suffit, m'a-t-on dit, de fouiller le sable avec les doigts pour ramasser .... juste assez de tellines pour votre appétit ! En tout cas, pas plus d'1,5 kg par jour et par personne !
Vous voulez une recette ? Oh, cela n'a pas l'air difficile mais comme je n'ai pas essayé moi-même, vous pouvez faire un tour sur ce blog ; l'auteur y parle de "sebettes" et de "donax" mais ce sont bien des mêmes coquillages dont il s'agit ! A preuve cette très jolie photo publiée sur le blog de la glaneuse Cécile Conti.
Mais aussi jolies, délicates et sans doute délicieuse qu'elles soient, les tellines continuent de m'intriguer. Ou plutôt leur ramassage. Depuis quand existe-t-il sous forme professionnelle en Bretagne ? S'agit-il d'une espèce contingentée ?
Victoire !
J''ai enfin trouvé la réponse à mes questions sur Doris qui regroupe les Données d'Observations pour la Reconnaissance et l'Identification de la faune et de la flore Subaquatique !! Rien que ça !
Bon, mes tellines ne sont pas des tellines mais des dorax truncullus, leur pêche se pratique en Bretagne depuis les années 80. Elles doivent atteindre au moins 2,5 cm et leur pêche est interdite en Juillet-Août. Maintenant si vous voulez en savoir plus, n'hésiter pas à consulter la fiche consacrée à la ...
Telline, flion, olive de mer, haricot de mer, douceron, blanchette (nord de la France), pignon (Vendée), lagagnon (Landes), tanille, tenille, ou encore truille (sud de la France) Aussi appelé « papillon » en raison de la forme des deux valves ouvertes |
Edge shell (GB), Tellina (I), Arsella (toscan), Tallerines (E), Conquilha, Cadelinha (P), Loubya (Tunisien), Tellerina (Catalan), Coquina (Castillan), Naminoko (Japonais) |
Et comme si cela ne suffisait pas, je suis tombée sur cette page du Télégramme, datée du 27 Janvier 2009 rapportant comment un 4x4 de pêcheur s'était fait piéger par l'exutoire de l'étang de Tunvel, photo à l'appui.
La vengeance des tellines !
Et des amoureux des plages désertes ?
Mais non, la plage est assez grande pour tout le monde. Enfin je crois....
23 septembre 2009
A propos d'Elly
Inglorious Basterds, Un Prophète sont d'excellents films et bénéficient d'une aura suffisante dans la presse pour attirer les spectateurs. Il n'est pas certain qu'il en soit de même pour le film d'Ashgar Farhadi et c'est bien dommage car c'est lui aussi un excellent film. Dans un genre bien différent.
Je ne sais pas grand chose d'Ashgar Farhadi si ce n'est qu'il est né à Ispahan en 1972 et que A Propos d'Elly est son quatrième film. Mais je sais ce qu'un réalisateur français aurait fait de ce week-end entre trentenaires au bord de la mer caspienne : un lourd pensum psychogélatineux ! Comme ..... Non, je ne citerai pas de noms, ni de titres ! Alors que le film d'Ashgar Farhadi, scrute et révèle les tensions d'une génération , déchirée entre tradition et modernité puisqu'elle est est née avec la révolution islamiste.
Bien sûr les trentenaires en question sont iraniens ce qui ajoute à l'aspect sociologique une dimension politique bien venue, mais je ne suis pas certaine que l'on ne trouve pas les mêmes failles parmi les jeunes européens. C'est une chose de boire, faire les fous, danser, plaisanter, jouer avec son portable, c'en est une autre de faire face à la tragédie et de prendre ses responsabilités car c'est à ce moment là que resurgissent des comportements, dont on aurait pu penser qu'ils étaient archaïques et donc dépassés.
La caméra d'Ashgar Farhadi est particulièrement habile à rendre la frivolité et l'insouciance de la première partie du film, aussi bien que l'affolement, l'angoisse, la panique qui s'empare de ces jeunes adultes lorsqu'ils s'aperçoivent de la disparition d'Elly.
Une fonction - secondaire mais importante - du film est de servir de documentaire sur la jeunesse iranienne celle-là même qui a manifesté en Juin et se retrouve encore dans les rues aujourd'hui pour exiger de leur gouvernement un peu plus de liberté, un peu plus de justice. Encore faudrait-il ne pas plaquer sur ce film préjugés et clichés comme certains critiques qui croient bon de rappeler qu'en Iran les femmes se baignent tout habillées, alors qu'en l'occurrence, il s'agit de se jeter à l'eau pour sauver un enfant de la noyade et que, dans un réflexe altruiste, ceux qui se jettent à l'eau ne prennent pas le temps de se dévêtir, qu'ils soient hommes ou femmes ! Je sais, c'est mesquin de ma part, mais ce genre d'approximations (et il y en a d'autres) m'exaspère quand il s'agit de soutenir un bon film.
Alors laissez tomber vos journaux habituels et aller lire la critique de Christophe Chabert dans Le Petit Bulletin. L'article paru dans le Monde , avec interview de l'actrice principale n'est pas mal non plus !
Je ne sais pas grand chose d'Ashgar Farhadi si ce n'est qu'il est né à Ispahan en 1972 et que A Propos d'Elly est son quatrième film. Mais je sais ce qu'un réalisateur français aurait fait de ce week-end entre trentenaires au bord de la mer caspienne : un lourd pensum psychogélatineux ! Comme ..... Non, je ne citerai pas de noms, ni de titres ! Alors que le film d'Ashgar Farhadi, scrute et révèle les tensions d'une génération , déchirée entre tradition et modernité puisqu'elle est est née avec la révolution islamiste.
Bien sûr les trentenaires en question sont iraniens ce qui ajoute à l'aspect sociologique une dimension politique bien venue, mais je ne suis pas certaine que l'on ne trouve pas les mêmes failles parmi les jeunes européens. C'est une chose de boire, faire les fous, danser, plaisanter, jouer avec son portable, c'en est une autre de faire face à la tragédie et de prendre ses responsabilités car c'est à ce moment là que resurgissent des comportements, dont on aurait pu penser qu'ils étaient archaïques et donc dépassés.
La caméra d'Ashgar Farhadi est particulièrement habile à rendre la frivolité et l'insouciance de la première partie du film, aussi bien que l'affolement, l'angoisse, la panique qui s'empare de ces jeunes adultes lorsqu'ils s'aperçoivent de la disparition d'Elly.
Une fonction - secondaire mais importante - du film est de servir de documentaire sur la jeunesse iranienne celle-là même qui a manifesté en Juin et se retrouve encore dans les rues aujourd'hui pour exiger de leur gouvernement un peu plus de liberté, un peu plus de justice. Encore faudrait-il ne pas plaquer sur ce film préjugés et clichés comme certains critiques qui croient bon de rappeler qu'en Iran les femmes se baignent tout habillées, alors qu'en l'occurrence, il s'agit de se jeter à l'eau pour sauver un enfant de la noyade et que, dans un réflexe altruiste, ceux qui se jettent à l'eau ne prennent pas le temps de se dévêtir, qu'ils soient hommes ou femmes ! Je sais, c'est mesquin de ma part, mais ce genre d'approximations (et il y en a d'autres) m'exaspère quand il s'agit de soutenir un bon film.
Alors laissez tomber vos journaux habituels et aller lire la critique de Christophe Chabert dans Le Petit Bulletin. L'article paru dans le Monde , avec interview de l'actrice principale n'est pas mal non plus !
22 septembre 2009
Un prophète
J'avais déjà beaucoup aimé les précédents films de Jaques Audiard, Regarde les hommes tomber, Sur mes lèvres, et plus encore De battre mon coeur s'est arrêté. J'attendais donc avec impatience la sortie de son dernier film, Un Prophète et ne suis pas déçue.
Film de prison, Un prophète est avant tout un récit initiatique, ou plutôt, un
"roman de formation". Quand il entre en prison, Alli a tout l'air d'un jeune agneau qu'on mène à l'abattoir. Tombé sous la coupe et la protection (!) d'un truand corse, Alli se tait, exécute les tâches qu'on lui assigne, observe, écoute, apprend comment fonctionne une prison et découvre peu à peu ce dont il est capable. Et ce n'est pas rien !
Le film est évidemment dur, violent - comment ne le serait-il pas ? - et terriblement éclairant sur les conditions de vie pénitentiaire ! On prend un peu ce film comme une claque en pleine gueule mais c'est un grand film. De ceux que l'on n'oublie pas facilement.
Film de prison, Un prophète est avant tout un récit initiatique, ou plutôt, un
"roman de formation". Quand il entre en prison, Alli a tout l'air d'un jeune agneau qu'on mène à l'abattoir. Tombé sous la coupe et la protection (!) d'un truand corse, Alli se tait, exécute les tâches qu'on lui assigne, observe, écoute, apprend comment fonctionne une prison et découvre peu à peu ce dont il est capable. Et ce n'est pas rien !
Le film est évidemment dur, violent - comment ne le serait-il pas ? - et terriblement éclairant sur les conditions de vie pénitentiaire ! On prend un peu ce film comme une claque en pleine gueule mais c'est un grand film. De ceux que l'on n'oublie pas facilement.
21 septembre 2009
Pour en finir avec les libertins !
- En finir ? Vraiment ? Tu as de drôles d'expressions ! Je croyais que tu les aimais bien ...
- Mais non ! Mais oui !
- Ben, c'est oui ou c'est non ?
- C'est oui, je les aime bien. C'est non, je ne veux certainement pas les liquider ni les exterminer, loin de là ! J'ai juste envie d'avancer, de passer à autre chose. Et tu me réclamais des "classiques", vraiment "classiques". Alors voilà ! Molière, ça te va ?
- L'auteur du Bourgeois Gentilhomme, de l'Avare, du Malade imaginaire ?
- Et surtout de Tartuffe, du Misanthrope et de Dom Juan !
- Le grand Molière ! Et tu le classes parmi les libertins ?
- Libre penseur, certainement ! Athée ? Je n'en jurerai pas car je crois bien que, pour vivre et faire vivre sa troupe, il a dû faire pas mal de compromis et tourner sa plume 7 fois dans son encrier avant d'écrire. Ce qui ne l'a pas empêché d'être à l'occasion censuré et de voir son Tartuffe interdit de représentation. Mais il s'est bien vengé, car, pour donner du boulot à ses comédiens - tu n'oublies pas qu'il était directeur de théâtre - il profite de cet arrêt forcé pour écrire et mettre en scène Dom Juan. Et Dom Juan lui est libertin. Dans tous les sens du terme.
- Liberté sexuelle et ...
- Liberté morale et intellectuelle. Ou plutôt sa liberté intellectuelle le pousse à remettre en question la morale, en l'occurrence les moeurs de ses contemporains.
- Ce n'est pas ce que fait Molière dans toutes ses pièces ?
- Si, mais là, il pousse le bouchon un peu plus loin. Ce sont tous les verrous de la société qu'il fait sauter : la famille, le travail, l'argent, la religion ! Ce "méchant homme" ne respecte rien, ni son père, ni son épouse Elvire, ni ceux qui sont contraints de travailler pour vivre...
- Tu parles de M. Dimanche, son créancier ?
- Tu ne trouves pas que c'est une des scènes les plus cruelles ?
- Et les plus drôles aussi !
- Et voilà ! Avec Molière, on rit de ce qui devrait nous consterner ! Ce qui donne raison une fois de plus à Musset.
- A Musset ?
- Oui, tu sais bien, le grand poète romantique, l'amant de Goerge Sand, l'auteur de Lorenzaccio... Celui qui écrit tout un poème pour parler du théâtre de Molière :
"J'étais seul, l'autre soir, au Théâtre-Français,
- Pleurer est peut-être excessif, non ?
- Pas pour un romantique comme Musset qui a passé sa vie à pleurer (et à aimer ses larmes ! )
Toujours est-il qu'il y a dans les pièces de Molière et en particulier dans Dom Juan bien des vérités qui dérangent. Et qui auraient dû faire réfléchir ceux-là mêmes qui applaudissaient la pièce.
- Qui auraient dû ? Au passé ?
- Qui auraient dû et qui devraient. Le théâtre de Molière est universel bien sûr, et ce qu'il dit est valable en tous lieux et en tous temps. La scène avec les deux paysannes, avec Monsieur Dimanche ? mépris des grands pour les petits, des riches pour les pauvres. La scène avec Elvire, avec son père ? mépris encore et hypocrisie.
- Mais je croyais qu'avec Tartuffe Molière avait jeté tous son venin contre les hypocrites. Et que c'est la raison pour laquelle la pièce avait été interdite.
- Effectivement ! Alors, au lieu d'attaquer de front l'hypocrisie religieuse, il s'en prend à l'hypocrisie en général, principal outil de la réussite sociale comme le montre la scène entre Dom Juan et son père, tout en mettant l'accent sur le comique qui dans certaines scènes relève de la farce.
- Et la religion dans tout ça ?
- C'est sur ce point que Molière est grandiose : Dom Juan n'a pas affaire à la religion directement mais à la superstition, à la crédulité de son valet qu'il est facile de railler. Sganarelle est un raisonneur qui raisonne mal, Dom Juan est un rationaliste : "Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit." Ensuite Dom Juan n'a pas affaire à Dieu directement mais au Commandeur, une statue de marbre, un spectre supposé incarner la vengeance humaine autant que la justice divine. Confrontée à la "surprenante merveille de cette statue mouvante et parlante", Dom Juan ne s'émeut en rien : "Il y a bien quelque chose là dedans que je ne comprends pas; mais quoi que ce puisse être, cela n'est pas capable ni de convaincre mon esprit, ni d'ébranler mon âme". Ce n'est pas tout à fait une profession d'athéïsme, mais certainement d'agnosticisme.
- Ag-nos-ti-cisme ?
- Les agnostiques considèrent que ce qui ne relève pas du domaine de l'expérience est inconnaissable. Autrement dit, comme ils ne peuvent ni prouver que Dieu existe, ni prouver qu'il n'existe pas, ils s'abstiennent de prendre position.
- Comme ceux qui ne vont pas voter.
- Mmmmh... si tu veux.... au moins les agnostiques s'abstiennent de taper sur leurs voisins pour essayer de les convaincre, et de les trucider quand ils ne se laissent pas convaincre.
- Tu as une de ces façon de concevoir la religion ! Un peu brutale non ?
- Quoi ? Qu'est-ce qui est "brutale" ? Ma conception ou la religion ?
- Bon, laisse tomber !
-
- Alors Dom Juan ?
-
- Allez !
- Et bien il est foudroyé !
- Puni donc.
- Non, juste foudroyé, comme Prométhée. Regarde : avant dernière scène, le spectre change de forme, d'abord une femme voilée (Elvire en deuil ? ) et puis le Temps avec sa faux (la mort).
C'est la mort que Dom Juan affronte sans ciller : "Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit."
- La connaissance par l'expérience, c'est ça ?
- Oui et la dernière scène :
- Mais non ! Mais oui !
- Ben, c'est oui ou c'est non ?
- C'est oui, je les aime bien. C'est non, je ne veux certainement pas les liquider ni les exterminer, loin de là ! J'ai juste envie d'avancer, de passer à autre chose. Et tu me réclamais des "classiques", vraiment "classiques". Alors voilà ! Molière, ça te va ?
- L'auteur du Bourgeois Gentilhomme, de l'Avare, du Malade imaginaire ?
- Et surtout de Tartuffe, du Misanthrope et de Dom Juan !
- Le grand Molière ! Et tu le classes parmi les libertins ?
- Libre penseur, certainement ! Athée ? Je n'en jurerai pas car je crois bien que, pour vivre et faire vivre sa troupe, il a dû faire pas mal de compromis et tourner sa plume 7 fois dans son encrier avant d'écrire. Ce qui ne l'a pas empêché d'être à l'occasion censuré et de voir son Tartuffe interdit de représentation. Mais il s'est bien vengé, car, pour donner du boulot à ses comédiens - tu n'oublies pas qu'il était directeur de théâtre - il profite de cet arrêt forcé pour écrire et mettre en scène Dom Juan. Et Dom Juan lui est libertin. Dans tous les sens du terme.
- Liberté sexuelle et ...
- Liberté morale et intellectuelle. Ou plutôt sa liberté intellectuelle le pousse à remettre en question la morale, en l'occurrence les moeurs de ses contemporains.
- Ce n'est pas ce que fait Molière dans toutes ses pièces ?
- Si, mais là, il pousse le bouchon un peu plus loin. Ce sont tous les verrous de la société qu'il fait sauter : la famille, le travail, l'argent, la religion ! Ce "méchant homme" ne respecte rien, ni son père, ni son épouse Elvire, ni ceux qui sont contraints de travailler pour vivre...
- Tu parles de M. Dimanche, son créancier ?
- Tu ne trouves pas que c'est une des scènes les plus cruelles ?
- Et les plus drôles aussi !
- Et voilà ! Avec Molière, on rit de ce qui devrait nous consterner ! Ce qui donne raison une fois de plus à Musset.
- A Musset ?
- Oui, tu sais bien, le grand poète romantique, l'amant de Goerge Sand, l'auteur de Lorenzaccio... Celui qui écrit tout un poème pour parler du théâtre de Molière :
"J'étais seul, l'autre soir, au Théâtre-Français,
Ou presque seul; l'auteur n'avait pas grand succès.
Ce n'était que Molière [...]
Quel grand et vrai savoir des choses de ce monde,
Quelle mâle gaîté, si triste et si profonde
Que, lorsqu'on vient d'en rire, on devrait en pleurer. "
Ce n'était que Molière [...]
Quel grand et vrai savoir des choses de ce monde,
Quelle mâle gaîté, si triste et si profonde
Que, lorsqu'on vient d'en rire, on devrait en pleurer. "
- Pleurer est peut-être excessif, non ?
- Pas pour un romantique comme Musset qui a passé sa vie à pleurer (et à aimer ses larmes ! )
Toujours est-il qu'il y a dans les pièces de Molière et en particulier dans Dom Juan bien des vérités qui dérangent. Et qui auraient dû faire réfléchir ceux-là mêmes qui applaudissaient la pièce.
- Qui auraient dû ? Au passé ?
- Qui auraient dû et qui devraient. Le théâtre de Molière est universel bien sûr, et ce qu'il dit est valable en tous lieux et en tous temps. La scène avec les deux paysannes, avec Monsieur Dimanche ? mépris des grands pour les petits, des riches pour les pauvres. La scène avec Elvire, avec son père ? mépris encore et hypocrisie.
- Mais je croyais qu'avec Tartuffe Molière avait jeté tous son venin contre les hypocrites. Et que c'est la raison pour laquelle la pièce avait été interdite.
- Effectivement ! Alors, au lieu d'attaquer de front l'hypocrisie religieuse, il s'en prend à l'hypocrisie en général, principal outil de la réussite sociale comme le montre la scène entre Dom Juan et son père, tout en mettant l'accent sur le comique qui dans certaines scènes relève de la farce.
- Et la religion dans tout ça ?
- C'est sur ce point que Molière est grandiose : Dom Juan n'a pas affaire à la religion directement mais à la superstition, à la crédulité de son valet qu'il est facile de railler. Sganarelle est un raisonneur qui raisonne mal, Dom Juan est un rationaliste : "Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit." Ensuite Dom Juan n'a pas affaire à Dieu directement mais au Commandeur, une statue de marbre, un spectre supposé incarner la vengeance humaine autant que la justice divine. Confrontée à la "surprenante merveille de cette statue mouvante et parlante", Dom Juan ne s'émeut en rien : "Il y a bien quelque chose là dedans que je ne comprends pas; mais quoi que ce puisse être, cela n'est pas capable ni de convaincre mon esprit, ni d'ébranler mon âme". Ce n'est pas tout à fait une profession d'athéïsme, mais certainement d'agnosticisme.
- Ag-nos-ti-cisme ?
- Les agnostiques considèrent que ce qui ne relève pas du domaine de l'expérience est inconnaissable. Autrement dit, comme ils ne peuvent ni prouver que Dieu existe, ni prouver qu'il n'existe pas, ils s'abstiennent de prendre position.
- Comme ceux qui ne vont pas voter.
- Mmmmh... si tu veux.... au moins les agnostiques s'abstiennent de taper sur leurs voisins pour essayer de les convaincre, et de les trucider quand ils ne se laissent pas convaincre.
- Tu as une de ces façon de concevoir la religion ! Un peu brutale non ?
- Quoi ? Qu'est-ce qui est "brutale" ? Ma conception ou la religion ?
- Bon, laisse tomber !
-
- Alors Dom Juan ?
-
- Allez !
- Et bien il est foudroyé !
- Puni donc.
- Non, juste foudroyé, comme Prométhée. Regarde : avant dernière scène, le spectre change de forme, d'abord une femme voilée (Elvire en deuil ? ) et puis le Temps avec sa faux (la mort).
C'est la mort que Dom Juan affronte sans ciller : "Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit."
- La connaissance par l'expérience, c'est ça ?
- Oui et la dernière scène :
La Statue
- Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi.
Dom Juan
- Oui. Où faut-il aller ?
La Statue
-Donnez-moi la main
Dom Juan
- La voilà
- Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi.
Dom Juan
- Oui. Où faut-il aller ?
La Statue
-Donnez-moi la main
Dom Juan
- La voilà
Tu as vu ? Pas un frémissement ! Pas un tremblement ! Tu te souviens ? Dans le Prométhée enchaÎné d'Eschyle, c'est exactement la même chose.
- Prométhée, Dom Juan, même combat !
- Absolument ! D'ailleurs on n'a pas parlé de la scène avec le pauvre...
- Celle où Dom Juan veut donner un louis d'or au pauvre à condition qu'il jure...
- Mais le pauvre refuse
- Et Dom Juan finit par lui donner la pièce en disant : "Va, va, je te le donne pour l'amour de l'humanité. L'humanité ! Comme Prométhée te dis-je.
- Pour moi c'est plutôt du dépit de la part de Dom Juan.
- N'empêche que dans la scène suivant il se porte spontanément au secours d'un homme attaqué par trois autres ! Humanité encore. Le service des hommes plutôt que celui de Dieu.
- Tu n'exagères pas un peu. Parce que des hommes, il ne fait pas si grand cas, et des femmes encore moins.
- C'est vrai, tu as raison.... Mais avoue que le Dom Juan de Molière est un personnage suffisamment complexe pour qu'on ait envie de relire ou de revoir la pièce. Et que le libertinage morale du personnage se double bien d'un libertinage intellectuel.
- Mettons ... d'un soupçon de libertinage
- Ce qui, pour l'époque, était déjà pas mal !
- Prométhée, Dom Juan, même combat !
- Absolument ! D'ailleurs on n'a pas parlé de la scène avec le pauvre...
- Celle où Dom Juan veut donner un louis d'or au pauvre à condition qu'il jure...
- Mais le pauvre refuse
- Et Dom Juan finit par lui donner la pièce en disant : "Va, va, je te le donne pour l'amour de l'humanité. L'humanité ! Comme Prométhée te dis-je.
- Pour moi c'est plutôt du dépit de la part de Dom Juan.
- N'empêche que dans la scène suivant il se porte spontanément au secours d'un homme attaqué par trois autres ! Humanité encore. Le service des hommes plutôt que celui de Dieu.
- Tu n'exagères pas un peu. Parce que des hommes, il ne fait pas si grand cas, et des femmes encore moins.
- C'est vrai, tu as raison.... Mais avoue que le Dom Juan de Molière est un personnage suffisamment complexe pour qu'on ait envie de relire ou de revoir la pièce. Et que le libertinage morale du personnage se double bien d'un libertinage intellectuel.
- Mettons ... d'un soupçon de libertinage
- Ce qui, pour l'époque, était déjà pas mal !
20 septembre 2009
Sur la plage, immense et vide ...
19 septembre 2009
Au risque du naufrage
[...]
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages
Sont-ils de ceux qu'un vent penche sur les naufrages
Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau;
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages
Sont-ils de ceux qu'un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertile îlots ...
Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau;
18 septembre 2009
17 septembre 2009
16 septembre 2009
15 septembre 2009
Qui rêve de départs
14 septembre 2009
Un marin peut-être ...
13 septembre 2009
Un homme passe ....
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