Encore faut-il que quelqu'un vous ait guidé vers ce film, vous ai donné envie de le voir.
Difficile de résister à l'article qui suit dont l'enthousiasme est non seulement communicatif mais parfaitement justifié.
Ceci dit, il vaut mieux avoir l'estomac bien accroché pour voir le film. Et accepter de passer sur la caricature du Kansas "rural, primitif, et inhospitalier" ! Les deux derniers qualificatifs sont parfaitement exacts.... tant qu'il s'agit du film. Mais je sais d'expérience que les habitants du Kansas ne sont ni primitifs ni hospitaliers.
Comme on fait son Lee...
Petit chef d’oeuvre de cinéma déviant, violent et, osons le mot, romantique des années 70, Prime Cut cache pourtant bien son jeu au premier abord : un réalisateur peu connu (Michael Ritchie), un pitch minimaliste (un gangster de Chicago envoyé par ses employeurs au Kansas pour recouvrer une dette)… Pas de quoi s’affoler a priori. Mais rapidement, tout se trouble. Un cadavre dénudé dans une usine de saucisses, des adolescentes nues et droguées dans les boxes en paille d’une foire au bétail, une kermesse rurale qui vire au jeu de massacre, une traque au fugitif en moissonneuse-batteuse… On sent très vite que tout, absolument tout, peut arriver, et pourtant, on ne décroche pas du scénario une seconde, on s’attache à chacun des personnages comme s’il était doté d’une existence propre, on se laisse prendre aux tripes par l’atmosphère déliquescente de ce Kansas rural et primitif inhospitalier. Et c’est cette dualité permanente qui fait toute la force de ce film noir empathique : le ton est désabusé mais pas désespéré, les protagonistes archétypaux mais non dénués de nuance, la mise en scène d’une belle fluidité mais jamais ostentatoire, le rythme enlevé mais aucune scène expédiée… Porté qui plus est par un casting quatre étoiles (Lee Marvin en dur à cuire, Gene Hackman en redneck dégénéré, Angel Tompkins en femme fatale et la toute jeune Sissy Spacek en ingénue troublante), Prime Cut est l’exemple même du film qui ne relâche jamais la pression. Et quand Lee Marvin recharge sa mitraillette sous un ciel zébré d’éclair dans l’attente de l’affrontement final, on réalise que le bonheur pur au cinéma tient parfois à pas grand-chose.
Article publié le Lundi 20 février 2012 Petit Bulletin n°832 sous la plume de Damien Grimbert
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