S'il y a quelque chose dont Eduardo Fernando Varela ne manque pas c'est bien d'imagination. Et son imagination s'applique aussi bien aux paysages, qu'aux situations et bien entendu aux personnages. Alors, dès que l'on ouvre les pages de son nouveau roman, on devine que l'on part pour une grande aventure, que l'on sera emporté par un souffle romanesque devenu bien rare dans la littérature d'aujourd'hui trop souvent confiné entre les bornes étroites de la réalité ou pire de "l'auto-fiction "
Des paysages d'abord, où même les fous de montagne peineraient à vivre car l'oxygène y est raréfié, la végétation a cessé de pousser : roches et volcans, pluies de météorites, orages magnétiques, les paysages de Roca Pelada sont aussi fascinants qu'effrayants.
Ils sont aussi constamment scrutés à la jumelle par Costa responsable de la garnison qui garde la frontière. Car en ces terres oubliées, aussi absurde que cela puisse paraître il y a bien une frontière, gardée par deux détachements armés qui s'observent à distance. Et le roman de Varela dérive alors vers le domaine de l'absurde, de la bêtise humaine et de la farce accessoirement. On pense inévitablement au Désert des Tartares de Buzzati, au Rivage des Syrtes de Gracq, mais lorsque, de l'autre côté de la frontière le lieutenant Gaitàn est remplacé par Vera Bower, une belle femme à la chevelure flamboyante, le roman prend une autre direction. A vrai dire, l'intrigue du roman ressemble un peu à ce train dont on entend le roulement des jours voire des semaines à l'avance, que l'on croit apercevoir puis qui disparaît au regard pour repartir dans une autre direction et finit par arriver lorsqu'on ne l'attendait plus : chapitre après chapitre le lecteur est embarqué, chahuté, bousculé, toujours surpris, toujours sur le qui vive, toujours à se demander où cela le mènera. Avec Eduardo Fernando Varela, lire devient une aventure. Hors du commun mais pourtant, si on y réfléchit, terriblement humaine.