06 janvier 2023

Jonathan Franzen, Crossroads

Bizarre cette succession de gros pavés moi qui n'aime tant que les petits livres.  Mais si Lincoln Highway  se lisait à toute allure, il n'en vas pas de même pour Crossroads et ce n'est pas le nombre de pages  (800/640) qui fait la différence, non, c'est plutôt l'intention littéraire qui différencie les deux livres. 

Dans Crossroads Jonathan Franzen fait le portrait d'une famille dont les dysfonctions sont je crois à l'image des Etats-Unis. La famille Hildebrandt vit dans une banlieue cossue de Chicago. Russ, le père est pasteur et dirige, avec un collègue plus jeune et plus "branché" que lui, une association pour les jeunes où l'on incite chacun à être aussi sincère et honnête que possible ce qui autorise tous les déballages. A la rivalité professionnelle, s'ajoute pour Russ l'ennui conjugal et la tentation d'aller voir ailleurs. L'adultère, le grand épouvantail américain! Marion sa femme s'est en effet un peu laissée aller depuis la naissance de ses quatre enfants, qui sont comme leurs parents tiraillés par des tentations contraires. 

L'auteur situe son roman précisément au début des années 70, lorsque la guerre du Vietnam soulève de plus en plus de réprobation, quand la jeunesse se rebelle, happée par les possibilités nouvelles que leur offre la liberté sexuelle et la drogue. En fait c'est le moment exact où le corset puritain est en train de craquer. Crossroads ou la croisée des chemins. C'est bien cette difficulté à choisir que Franzen met en scène : suivre ses pulsions ou y résister, s'affranchir des règles ou s'y soumettre. L'écrivain brasse beaucoup de sujets - y compris celui de la question indienne, plutôt bien vu - mais surtout il scrute chacun de ses personnages avec une minutie qui explique le nombre de pages. Chaque pensée, chaque émotion est pour ainsi dire décortiquée, si bien que le lecteur a parfois l'impression d'être dans le cabinet d'un psy ou au confessionnal. De toute évidence, l'empathie n'est pas la corde que l'écrivain a l'intention de jouer. Mais celui de l'analyse sans indulgence ni pitié des travers de la société américaine. 

Crossroads est un très bon livre. Très bon vraiment, et un peu trop gros quand même....

 



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