Au bord est un court roman, assez gonflé pour un jeune auteur comme Angelo Tijssens, plus connu jusqu'à présent comme scénariste que comme romancier. Il arrive pourtant à maintenir adroitement son récit dans un juste équilibre entre crudité et pudeur. Car les mots, les gestes peuvent être crus en effet quand il s'agit de parler de sexualité. Pourquoi masquer la réalité ? En revanche quand il s'agit d'exprimer des émotions, des sentiments, les mots sont plus difficiles à trouver. Comment dire ce que l'on est pas sûr de ressentir, comment laisser entendre, suggérer ou au contraire masquer ce qui pourrait passer pour un aveu, une attente exagérée; comment distinguer entre sincérité et cynisme, comment s'avancer dans une relation sans pour autant se lier, s'attacher. Comment aimer quand on n'a pas été aimé ?
Je ne crois pas avoir lu beaucoup de romans d'amour homosexuel, le sujet est peut-être plus facilement abordé au cinéma. Mais celui-ci m'a paru assez réussi. Parce que à la fois vrai et touchant. Cynique et tendre. Mais le cynisme n'est-il pas le plus souvent une façon de dissimuler un besoin désespéré d'affection. Le roman d'Angelo Tijssens m'a paru proche du court métrage de Pedro Almadovar sorti il y a peu : dans Strange way of life comme dans Au bord, il s'agit de deux hommes qui, adolescents ont vécu une passion irrésistible l'un pour l'autre et qui se retrouvent, des années après. Le lien est toujours là, mais la raison désormais dispute sa place à la passion.