Ce serait vraiment dommage de passer à côté d'un écrivain comme James Mc Bride et de son dernier livre, L'Epicerie du paradis sur terre, parce que James Mc Bride manipule comme personne la matière romanesque : en l'occurrence un lieu, Chicken Hill en Pennsylvanie (état hautement symbolique puisque c'est à Philadelphie qu'a été signée la constitution américaine), une époque, les années 30, années de grande misère en particulier pour les populations noires (sorties de l'esclavage mais pas de la ségrégation) et les juifs fraîchement immigrés, attachées à leurs traditions européennes et pas tout à fait américains encore. Pour faire le lien entre ces deux groupes sociaux, il y a Moshe qui a fait fortune en organisant des concerts, et surtout sa femme, Chona, qui, malgré leur récent enrichissement s'obstine à tenir l'épicerie de leurs débuts parce que cela lui permet de venir en aide à beaucoup de gens.
Le roman s'ouvre sur la découverte d'ossements au fond d'un puits, mais avant d'en connaître les raisons, il faut remonter le temps et faire revivre tout un monde depuis disparu. Parce que, en dehors du pourquoi et comment et la résolution de l'énigme policière - que le lecteur finit presque par oublier - ce qui intéresse Mc Bride c'est de montrer une foule de personnages, tous représentatifs d'une certaine Amérique et de divertir le lecteur qui ne boude pas son plaisir. L'écrivain sait comme personne créer des personnages, un peu fantasques mais parfaitement crédibles, des situations désopilantes et pourtant plausibles. Il brode, il invente, il imagine, il s'enflamme, mais la réalité n'est jamais loin parce que ce qui le pousse à écrire c'est son humanisme, qui a sans doute beaucoup à voir avec sa propre identité.
"L'écriture de James McBride se construit au croisement des racines polonaises, afro-américaines, juives et chrétiennes de l'auteur, dont l'œuvre touche ainsi à l'universel. Ses ouvrages ne cessent d'explorer les fondations d'une Amérique qui n'a pas fini d'évoluer." Gallmeister
Lire L'Epicerie du Paradis sur terre c'est se donner la chance de retrouver non pas une Amérique idéale qui n'a jamais existé, mais une Amérique moins déroutante, moins effrayante que celle d'aujourd'hui.
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