12 août 2025

Cédric Gras, Les Routes de la soif

 

Hasard heureux des lectures : il n'y a pas longtemps je remontais le Danube depuis son embouchure jusqu'à sa source (Emmanuel Ruben); j'ai ensuite longé la frontière américano-mexicaine d'Ouest en Est (Sylvain Prudhomme), et me voici en train de remonter l'Amou-Daria depuis la mer d'Aral, jusqu'au glacier Fedchentko, sa source supposée. L'occasion de traverser ou de longer plusieurs pays d'Asie centrale, Ouzbetiskan, Turkmenistan, Tadjikistan. L'auteur des Routes de la soif un géographe, familier de ces régions, se désole et s'inquiète de l'assèchement de la mer d'Aral qui s'explique en partie par la culture intensive du coton imposée par les soviétiques du temps de l'URSS. Mais ce n'est pas la seule explication parce que les pays riverains ont sans vergogne creusés des canaux pour détourner l'eau du fleuve pour leurs propres besoins. 

 Les Routes de la soif est bien un récit de voyage, mais c'est aussi un enquête dont les conclusions n'ont rien de réjouissant.  Ce qui en revanche m'a amusé, c'est que l'auteur, un inconditionnel de la montagne et des hauts sommets, qui a  déjà consacré un livre aux Alpinistes de Staline et un autre aux Alpinistes de Mao, ne se sent vraiment pas à l'aise dans les plaines désertiques de l'Ouzbekistan et ne cache pas son ennui devant, les surfaces horizontales,  les horizons plats, la monotonie des couleurs, pour retrouver tout son enthousiasme dès qu'apparaissent les sommets du Pamir ! Le monde pour lui se doit d'être vertical !

Je ne sais pas quelle seront mes prochaines lectures, mais ces trois voyages m'ont déjà offert de beaux dépaysements. Et pas mal d'informations sur l'état du monde parce que leurs auteurs n'ont pas fait du voyage une fin en soi, mais un moyen pour mieux comprendre "l'usage du monde". 

 

08 août 2025

Sylvain Prudhomme, Coyote

Pas un roman, pas un reportage non plus, non, Coyote est un livre qui n'entre dans aucune case et c'est ce qui en fait tout l'intérêt. Sylvain Prudhomme, qui a déjà une dizaine de romans à son actif, décide de faire du stop le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique - au plus près du fameux mur d'acier et de barbelés -  depuis Tijuana (Californie) jusqu'à Brownsville (Texas), du Pacifique au Golfe du Mexique. Un peu plus de 2500 km au final, avec tous les aléas de l'auto-stop. Inutile de dire qu'il poireaute parfois longtemps avant d'être pris par un conducteur, mexicain ou américain d'origine mexicaine le plus souvent, plus rarement par un Blanc et encore plus rarement par une femme.  

Coyotte n'est pas à proprement parler un récit de voyage,  car ce ne sont pas les paysages qui motivent l'écrivain, mais les gens. En effet, Sylvain Prudhomme s'est efforcé de transcrire au plus près les conversations de ceux qui l'ont pris en charge, dans leur voiture, leur pick-up, leur camion.  Autant de voix, autant de points de vue, autant de vies différentes.  Comme autant d'instantanés mis bout à bout qui finissent par faire le portrait d'une certaine Amérique, pas la plus riche, pas la plus cultivée, pas la plus misérable non plus, ni la plus "dispectable". L'Amérique des frontières.  Et lorsque le conducteur dépose son passager, Sylvain Prudhomme sort son Polaroid pour un portrait, une façon d'authentifier la rencontre. 

Une démarche originale pour un voyage en tout point passionnant, et au final un livre qu'on lit, un peu comme on regarde un kaléidoscope. Certains le trouveront dépaysant, d'autres sans doute y retrouveront leur propre expérience d'une Amérique aimée  ou détestée.  Et comme ni l'auteur ni l'éditeur ne se sont souciés de glisser une carte, en voilà une.  


05 août 2025

Guillaume Bresson

 Le musée de Grenoble présente pour l'été une exposition doublement intéressante. D'abord parce qu'elle permet de découvrir un artiste contemporain, Guillaume Bresson, mais comme ses oeuvres sont placées en regard d'oeuvres "classiques" qui font partie de la collection du musée, le parcours dans les galeries permet de porter un regard neuf sur des tableaux que l'on croyait connaître. Un regard en quelque sorte décapé. 

 

Guillaume Bresson s'inscrit dans une tendance qui est celle du retour à la peinture sur chevalet et au figuratif. Ses techniques, si elles ne sont pas exactement les même, s'inspirent et se rapprochent de celles des artistes du XVIIe ou XVIIIe siècle, jusqu'à la composition même de certains tableaux, mais les scènes qu'il représente, les thèmes qu'il choisit, n'ont rien de religieux; pas de glorification historique non plus; on pourrait sans doute parler de scènes de genre, cette façon de représenter les lieux et les gens ordinaires, mais dans ses tableaux, rien n'est figé. Ce qui domine c'est le mouvement, les affrontements d'individus dans des espaces souvent clos, bétonnés. Des scènes de rues aussi. Une façon de contraindre le spectateur à regarder en face une réalité sociale dont nous détournons trop souvent nos regards. 

 

 Guillaume Bresson utilise beaucoup de couleurs sombres, de gris. Mais dans le portrait de l’activiste LGBT Adam Eli ... il fait un usage spectaculaire d'un violet quasi ...  épiscopal ! 


Et dans la dernière salle, dont les murs ont été repeints en orange pour l'occasion, les tableaux de Bresson  s'accommodent parfaitement avec les oeuvres "minimalistes" de Donald Judd et surtout le Flanders field de Carl André (tellement mieux mis en valeur ici que dans le sous-sol où il était autrefois exposé). 



 
 Le choix des oeuvres exposées est d'une grande cohérence, mais j'avoue avoir une petite préférence pour celle de la première salle, (XIIIe/XVIe siècle), parce qu'on est d'emblée surpris, parce qu'elle est totalement incongrue dans cet environnement, peut-être aussi parce que c'est une des plus claires et des plus énigmatiques. Le chantier, on le retrouvera dans d'autres tableaux, mais les deux hommes ? Des joggeurs, des ouvriers du bâtiment surpris par la pluie ? Que peuvent-ils bien se dire ?  
 

 

Et pour la dernière image, j'avoue tricher un peu : c'est un tout petit angle d'un tableau bien plus grand, mais derrière les poteaux, derrières les rochers.... il y a la mer.  


 Exposition Guillaume Bresson au Musée de Grenoble place Lavalette, jusqu'au 28 Septembre ! 

04 août 2025

Gangs of Taïwan

 

Le film se passe bien à Taïwan, mais la menace chinoise sur Hong Kong est toujours en arrière plan. Une allusion récurrente qui donne au film de Keff, réalisateur américain né à Hong Kong sa dimension politique bien que ce soit avant tout un thriller social. Employé dans un petit restaurant, Zhong-Han le personnage principal participe le soir aux exactions commises par un gang au service d'une mafia locale. Intimidation, menaces, violences, une routine bien établie dont Zhong-Han semble s'accommoder jusqu'au jour où ...  La rencontre avec une jeune fille déterminée, le rachat du restaurant par un promoteur sans scrupule, la nécessité de prendre position, de choisir son clan : tout le film tient sur ce point de bascule d'un individu, vers le bien ou le mal.  En tablant sur le mutisme de  Zhong-Han, le réalisateur contraint son personnage à ne s'exprimer que par les expressions de son visage, par l'image donc et non par la parole et contraint aussi le spectateur à supposer,  à imaginer ce qui se passe dans la tête du personnage. Une vraie trouvaille qui donne toute sa force au film. 

 Réussir un film à dimension psychologique, social et politique sur le tempo d'un thriller, c'est plutôt pas mal pour le premier long métrage ! Mais Keff n'en restera certainement pas là. 

 https://www.semainedelacritique.com/fr/articles/a-propos-de-locust

 

 

03 août 2025

Le rire et le couteau

 3h31, oui c 'est la durée du film, celle devant laquelle on hésite. Mais une fois devant l'écran, le temps ne compte plus, parce que Le rire et le couteau est un film dense qui ne laisse pas indifférent et qui met le spectateur face à ses questionnements. Peut-être un peu trop ? Il y a en effet quelque chose de baroque dans ce film,  une surabondance de couleurs et de mouvements, une accumulation de motifs, jusqu' à l'outrance parfois, une surcharge de bizarreries, une profusion de personnages tous plus hauts en couleurs les uns que les autres,  sauf le jeune ingénieur un peu falot chargé d'étudier l'impact environnemental et social d'un projet d'autoroute. Car c'est là le prétexte trouvé par le réalisateur Pedro Pinho, pour montrer sa vision de l'Afrique ou du moins de la Guinée-Bissau, marquée comme la plupart des pays africains par son histoire coloniale et les enjeux actuels de la décolonisation. 


Je ne suis pas certaine qu'à la fin du film on ait les idées beaucoup plus claires sur le rôle des associations humanitaires ou environnementales, sur les perspectives économiques et politiques de la Guinée-Bissau et de l'Afrique en général, sur les attentes des individus happés malgré eux par le modernisme, mais au moins les questions ont été posées. Et si l'on se sent un peu perplexe à la sortie du cinéma, cela évite de se reposer sur ses certitudes. Le rire et le couteau est sur ce mpoint assez percutant.

02 août 2025

Judith Perrignon, Nous nous parlons d'un lieu où tout est fragile


 

 

Les livres de Judith Perrignon continuent de me séduire par leur intelligence, leur sens de l'humain et la clarté de l'écriture. Son dernier livre fait une fois de plus la preuve de ses qualités, de journaliste au départ et surtout d'écrivaine. 

Rachid est un homme de 88 ans, rencontré à l'occasion d'un atelier d'écriture dans un centre d'hébergement d'urgence. Une vie commencée sous les bombes américaines en Algérie, poursuivie en France, à Marseille, Saint-Etienne, Belfort, Paris ... une ville trimballée à droite et à gauche jusqu'à ce foyer où il a trouvé refuge. Une vie avec des rêves, comme toutes les vies, mais encore plus de déceptions, une vie qu'il faut accepter malgré tout. De cette vie Rachid ne garde que des bribes, mais Judith Perrignon en fait un tout, entre mélancolie et poésie. Une centaine de pages seulement pour une vie qui, sans elle, serait passée inaperçue. Comme tant d'autres.   

27 juillet 2025

Dörte Hansen, Quelque part en mer

 

Quelque part en mer.... au vu de la couverture on s'attendrait presque à un roman animalier, ou tout du moins à une histoire de marins perdus en mer. On pense à Melville peut-être, à Hemingway, ou à tous les récits de navigateur dont on se gave en attendant, à notre tour, de partir en mer....

On ouvre rarement un livre sans avoir une attente, comme une rêverie préliminaire. Et c'est tant mieux si les premières pages nous emmènent loin de ce que l'on avait imaginé.

Le "quelque part en mer" de Dörte Hansen, c'est en fait une île de la mer du Nord, "entre Jutland, Frise et Zélande " mais ce pourrait être Ouessant ou n'importe quelle île battue par la mer et les vents. Et ce dont parle le livre, c'est de la vie des îliens, une vie simple, ordinaire, mais aussi rude et parfois tragique. Il y a quelque chose d'austère dans l'écriture de Dörte Hansen, qui colle parfaitement aux lieux et aux personnages. Quelque part en mer n'est pas un roman à suspense qui multiplie les péripéties, non, plutôt une chronique familiale qui permet d'imaginer la vie sur l'île. Un famille dont la vie tourne forcément autour de la mer, qu'on s'en nourrisse, qu'on s'en accommode ou qu'on la haïsse.  Malgré les apparences, ce n'est pas un roman d'autrefois, mais bien un roman d'aujourd'hui où les estivants d'hier ne sont plus désormais que des touristes, parce que le ferry qui relie l'île au continent permet de partir et de revenir, et que l'île n'est plus tout à fait un lieu clos coupé du monde, un enfermement, mais un choix. 

Quelque part en mer est un roman suffisamment dépaysant pour donner envie d'aller voir à quoi ressemblent ces îles et ces plages de la mer du Nord.  

22 juillet 2025

Emmanuel Ruben, Sur la route du Danube

C'est un très long voyage, plus de 2000 km qu'Emmanuel Ruben et Vlad ont entrepris pour remonter le Danube, depuis son embouchure jusqu'à sa source, "depuis la mer noire jusqu'à la forêt noire". A vélo. 

 

Un récit de voyage en tous points passionnant parce que son auteur, bien que cycliste inconditionnel ne fait pas de ce voyage un exploit sportif, bien au contraire, on le voit étape après étape peiner, suer, souffler, s'épuiser. Non, le vélo est juste un moyen de transport qui lui permet de rester au plus près du fleuve et surtout au plus près des gens. De préférence les "petites gens" des "petites villes", parfois juste des villages, des hameaux oubliés de l'Europe. Des gens avec qui on partagent une bière, une blague, une confidence.  Parce que le vrai sujet du livre, c'est moins le Danube que l'Europe; pour Emmanuel et son comparse, le fleuve n'est au fond qu'un prétexte à une traversée de l'Europe : Roumanie, Bulgarie, Serbie, Croatie, Hongrie, Autriche, Allemagne ...Sept pays traversés, plus Odessa et le Sud de l'Ukraine car il fallait bien atterrir quelque part pour commencer le voyage. 

 Géographe de formation, Ruben se lance dans une entreprise d'arpentage qui l'amène à parler des paysages, de leur formation, des reliefs, de la végétation, et plus encore des populations, de leur installation dans le paysage et donc de leur histoire. Il ne manque aucune église, aucun musée, si modeste soit-il, aucun monument, et surtout il parle et fait parler les gens qu'il rencontre. Car l'histoire et la géographie comptent moins finalement que les hommes et les femmes qui en subissent les aléas. 

De page en page et de chapitre en chapitre, on s'étonne de tant d'érudition - jamais pédante - et de l'aisance avec laquelle l'auteur transcrit ses observations, ses réflexions pour mieux faire pénétrer le lecteur au coeur de cette Europe qui deviendra peut-être un jour une véritable communauté européenne, mais ne l'est pas encore. Et qui en attendant, se hérisse de plus en plus de barrières et de barbelés. Au fil du voyage, l'empathie de l'auteur pour les pays traversés au début du voyage, fait place à une ironie parfois mordante à partir du moment où il traverse les trois derniers pays de son périple : Hongrie; Autriche et le Sud de l'Allemagne. Autant il était indulgent, et même compatissant vis à vis des populations des Balkans, autant on sens son poil se hérisser dès qu'il aborde l'Europe que l'on dit centrale. Histoire d'affinités sans doute avec les plus humbles, avec ceux qui n'ont rien. Du côté des dominés plus que des dominants, surtout quand ils s'enferment dans leurs certitudes. 

La route du Danube que nous invite à suivre Emmanuel Ruben est finalement aussi politique qu' historique ou géographique ou plus exactement mettons que la géographie et l'histoire de la Danubie expliquent en grande partie les orientations politiques des pays qui longent le fleuve. Tout ça depuis la selle d'un vélo ! 

 

21 juillet 2025

Eddigton

 Ce doit être le Stetson sur la tête de Joachim Phoenix qui pousse les critiques à parler de western. Mais non, Eddington n'est pas un western, pas vraiment un polar non plus, juste un film d'un genre pas très défini, qui fait le tour de tous les problèmes qui menacent la démocratie américaine. Cela commence par des disputes à propos du port du masque et des vaccins, complotistes et illuminés à l'affut, cela continue avec le racisme endémique, mais de plus en plus insupportable, les manifestations et l'éveil à la conscience politique des "blancs privilégiés", les droits tribaux constamment bafoués, les violences sexuelles et pour aggraver le tout, l'omniprésence des téléphones qui permettent à chacun de poster n'importe quoi - mais toujours hors contexte - sur les réseaux sociaux... l'énumération n'en finit pas, mais se résume en deux mots "fanatisme" et surtout "bêtise". Voilà pourquoi le film joue en permanence sur l'excès, le manque de retenue, tourne parfois au grand guignol et se termine dans une apothéose de violence. 

Je n'ai vu aucun des précédents films de Ari Aster, connu pour jouer sur l'horreur et le fantastique. Mais ce qu'il donne à voir de l'état de l'Amérique m'a paru terriblement réaliste, d'autant qu'il le situe non pas dans une des villes comme Los Angeles ou Chicago régulièrement traversées par des accès de violence, mais dans une petite ville, certes imaginaire, du Nouveau Mexique. Une petite ville tranquille où d'habitude il ne se passe rien. Mais là, d'un seul coup, tout dérape et il n'y a pas de retour en arrière possible. Le cauchemar des années à venir ? Pour Eddington, Ari Aster a peut-être renoncé au fantastique mais certainement pas à l'horreur : celle d'une société totalement chaotique, sans repères communs, où chacun est persuadé de tenir la vérité et s'enferme dans une bulle paranoïaque, où plus personne n'essaye de comprendre personne et finit par croire que seules les armes résoudront le problème. "Stop the world, I want to get out... " Mais ouf, ce n'est que du cinéma n'est -ce pas ?  Ou bien ....

13 jours, 13 nuits

Enfin un film d'action ! En tout cas un film qui n'est pas centré sur les problèmes d'un seul individu, mais carrément sur les malheurs du monde, puisqu'il s'agit de l'évacuation de l'ambassade de France de Kaboul en août 2021. 

13 jours, 13 nuits c'est long quand vous avez la charge de filtrer et d'évacuer au plus vite des milliers de personnes qui ont envahi le territoire de l'ambassade dans l'espoir de fuir le régime des talibans. Mais 13 jours, 13 nuits c'est aussi très court parce qu'il y a tant à faire, tant à organiser, tant à prévoir et que l'Elysée tarde à répondre, tarde à donner le feu vert alors que la situation s'aggrave de jour en jour. 

Rien de neuf sous le soleil : Saïgon, Phnom Pen, Téhéran ... les films, les livres, mais surtout les reportages nous ont hélas habitués à cette débandade frénétique de tous ceux qui essayent de fuir un pays parce qu'ils savent que rester c'est à coup sûr la prison et sans doute la mort. Et bien que le déroulé de l'action soit connu ou au moins prévisible, Martin Bourboulon, le réalisateur parvient à maintenir une tension constante dans son film qui n'a rien à voir avec le suspense d'un film d'action ordinaire, mais tout à voir avec la tragédie en train de se dérouler sous nos yeux. Pour les hommes chargés de l'évacuation il faut parer à tous les dangers, rassurer mais aussi bloquer une foule en panique, mesurer les risques, mais aller au-delà quand même, être prêt à utiliser les armes, mais négocier jusqu'au bout. Le succès de l'opération repose sur le Commandant Mohamed Biba,  à 15 jours de sa retraite, mais en choisissant de mettre en avant un certain nombre de personnages secondaires, le cinéaste évite l'écueil de l'hagiographie. On sort du film, un peu secoué, parce que l'évacuation de l'ambassade de Kaboul,  ce n'est pas seulement du cinéma, c'est tout simplement de l'histoire. Une histoire très récente. 


 

16 juillet 2025

Loveable

 Encore un film norvégien, encore une histoire d'amour, encore une histoire de couple ... c'est l'été qui veut cela ?

Le film de Lilja Ingolfsdottir fait irrésistiblement penser aux films de Bergman puisqu'il s'agit d'une plongée profonde dans la psychée d'une personne et dans la dissolution progressive et irréversible d'une histoire d'amour qui avait commencée comme une relation fusionnelle. Pourquoi pas. Le film est plutôt bien fait, pas statique du tout; plutôt bien joué  par les personnages principaux autant que par les personnages secondaires. Oui mais .... dans cette histoire, c'est surtout au comportement de la femme que l'on s'intéresse, à ses exigences, ses doutes, son manque de confiance, sa fragilité, pour expliquer l'échec du couple. Coupable, forcément coupable ! Ben non ! Il faudrait pour équilibrer cette histoire un deuxième film, avec un point de vue aussi empathique sur les erreurs et les insuffisances du mari. 


 

14 juillet 2025

La Venue de l'avenir

 Une remontée généalogique entre 2025 et 1885. Autres temps autres moeurs, évidemment.  Avec de surcroît un alibi culturel (la peinture, la photographie) et touristique (Paris, ville lumière, la Normandie, le jardin de Giverny, ... ), sans oublier la nostalgie (?) des maisons closes. Décorateurs et costumiers ont dû se régaler. Le film de Klapish,  un peu trop fourre-tout et pas vraiment subtil, ne m'a pas emballée. Mais par temps de canicule, le salles de cinéma sont des havres de fraîcheur ! 


 

13 juillet 2025

La trilogie d'Oslo : Rêves

Rêves est le premier volet de la trilogie d'Oslo,  un projet ambitieux du cinéaste norvégien  Dag Johan Haugerud. Est-il assez convaincant pour me donner envie d'aller voir les deux autres volets ? Je n'en suis pas certaine. Certes il exprime avec une certaine justesse les émotions d'une adolescente, tombée amoureuse d'une de ses enseignantes, et leurs répercussion sur sa mère et sa grand-mère, féministes toutes les deux, mais pas de la même façon. Quatre portraits de femmes donc, à des âges différents de la vie, plutôt bien vus. Les attitudes, les sentiments, les dialogues, tout est bien observé et parfaitement rendu. Mais voilà, cela fait au final beaucoup de mots, beaucoup de phrases et il m'a toujours semblé que si le théâtre est bien le lieu de la parole, celui du cinéma est prioritairement celui de l'image et du mouvement. Oui, je suis un peu bornée sur sur ce point !  Ceci dit et malgré mes préjugés, Rêves est certainement un film passionnant pour qui s'intéresse à la psychologie des individus, des femmes en particulier et d'une certaine façon à l'évolution de la société. 


 

12 juillet 2025

Aharon Appelfeld, La Ligne

Depuis que le film La Chambre de Mariana est sorti, on parle beaucoup de cet écrivain né en Roumanie, en 1932, rescapé des camps, réfugié en Israël depuis 1946 et considéré comme un écrivain majeur de la Shoah. Histoire d'une vie, paru en français en 2004 était plus classiquement autobiographique que La Ligne, écrit en 1991 et publié en français en mars de cette année. Mais si La Ligne emprunte un peu plus au genre romanesque, puisque le narrateur est un homme qui refait inlassablement depuis des années le même circuit en train à la poursuite de l'homme responsable de la mort de ses parents, les éléments biographiques sont toujours là, en arrière-plan. . Les paysages défilent; les gares, les pensions où le narrateur revient toujours, les gens qu'il retrouve régulièrement au rythme des ses voyages soulignent le côté obsessionnel d'une mémoire qui ne parvient à oublier ni la permanence de l'antisémitisme, ni le renoncement au communisme. La Ligne ressemble à un récit de voyage, mais un voyage en boucle; ressemble aussi à un polar, puisqu'il s'agit de retrouver un assassin; mais c'est plus encore un texte qui, sous des dehors romanesque, pousse à réfléchir sur ce que signifie être juif, dans un siècle qui après tant de pogroms a connu la Shoah. 


 

11 juillet 2025

Le Jardin d'été

Le film de  Shinji Somai et Yozo Tanaka date de 1994. Je l'aurais su avant de voir le film, j'aurais peut-être été plus indulgente.  Mais dès les premières images j'ai été désagréablement surprise par la qualité de la pellicule, genre Kodachrome un peu trop saturé. De plus, si le point de départ - la curiosité des enfants vis à vis de la mort - était intéressant, et a conduit l'improbable trio à espionner un vieillard, puis se lier d'amitié avec lui jusqu'à en faire le meilleur compagnon de leur été, je me suis assez vite lassée d'un thème un peu trop rebattu (le vieillard et l'enfant), qui n'avait de neuf que d'être japonais. Mais ce qui m'a surtout gêné dans ce Jardin d'été, c'est le jeu des gamins, à commencer par un casting caricatural : petit avec des lunettes, obèse et juste normal souligné de surcroît par les surnoms dont ils écopent.  J'avoue avoir toujours un peu de mal avec les enfants-acteurs, mais ceux-là vraiment, m'ont rappelé ... La guerre des boutons (!) sans doute à cause du plu petit, véritable moulin à parole. Entre allergie épidermique et attendrissement, j'ai hélas penché du côté de l'agacement.