Les enfants du pays est une lecture inhabituelle pour moi, plus habituée aux romans qu'aux récits historiques. C'est d'ailleurs par hasard que j'ai trouvé le livre de Frédéric Sallée parmi les nouveautés proposées par une bibliothèque, et ce n'est pas tant le titre que le sous-titre, Histoire intime d'une rafle, qui m'a fait tendre la main pour l'emprunter.
L'auteur est un enseignant, que l'histoire du XXe siècle avec ses guerres et ses génocides intéresse particulièrement puisqu' il a déjà publié plusieurs livres sur le nazisme et a travaillé sur le Rwanda. C'est donc en historien qu'il documente la rafle du 13 Avril 1944, à Vernoux, petit village de l'Ardèche dont est originaire sa famille. Parmi les onze "raflés", un gamin de 17 ans, Georges Faure, son cousin. Et voilà la part de l'intime, voilà le moment où la grande Histoire devient aussi son histoire, c'est-à-dire l'histoire de sa famille. Il ne s'agit plus seulement de chiffres, de statistiques, mais bien d'individus réels, connus de l'auteur puisque de son village, de son pays. Et c'est ce qui donne au récit son poids de vécu. Je n'ai pas lu attentivement toutes les pages, pourtant très précises, très documentées, parce que ce qui m'intéressait vraiment, c'était la démarche de l'auteur, la façon dont il procédé pour obtenir tous les renseignements concernant "Jojo" et les habitants de Vernoux, la façon dont il a sorti de l'anonymat un individu pour le raccrocher au wagon de la grande histoire. Dans un souci parfaitement didactique puisqu'il s'agissait au départ de trouver comment faire comprendre à ses élèves le fonctionnement du régime nazi et son application par le gouvernement de Vichy jusque dans les villages les plus reculés de l'Ardèche.
Les Enfants du pays aurait pu n'être qu' une histoire de famille de plus parmi celles qui encombrent les librairies et les bibliothèques, mais vu par un historien doublé d'un enseignant soucieux de vulgarisation., le récit devient paradigmatique. L'histoire des historiens n'est désormais plus seulement celle des empereurs et des rois, des guerres et des traités, pas même celle du peuple vu comme un ensemble statistique, mais bien celle du vécu des individus.

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