15 juillet 2012

Detroit Art Institute


Histoire, sociologie, urbanisme... voilà bien des atouts pour une ville qui passe pour avoir si peu d'attraits.
Et il n'est pas très difficile de trouver d'autres bonnes raisons de s'arrêter à Detroit. La musique, par exemple puisque c'est dans cette ville qu'a été crée en 1959 la société de distribution de disques Mowton. Ceux que la musique américaine des années 60 passionne iront  donc visiter le Mowtown Historical Museum mais j'avoue avoir préféré au MHM, le DIA (Detroit Institute of Art).

L'Institut d'Art de Detroit est l'un des plus importants musée des Etats-Unis, riche en peintures européennes autant qu'américaines; c'est aussi un musée très actif et donc très fréquenté, en tout cas le jour où nous y sommes passés.

La "grande" oeuvre du musée de Detroit est la fresque réalisée par le muraliste mexicain Diego Rivera au début des années 30. La première fois que j'en ai entendu parler, c'était dans un livre, un roman de Richard Powers intitulé Trois fermiers s'en vont au bal. Le narrateur profite d'une correspondance un peu longue à la gare de Detroit, pour visiter le musée, dont il apprécie peu l'architecture :

"Le musée de Detroit s'ouvre [...] sur un grand hall, rectangle de pierre aux voûtes élevées qui souffre de l'influence européenne et qui est totalement inadapté à l'exposition d'oeuvres d'art. Satyres rococo et fioritures alternent avec des bouches d'aération dans un mélange confus d'héritages architecturaux. En 1931, au creux de la Dépression, la Commission des Beaux-Arts, financée par Edsel Ford, demanda au peintre muraliste mexicain Diego Rivera d'utiliser cette salle pour exécuter une fresque commémorant la grandeur de Detroit. "

"Ils (les responsables de l'Institut ) ne se doutaient pas que cet homme immense irait promener son imposante carcasse dans les installations de Detroit, qu'il resterait enfermé pendant plus de trois mois dans les usines Ford, Chrysler, Edison à réaliser des milliers de croquis préparatoires. "

Comme on peu s'en douter, l'inauguration de la fresque fit scandale : "Diego avait commis l'acte subversif par excellence : il avait peint l'esprit de Detoit sans retouche et dans ses moindres détails. Une file de formes humaines interchangeables étampait et soudait, caressait la chaîne de montage, machine sinueuse presque fonctionnelle, pour enfin produire le produit fini : un moteur automobile. Des hommes en combinaison d'amiante et masques à gaz se métamorphosaient en insectes verts aux gros yeux ronds. "




Scandale ou pas, la fresque resta en place. Et fait sans doute l'admiration de ceux qui prennent le temps d'en observer tous les détails.

"Regardant de nouveau, je remarquai un panneau mineur situé sur l'un des petits murs un peu à l'écart des fresques consacrées au tapis roulant. Devant une dynamo sculpturale aux lignes plus erotiques que celles d'un nu, un homme aux cheveux blancs était assis à un bureau monolithique, le visage contracté en une expression qui mêlait la bienveillance à la cupidité; ce pouvait être Ford, Edison, De Forest, ou n'importe qui parmi une bonne dizaine d'industriels et d'inventeurs revêches."




Voici, à gauche, le personnage décrit par Richard Powers qui ne mentionne pas son pendant, l'ouvrier en bleu de travail : la symétrie des figures ferait plutôt penser à l'opposition entre "cols bleus" et "cols blancs".

Ingénieurs et patrons sont représentés ailleurs dans la fresque : leurs outils ne sont ni le marteau, ni le décimètre mais le crayon et le papier.


Le monde industriel n'est pas souvent représenté en peinture; ni en littérature. C'est (c'était ?) pourtant sur lui, qu'était fondée notre économie.

Aucun commentaire: