Claude Esteban était poète.
La porte, la dernière, la plus
obscure
est ouverte, sache-le, nuit et jour,
personne jamais ne la referme,
aussi ne te hâte pas, tu franchiras
le seuil à ton heure, quelqu'un
veille là-bas qui n'a pour tâche que le poids
des âmes, les corps,
eux, ne souffrent plus ni
ne se souviennent, ni ne reviennent non plus.
obscure
est ouverte, sache-le, nuit et jour,
personne jamais ne la referme,
aussi ne te hâte pas, tu franchiras
le seuil à ton heure, quelqu'un
veille là-bas qui n'a pour tâche que le poids
des âmes, les corps,
eux, ne souffrent plus ni
ne se souviennent, ni ne reviennent non plus.
Je me souviens du poète, mais je me souviens plus encore de l'amateur de peinture.
Soleil dans une pièce vide est un livre qui m'a longtemps enchantée : 47 textes écrits pour accompagner 47 tableaux d'Edward Hopper; pour les accompagner, pas pour les analyser ni même les commenter, ou les illustrer. Non, juste les accompagner. Les textes d'Esteban décrivent ou racontent; ils peuvent se lire seuls mais confrontés aux tableaux de Hopper (même une méchante reproduction !) ils nous les font voir, vraiment voir. Comme celui-ci par exemple :
" Dimanche matin Il n'y a personne dans la rue. Il n'y a jamais personne pour voir la rue comme elle est, un dimanche matin au petit jour. D'ailleurs, qui regarde jamais une rue, même en semaine, même lorsqu'elle est pleine de monde. On passe vite, on va d'un endroit à un autre, avec des idées danas la tête, des soucis. Si l'on s'arrête; si l'on interroge soudain une façade, c'est qu'on cherche une adresse, qu'on essaye de se reconnaître, et alors mieux vaut demander son chemin à un policeman ou à un vendeur de journaux. on aurait trop peur de découvrir d'un seul coup qu'on ne sait pas regarder une rue, qu'on ne l'a jamais su, et qu'il est préférable de tourner au prochain carrefour ou de s'engouffrer dans une bouche de métro. Les rues sont trop difficiles à comprendre. Un étranger, peut-être, les voit mieux (...)
Edward Hopper,Early sunday morning, 1930
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