Copyright : JM
25 mai 2013
24 mai 2013
Los Salvajes
Voilà un film que j'ai un peu de peine à recommander, bien qu'il soit extrêmement intéressant.
Le "pitch" est connu : cinq adolescents (4 garçons et 1 fille) s'échappent d'un pénitencier où il purgeait on ne sait quelle peine. Mais l'éventuelle sympathie que l'on pouvait avoir pour des jeunes gens évadé d'un système carcéral s'efface rapidement devant la brutalité de leur comportement et leur bêtise. Car ces adolescents, rodés à la violence, égarés dans un monde hostile, sans repères ni géographiques ni moraux, ne vont pas tarder à régresser jusqu'à l'état sauvage.
La fable n'est pas nouvelle et les lecteurs de Sa Majesté des Mouches se croiront en terrain connu; pourtant, la force des images, l'efficacité du montage qui va à l'essentiel sans entrer dans des détours psychologiques qui amoindriraient le propos, sont sans commune mesure avec le livre de William Golding.
Los Salvajes est, je crois, le premier film en tant que réalisateur d'Alejandro Fadel. Mais, sachant qu'il était scénariste ou co-scénariste de Carancho, et de Elefante blanco, je ne pouvais m'attendre à une bluette. L'expérience cinématographique pourtant a été rude : reconnaître qu'il y a au fond si peu de différence entre l'homme et l'animal et qu'en fonction des circonstances l'être humain, que nous croyions civilisé, peut à tout instant basculer et régresser vers l'état sauvage ne porte pas à l'optimisme.
Une interview accordé à Télérama par le réalisateur qui commente trois moments clefs du film permet de s'en faire une idée, permet surtout de se faire une idée des conditions de tournage.
"Tout homme porte en lui la forme de l'humaine condition. " disait Montagne. Ces "sauvages" portent donc bien une part de nous-mêmes hélas.
Le "pitch" est connu : cinq adolescents (4 garçons et 1 fille) s'échappent d'un pénitencier où il purgeait on ne sait quelle peine. Mais l'éventuelle sympathie que l'on pouvait avoir pour des jeunes gens évadé d'un système carcéral s'efface rapidement devant la brutalité de leur comportement et leur bêtise. Car ces adolescents, rodés à la violence, égarés dans un monde hostile, sans repères ni géographiques ni moraux, ne vont pas tarder à régresser jusqu'à l'état sauvage.
La fable n'est pas nouvelle et les lecteurs de Sa Majesté des Mouches se croiront en terrain connu; pourtant, la force des images, l'efficacité du montage qui va à l'essentiel sans entrer dans des détours psychologiques qui amoindriraient le propos, sont sans commune mesure avec le livre de William Golding.
Los Salvajes est, je crois, le premier film en tant que réalisateur d'Alejandro Fadel. Mais, sachant qu'il était scénariste ou co-scénariste de Carancho, et de Elefante blanco, je ne pouvais m'attendre à une bluette. L'expérience cinématographique pourtant a été rude : reconnaître qu'il y a au fond si peu de différence entre l'homme et l'animal et qu'en fonction des circonstances l'être humain, que nous croyions civilisé, peut à tout instant basculer et régresser vers l'état sauvage ne porte pas à l'optimisme.
Une interview accordé à Télérama par le réalisateur qui commente trois moments clefs du film permet de s'en faire une idée, permet surtout de se faire une idée des conditions de tournage.
"Tout homme porte en lui la forme de l'humaine condition. " disait Montagne. Ces "sauvages" portent donc bien une part de nous-mêmes hélas.
L'écureuil brun
L'écureuil roux c'était il y a deux semaines. Celui d'aujourd'hui est
brun, bien brun. Mais il ne fait pas pour autant partie des envahisseurs
américains. Il est juste d'une autre couleur.
23 mai 2013
22 mai 2013
Sous surveillance
Certains font la fine bouche : déjà vu, trop convenu, pas assez de suspens...
Oui et alors ? Sous surveillance n'est pas un film d'action, c'est vrai; c'est plutôt un film de réflexion et d'une certaine façon un film historique.
Sous surveillance rappelle le rôle qu'ont tenté de jouer, dans les années 70, les Weathermen, ce groupe d'activistes américains qui pour protester contre la guerre du Vietnam avait décidé de "porter la guerre" sur le territoire américain. Ils ont posé quelques bombes, attaqué quelques banques pour financer leur action et sont sans doute responsables de la mort de plusieurs personnes. Les Weathermen sont alors entrés dans la clandestinité, puis, sous une fausse identité, sont rentrés dans le rang, ont mené une autre vie. Une vie qui vole en éclat quand l'un d'entre eux - une mère de famille - est arrêté.
La question que Robert Redford essaye de poser dans ce fim c'est celle de la conscience. Comment vit on avec un tel passé ? Peut-on simplement oublier, faire comme si rien ne s'était passé ? Est-on rongé par le remords ? Vit-on dans la peur permanente d'être découvert ?
Le film est certes d'une facture très classique, mais la mise en scène ne cherche ici qu'à servir le propos du film. Alors pas question de faire la fine bouche devant un film intelligent.
Oui et alors ? Sous surveillance n'est pas un film d'action, c'est vrai; c'est plutôt un film de réflexion et d'une certaine façon un film historique.
Sous surveillance rappelle le rôle qu'ont tenté de jouer, dans les années 70, les Weathermen, ce groupe d'activistes américains qui pour protester contre la guerre du Vietnam avait décidé de "porter la guerre" sur le territoire américain. Ils ont posé quelques bombes, attaqué quelques banques pour financer leur action et sont sans doute responsables de la mort de plusieurs personnes. Les Weathermen sont alors entrés dans la clandestinité, puis, sous une fausse identité, sont rentrés dans le rang, ont mené une autre vie. Une vie qui vole en éclat quand l'un d'entre eux - une mère de famille - est arrêté.
La question que Robert Redford essaye de poser dans ce fim c'est celle de la conscience. Comment vit on avec un tel passé ? Peut-on simplement oublier, faire comme si rien ne s'était passé ? Est-on rongé par le remords ? Vit-on dans la peur permanente d'être découvert ?
Le film est certes d'une facture très classique, mais la mise en scène ne cherche ici qu'à servir le propos du film. Alors pas question de faire la fine bouche devant un film intelligent.
21 mai 2013
Jim Fergus et ses Mille femmes blanches
Quel plaisir par un jour de pluie et de froidure, de se laisser emporter par un vrai grand roman romanesque. Par romanesque j'entends un roman qui me transporte ailleurs, à une autre époque, qui me fait vivre, le temps de ma lecture, une vie qui ne ressemble en rien à la mienne. Pas meilleure non, juste différente. Un livre qui élargit mon univers.
Et s'il faut, une fois de plus prendre la défense du roman ou, plutôt, faire son apologie je dirai qu'un "bon" roman, comme celui de Fergus, m'en apprend beaucoup plus sur l'histoire des Cheyennes et sur la façon dont ils ont été traités qu'un essai - aussi érudit soit-il - qui me fera mourir d'ennui. Je suppose bien entendu que l'auteur avant de se lancer a passé un certain temps à se documenter sur les faits historiques qu'il a l'intention d'évoquer. Mais ensuite c'est à lui de créer des personnages, suffisamment forts pour que l'on y croit, de raconter des événements suffisamment précis pour qu'ils aient l'air vraisemblables, d'ajouter des détails, des couleurs, des sentiments pour abolir la distance entre la réalité et la fiction.
Mille femme blanches contre mille chevaux : c'est le contrat passé entre le Président Grant et Little Wolf, un chef Cheyenne. Une quarantaine de femmes, trouvées essentiellement dans les prisons et les asiles d'aliénés, constitue le premier convoi et le point de départ du roman. Parmi ces femmes : May Dodd, une jeune fille de bonne famille dont le seul tort est d'avoir aimé en dehors de sa caste. Epistolière assidue, c'est elle qui devient la narratrice, c'est elle dont le point de vue s'impose tout au long du roman : le départ en train depuis Chicago, le long voyage vers l'Ouest, l'arrivée dans les Black Hills, l'échange des femmes et des chevaux sous la surveillance de l'armée américaine, l'initiation au mode de vie des Cheyennes, les saisons dans les Black Hills .... La comparaison entre les moeurs des "sauvages" et celles des "civilisés" n'est pas toujours à l'avantage de ces derniers. Pas toujours à leur désavantage non plus !
Entre Indiens et Blancs, Jim Fergus ne choisit pas toujours; entre femmes et hommes, un peu plus souvent, jusqu'à se faire passer pour un féministe bon teint ! Car les femmes qu'il met en scène ont du ressort, et du répondant ! Leur forte personnalité paraît même anachronique dans le contexte; elles pensent et surtout parlent comme des femmes d'aujourd'hui et j'en suis parfois venue à me demander si la traduction était bien à la hauteur. Mais que sait ont réellement de ce que les femmes avaient en tête au XIXe siècle; la façon de s'exprimer a sans doute changé, pas les émotions ! Et après tout le charme du roman tient peut-être à ce léger décalage entre le passé et le présent.
Pour ma part je me réjouis d'avoir encore deux ou trois livres du même auteur à découvrir.
Et s'il faut, une fois de plus prendre la défense du roman ou, plutôt, faire son apologie je dirai qu'un "bon" roman, comme celui de Fergus, m'en apprend beaucoup plus sur l'histoire des Cheyennes et sur la façon dont ils ont été traités qu'un essai - aussi érudit soit-il - qui me fera mourir d'ennui. Je suppose bien entendu que l'auteur avant de se lancer a passé un certain temps à se documenter sur les faits historiques qu'il a l'intention d'évoquer. Mais ensuite c'est à lui de créer des personnages, suffisamment forts pour que l'on y croit, de raconter des événements suffisamment précis pour qu'ils aient l'air vraisemblables, d'ajouter des détails, des couleurs, des sentiments pour abolir la distance entre la réalité et la fiction.
Mille femme blanches contre mille chevaux : c'est le contrat passé entre le Président Grant et Little Wolf, un chef Cheyenne. Une quarantaine de femmes, trouvées essentiellement dans les prisons et les asiles d'aliénés, constitue le premier convoi et le point de départ du roman. Parmi ces femmes : May Dodd, une jeune fille de bonne famille dont le seul tort est d'avoir aimé en dehors de sa caste. Epistolière assidue, c'est elle qui devient la narratrice, c'est elle dont le point de vue s'impose tout au long du roman : le départ en train depuis Chicago, le long voyage vers l'Ouest, l'arrivée dans les Black Hills, l'échange des femmes et des chevaux sous la surveillance de l'armée américaine, l'initiation au mode de vie des Cheyennes, les saisons dans les Black Hills .... La comparaison entre les moeurs des "sauvages" et celles des "civilisés" n'est pas toujours à l'avantage de ces derniers. Pas toujours à leur désavantage non plus !
Entre Indiens et Blancs, Jim Fergus ne choisit pas toujours; entre femmes et hommes, un peu plus souvent, jusqu'à se faire passer pour un féministe bon teint ! Car les femmes qu'il met en scène ont du ressort, et du répondant ! Leur forte personnalité paraît même anachronique dans le contexte; elles pensent et surtout parlent comme des femmes d'aujourd'hui et j'en suis parfois venue à me demander si la traduction était bien à la hauteur. Mais que sait ont réellement de ce que les femmes avaient en tête au XIXe siècle; la façon de s'exprimer a sans doute changé, pas les émotions ! Et après tout le charme du roman tient peut-être à ce léger décalage entre le passé et le présent.
Pour ma part je me réjouis d'avoir encore deux ou trois livres du même auteur à découvrir.
17 mai 2013
Une vie simple
Quel joli film vraiment ! Parfaitement résumé par son titre.
Ah Tao est désormais une vieille dame. Mais elle travaille toujours. Au service de la même famille depuis quatre générations, elle continue de s'occuper du seul d'entre eux qui n'ait pas émigré et vit toujours à Honk Kong. Mais lorsque Ah Tao subit un premier infarctus, c'est désormais à Roger de veiller sur la vieille dame.
Ah Tao est un personnage lumineux, toute de générosité, qui transforme le monde autour d'elle d'un seul regard; la maison de retraite dans laquelle elle a exigé d'être placée pour n'être à la charge de personne est pourtant sordide, ses locataires plus qu'abîmés, Ah Tao s'accommode de tout, s'efface, s'oublie, heureuse d'un sourire, d'un rien, soucieuse de ne jamais sur la vie des autres.
Le titre peut faire penser au conte de Flaubert "Un coeur simple", mais ce sont les premiers vers d'un poème de Baudelaire qui me sont revenus en mémoire. Je ne sais si le poème de Baudelaire est connu de la réalisatrice, Ann Hui mais elle en a joliment traduit l'esprit. Alors, juste pour le plaisir, voici le poème
La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse
La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse,
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse,
Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs.
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs,
Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certes, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
À dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorés de noires songeries,
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver
Et le siècle couler, sans qu'ami ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille.
Lorsque la bûche siffle et chante, si le soir
Calme, dans le fauteuil je la voyais s'asseoir,
Si, par une nuit bleue et froide de décembre,
Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre,
Grave, et venant du fond de son lit éternel
Couver l'enfant grandi de son oeil maternel,
Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse,
Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse?
— Charles Baudelaire
Ah Tao est désormais une vieille dame. Mais elle travaille toujours. Au service de la même famille depuis quatre générations, elle continue de s'occuper du seul d'entre eux qui n'ait pas émigré et vit toujours à Honk Kong. Mais lorsque Ah Tao subit un premier infarctus, c'est désormais à Roger de veiller sur la vieille dame.
Ah Tao est un personnage lumineux, toute de générosité, qui transforme le monde autour d'elle d'un seul regard; la maison de retraite dans laquelle elle a exigé d'être placée pour n'être à la charge de personne est pourtant sordide, ses locataires plus qu'abîmés, Ah Tao s'accommode de tout, s'efface, s'oublie, heureuse d'un sourire, d'un rien, soucieuse de ne jamais sur la vie des autres.
Le titre peut faire penser au conte de Flaubert "Un coeur simple", mais ce sont les premiers vers d'un poème de Baudelaire qui me sont revenus en mémoire. Je ne sais si le poème de Baudelaire est connu de la réalisatrice, Ann Hui mais elle en a joliment traduit l'esprit. Alors, juste pour le plaisir, voici le poème
La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse
La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse,
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse,
Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs.
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs,
Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certes, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
À dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorés de noires songeries,
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver
Et le siècle couler, sans qu'ami ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille.
Lorsque la bûche siffle et chante, si le soir
Calme, dans le fauteuil je la voyais s'asseoir,
Si, par une nuit bleue et froide de décembre,
Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre,
Grave, et venant du fond de son lit éternel
Couver l'enfant grandi de son oeil maternel,
Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse,
Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse?
— Charles Baudelaire
13 mai 2013
Mud - Sur les rives de Mississippi
Bien sûr c'est une histoire à la Mark Twain, mais une histoire d'aujourd'hui. Avec deux gamins, trop contents d'échapper aux corvées pour aller explorer les rives de Mississippi. D'autant qu'ils viennent de découvrir un bateau perché entre deux arbres, vestige de la dernière crue. Mais ce bateau sert de refuge à un personnage à la fois fascinant et inquiétant, loup solitaire, un fugitif, un meurtrier...
Sans être d'une grande inventivité, le film est intéressant parce qu'il entrelace habilement plusieurs fils et laisse au spectateur la possibilité de suivre celui qui lui convient, ce qui fait de Mud au choix :
- un roman initiatique : Ellis, 14 ans découvre l'amour et sa finitude.
- une histoire d'amitié : Ellis et Neckbone sont les Huckleberry Finn et Tom Sawyer d'aujourd'hui, aussi habiles à manoeuvrer les bateaux qu'à inventer des mensonges.
- une tragédie amoureuse avec femme fatale - sans gant noir ni fume cigarette - qui sème la mort autour d'elle.
- un sujet de réflexion sur la relation père/fil.
- un film d'action avec chasse à l'homme, fusillade et sniper embusqué.
- un documentaire vaguement misérabiliste sur les habitants dont la survie économique est compromise surtout depuis que le gouvernement a décidé de débarrasser les rives du Mississippi de ses cahutes flottantes.
Raconté comme cela le film ressemble peut-être à un fourre-tout. Mais c'est aussi ce qui fait sa richesse. Dans la vraie vie aussi tout se mélange un peu. Non ?
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