11 mai 2018

Ann Hope, La Salle de bal


Il n'est pas étonnant que La salle de bal, le deuxième roman d'Anna Hope, ait obtenu le prix littéraire UIAD, parce que l'auteur sait parfaitement combiner fiction romanesque et réflexion sur des questions de société qui étaient celles du début du XXe siècle, mais restent pourtant d'actualité.
 
Tout commence en 1911, dans un asile psychiatrique du Yorkshire, entre Liverpool et Manchester. Une jeune femme, Ella, vient d'être internée dans le pavillon des femmes. Les raisons de son internement sont moins médicales que sociales et c'est aussi le cas de John, un Irlandais interné lui dans le pavillon des hommes. D'un pavillon à l'autre, il n'est pas possible de communiquer. Pourtant entre Ella et John une relation se noue, pudique et discrète, fragile surtout puisque leur seule chance de se rencontrer est le bal du vendredi soir, organisé sous le contrôle d'un médecin, persuadé que la musique peut avoir une fonction thérapeutique. Voilà pour l'intrigue romanesque construite autour de personnages malmenés par la vie et placés par les hasards de l'existence en dehors de la normalité si tant est que la normalité puisse se définir.




L'histoire d'Ella et de John, mais aussi de Clem l'amie d'Ella et du Dr Fuller est de celles qui s'impriment dans la mémoire du lecteur parce que, si les personnages sont pour la plupart attachants, leurs conditions de vie sont terrifiantes. Certes la psychiatrie a beaucoup évolué depuis le début du XXe siècle et les stérilisations forcées ne sont sans doute plus à l'ordre du jour, du moins en Europe, et l'eugénisme peut paraître une préoccupation du passé, comme la condamnation de l'homosexualité, mais les débats sur la bioéthique restent plus que jamais d'actualité.

En abordant ces sujets par le biais romanesque, Anna Hope réussit un roman tout à fait passionnant, parce qu'il suscite émotions et réflexions. Mais sa plus belle réussite est peut-être cette salle de bal qui donne son titre au roman et qui permet au lecteur d'imaginer un lieu extraordinaire, baroque, somptueux.... une salle de bal qui dans mon imaginaire cinématographique a rejoint immédiatement la salle de bal du Guépard (Visconti)  et les deux grands bals de La Porte du Paradis (Cimino).





 Rien à voir avec le roman d'Anna Hope ? Mais n'est-ce pas le privilège du lecteur que de s'approprier un livre au point d'y inclure son propre vécu, son propre imaginaire. C'est bien pourquoi un même livre lu par des lecteurs différents, n'est jamais exactement le même.




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