Voici par exemple la rue de l'aubergine (dont le nom est - pour nous - beaucoup plus facile à prononcer qu'en espagnol !).
Certaines rues portent le nom de saints ou de personnages illustres . L'une d'entre elles m'a particulièrement intriguée : la calle de Fucar.
J'ai rapidement trouvé mention de Cristof Fugger, dernier descendant d'une riche lignée de commerçants et de banquiers qui ont, un temps, participé à la grande entreprise de conquête espagnole, mais ils prirent peur car "n'étant pas espagnols, ils ne s'étaient pas rendu compte que la conquête était affaire d'inspiration, de foi, d'idéal - le rêve de tous les rêves - et pas seulement une entreprise mercantile."
"afortunadamente, se asustaron, tuvieron miedo a la conquista, no se dieron cuenta -porque no eran españoles- que la conquista era inspiración, fé, dominio ideal -sueños de sueños- y no sólo una empresa de mercaderes."
Mais si l'on trouve facilement le nom de la famille Fugger, "fucar" lui est impossible à trouver dans les dictionnaires ordinaires, sauf à imaginer qu'il s'agit d'une déformation "à l'espagnole" du nom germanique. Fucar désignerait alors ceux qui détenaient suffisamment d'argent pour prêter au roi d'Espagne de quoi payer ses troupes. L'habitude aidant, de nom propre, le nom est devenu commun :
"en el Diccionario de la Lengua este aceptada la palabra fúcar como significando «hombre muy rico y hacendado», aunque ya nadie dice: «Es un Fúcar», para calificar a un potentado."
La "Calle de fùcar" serait donc la "rue du richard" !
Ironiquement, la calle del Gobernador, que nous empruntons ensuite, nous mène à une rue, exactement parallèle à la première mais qui s'appelle, elle, "Costanilla de los Desemparados". La venelle des déshérédités, des sans-logis !
Une dernière rue avant de quitter Madrid. Une rue et une plaque qui résume à elle seule tout un pan de l'histoire d'Espagne; celui de la Reconquista ! Portés par leur foi, les chrétiens regagnent peu à peu le territoire perdu et chassent les musulmans d'Espagne (et les juifs par la même occasion ! ). 1492, l'Espagne redevient chrétienne.
Tout est dit : les emprunts à l'architecture islamique, qui ont marqué à jamais l'architecture espagnole, les musulmans qui tournent le dos, chassés par le geste autoritaire du militaire, car la foi, puisque de foi il s'agit, est bien-entendu armée.
Un petit mot de remerciement à Ligia qui m'a trouvé le premier site, celui qui explique le mot "fùcar", et au hasard qui m'a trouvé le second : un répertoire photographique de 248 plaques de rues madrilènes , avec, en prime une carte où sont indiqués les emplacements des 248 photos mis à la disposition de qui veut bien. "Este es un pequeño servidor montado de un modo totalmente privado con la intención de ser útil a la comunidad del conocimiento libre y del software libre. También sirve a su mantenedor como modo de expresión y herramienta de investigación." Je lui ai emprunté la rue des Aubergines et celle des sans-logis, deux photos beaucoup plus réussies que les miennes. Mucho gracias, Pedro Reina !
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