13 décembre 2010

Les Naufragés du Fol-Espoir

Il y a d'abord le spectacle dont la trame a été empruntée à un roman peu connu de Jules Verne publié sous deux titres différents selon les éditeurs : Les Naufragés du Jonathan ou En Magellanie.
Le roman en question est passionnant ! Un vieil anarchiste réfugié au bout de la terre de feu pour échapper aux absurdités politiques, participe au sauvetage des passagers du Jonathan, qui une fois réfugiés sur cette île du bout du monde et totalement isolés, doivent apprendre à vivre ensemble. On efface tout, les lois, les règles et on recommence....
Le roman de Jules Verne peut sans doute se lire comme un vulgaire roman d'aventure, mais le questionnement politique qui le sous-tend en fait un objet littéraire non identifié absolument fascinant !


Pour mieux souligner les enjeux du roman, Ariane Mnouchkine a imaginé une troupe de comédiens lancée dans son adaptation cinématographique, en 1914 !
La date n'est pas choisie au hasard : l'assassinat de l'archiduc François Ferdinand à Sarajevo marque effectivement un moment crucial de l'histoire et le cinématographe, encore muet, en est à ses balbutiements.
Le spectacle qui pendant plus de trois heures retient l'attention du spectateur se joue donc sur trois plans : celui du roman, celui du tournage du film et celui de l'Histoire, fiction et réalité étant soigneusement entremêlées.
Le résultat est à la hauteur des ambitions de la troupe qui entend faire du cinéma un art "social et populaire". "Plaire et instruire" disait Molière dont Mnouchkine est la plus évidente héritière.
Théâtre de bouts de ficelle, tout comme le cinéma à ses débuts, mais tellement inventif. Théâtre sans prétentions mais tellement ambitieux . Théâtre de texte mais tellement visuel. Servi par 32 comédiens capables de tout.


Il y a, à la Cartoucherie de Vincennes, des habitués qui n'ont pas manqué un seul spectacle. Et puis il y a ceux qui font pour la première fois le parcours initiatique qui les mène d'abord du métro jusqu'à la navette; puis la marche dans le parc (au milieu des plaques de neige, glissades assurées !), l'attente devant les portes qui s'ouvrent, ponctuellement, une heure avant le spectacle. On réserve sa place sur les gradins, puis on se dirige vers le comptoir du grand hall pour y chercher de quoi se restaurer, servis par les comédiens, déjà en tenue de scène; on trouve une place autour d'une table, sur un banc. L'ambiance est festive, conviviale. Sourires sur les visages comme si chacun savourait en même temps que sa soupe, le plaisir à venir. Ni bousculades ni râleries. Voilà qui n'est pas banal!

Pas banale non plus la distribution de couvertures (roses !) aux spectateurs. Le spectacle promettait un voyage vers les terres australes; les couvertures devaient-elles permettre aux spectateurs de mieux s'identifier aux Naufragés du Fol-Espoir ?? ?
Et bien non ! Le chauffage de la Cartoucherie présentait des signes de faiblesse et Mnouchkine, prévoyante, faisait distribuer des couvertures par ses comédiens, qui une fois montés sur scène devaient quand même avoir une curieuse vision: tous ses spectateurs emmitouflés dans leurs couvertures ! Puis à la fin du spectacle, les couvertures abandonnées en vrac sur les gradins. Je n'avais pas pris mon appareil photo ce soir là et je le regrette encore !

A Vincennes jusqu'au 9 janvier 2011, à Lyon du 29 janvier ua 20 février, à Nantes du 4 au 22 mai .... mais reste-t-il encore des places ? j'en doute.
Essayez quand-même ! http://www.theatre-du-soleil.fr/thsol/index.php

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