25 janvier 2022

Sophie d'Aubreby, S'en aller


Le roman surprend d'abord par l'intensité de son écriture, dense, fiévreuse. Une écriture très précise et extrêmement sensuelle. Le récit est fait à la troisième personne, mais la technique du flux de conscience permet de rendre au mieux les fluctuations de la pensée, des émotions, des sensations du personnage principal. Surtout les sensations ! Dès les premières page le lecteur est jeté sur le pont du bateau de pêche, à éviscérer des poissons, au plus près du travail des matelots parmi lesquels s'est glissé Carmen. 

Carmen n'a pas 20 ans. Sur un coup de tête elle s'est engagée sur ce bateau en dissimulant son identité et son sexe. On est au début du XXe siècle, un époque où le destin des femmes était écrit dès leur naissance, vouées à être mariées et à faire des enfants. Mais pas Carmen qui par instinct de survie, quitte sa famille, sa maison, sa ville pour vivre comme elle l'entend ! Elle s'en va, rencontre Hélène, s'initie à la danse d'Isidora Duncan, s'installe à Java, rentre en France, s'engage dans la résistance, se retrouve à Mathausen.

Toute une vie jusqu'à la grande vieillesse, mais une vie de femme hors du commun, parce que depuis la rébellion initiale, Carmen n'a jamais fait que ce qu'elle a voulu,  n'a aimé que qui elle a voulu - il se trouve que c'était une femme -; elle s'est débarrassée à jamais des règles et des codes imposés à son sexe, Féministe sans même avoir à revendiquer l'étiquette. Féministe par instinct. Féministe par nature,

Le roman de Sophie d'Aubreby est le roman d'une vie, mais c'est aussi la traversée d'un siècle, celui où les femmes ont acquis leur autonomie, se sont battues pour n'être ni filles de ..., ni femmes de..., mais juste elles-mêmes !  Comme Carmen.

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