28 janvier 2019

Hanya Yanagihara, Une vie comme une autre



Une vie comme une autre est un livre perturbant, au point que je me suis plusieurs fois demandé si j'allais poursuivre ma lecture ! Et ce, pour des raisons sans doute un peu mesquines comme ...  une couverture peu convaincante,  comme ... des maladresses de traduction embarrassantes  : placer un malade d'un service de réanimation "sous un ventilateur" me  paraît nettement moins efficace que "sous ventilation mécanique" !  Il y en a d'autres ! Mais je peux comprendre la fatigue de la traductrice et des correcteurs (?) au fil des 812 pages d'un récit à la fois dense et répétitif. 812 pages ! C'est là mon principal reproche : le livre est lourd, beaucoup trop lourd au sens propre, et certainement trop long. Trop lourd, trop long, trop insistant aussi.

Et pourtant je l'ai lu jusqu'au bout, parfois lassée j'en conviens,  mais parfois enthousiasmée.

Le roman se présente comme une chronique qui suit pendant près de 40 ans un quatuor de jeunes gens dont l'amitié est née pendant leurs années à l'université et ne s'est jamais relâchée... Ils sont tous beaux, intelligents, talentueux. Ils deviennent architecte, peintre, acteur, avocat ... Argent, réussite sociale !  Ils ont tout ! Et surtout ils sont new-yorkais. Le regard de Hanya Yanagihara sur ces jeunes gens fortunés rappelle, dans ses meilleurs moments, celui de Proust sur les salons parisiens du début du XXe siècle. C'est en tout cas l'aspect du roman que j'ai le plus apprécié, une peinture fine et précise d'un milieu que l'auteur connaît bien et qu'elle observe avec le regard d'un entomologiste.

Mais les vies les plus brillantes ont aussi leur côté ombreux et avec Jude, le personnage principal, on s'enfonce dans les ténèbres d'une vie massacrée dès l'enfance. Abandonné, violé et violenté par tous ceux dont il a croisé le chemin, sa vie n'a été qu'un calvaire. Aux souffrance physiques s'ajoute bien entendu la souffrance morale. L'auteur entend montrer ou plutôt démontrer que les sévices ont entraîné chez le personnage une perte totale de l'estime de soi, censée expliquer les séances de scarification qu'il s'impose régulièrement, mais l'étude pathologique prend alors le pas sur le romanesque, et le récit devient terriblement répétitif, terriblement insistant et terriblement pesant.

Je reconnais que le jeu entre les extrêmes (la réussite  versus la déchéance, l'amitié, l'amour contre la haine, l'art et la beauté pour tenter d'oublier la laideur et le mal... ) était une bonne idée et j'aurais aimé pouvoir dire tout le bien que je pensais de ce roman. Mais voilà, même si l'intention baudelairienne que j'ai cru percevoir entre les pages m'a intéressée, le roman ne m'a pas tout à fait convaincue.


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