Je devais le lire en italien. Je l'ai finalement lu en français. C'est sans doute un peu dommage, mais pas tant que cela parce que même en traduction le roman est vite prenant.
L'histoire qu'il raconte est celle de ces enfants du Sud de l'Italie que
le Parti communiste italien a entrepris, au sortir de la guerre, de
faire monter dans le Nord où ils seraient accueillis pendant quelques
semaines ou quelques mois dans des familles riches ou, en tout cas,
nettement moins pauvres que leurs parents. La démarche peut paraître
surprenante, voire choquante mais le roman de Viola Ardone n'a rien
d'une fiction. I treni della felicità ont bel et bien traversé
l'Italie entre 45 et 47, avec leur wagons remplis d'enfants apeurés,
persuadés qu'ils étaient envoyés en Russie. Une initiative de l'Union
des femmes italiennes, reprise ensuite par le PCI, critiquée
par l'Eglise évidemment, mais qui a bel et bien permis de sauver des dizaines de
milliers d'enfants de la famine.
En donnant la parole à Amerigo, un gamin à la langue bien pendue Viola Ardone situe la narration à hauteur d'enfant ce qui permet de tabler sur la candeur et la naïveté et d'éviter un récit trop sentencieux. Amerigo et ses camarades vivent le voyage comme une aventure, où les récompenses font oublier les menaces, où la découverte d'un nouveau monde compense la perte de l'ancien, qui avait si peu d'espoirs à leur offrir. L'autre écueil du récit était le mélodrame larmoyant, évité par la drôlerie, l'humour et l'imagination sans borne des enfants.
Dans les derniers chapitres, Amerigo revient auprès de sa mère Antonietta et le roman à ce moment là devient plus tendu, plus réfléchi. Parce que Antonietta est trop perdue dans la misère pour être une mère affectueuse et qu'il y a entre elle et Amerigo trop d'incompréhension. Les liens déjà très fragiles sont désormais rompus. C'est ce qui permet au lecteur de s'interroger sur le bien-fondé de l'expérience, dont les aspects positifs - ne serait-ce que l'accès à l'éducation pour ces enfants illettrés - ne sont certainement pas négligeables. . Mais Viola Ardone prend soin de montrer que le prix à payer a parfois été celui d'un reniement de la famille d'origine. Douloureux. Forcément douloureux.
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