05 janvier 2024

Lance Weller, Le cercueil de Job

 

Passer du film de Felipe Gálvez Haberle au roman de Lance Weller, ce n'est pas vraiment changer d'univers, bien que le premier se passe au Chili au début du XXe siècle et le second aux Etats-Unis pendant la guerre civile. Autant dire qu'aucune brutalité, aucune turpitude ne sera épargnée au lecteur. Sans complaisance cependant. Juste la réalité. Et celle des guerres passées n'est pas très différentes de celle des guerres d'aujourd'hui.

Ceci posé, Le cercueil de Job est un grand et beau roman, remarquablement construit. Très vite on s'attache au personnage principal,  Bell, une jeune esclave qui au cours de sa fuite vers le Nord, croise la route d'autres personnages, esclaves fugitifs comme elle ou déserteur sudiste, tous fascinés par la candeur, la force morale et pour tout dire la pureté de l'enfant. Très habilement, Lance Weller croise et décroise les lignes de vie des personnages, revient en arrière pour raconter ce qu'ils ont vécu, et ménage, au milieu de tant de noirceur, quelques moments de pure bonté, de pure générosité. Ce qui permet de ne pas totalement désespérer de l'humanité, tout en ne cachant rien des monstruosités de l'esclavage et de la férocité des champs de bataille. Fresque historique, épopée lyrique, je ne sais comment qualifier ce livre, mais je sais qu'il fait partie de ceux que l'on n'oublie pas.

 De Lance Weller j'avais déjà lu Wilderness, avec un très beau personnage hanté lui aussi par la guerre civile. Et j'avais été frappé par la force et la subtilité de l'écriture. L'écrivain excelle à décrire la beauté de la nature dans son état sauvage, comme il excelle à décrire la sauvagerie des hommes lorsqu'ils ont perdu tout sens moral. Son regard sur l'Amérique est sans concession, il en dénonce tous les maux, toutes les errances, mais ne peut s'empêcher de croire qu'il pourrait en être autrement. 

PS. Deux couvertures très différentes. la version Totem est plus "lumineuse" mais à y regarder de près, la lumière est plutôt de la guerre et des incendies, et les abeilles, oui il y a des abeilles dans le roman mais est-ce cela l'essentiel ?  ...  L'autre couverture est plus sobre, plus mystérieuse et me paraît mieux convenir au roman.

 

 

 


 


 

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