Question : pourquoi alors que la chaleur est accablante, alors qu'on est en plein milieu de l'été, que l'on rêve d'insouciance et de rires légers, pourquoi, oui pourquoi aller voir des films aussi sombres ? Parce qu'ils sont bons tout simplement. Et qu'ils nourrissent l'âme je suppose. Ou au moins l'esprit à défaut d'âme.
As Bestas est d'abord un film de paysans. Peut-être pas la catégorie sociale la plus représentée dans le cinéma, malgré quelques exceptions récentes. Un petit village de Galice, déserté par la plupart de ses habitants à l'exception de quelques un qui s'accrochent encore et pour qui l'installation d'éoliennes sur leurs terrains paraît une bonne aubaine. Celle qui leur permettra, pensent--ils, de changer de vie. Sur cette terre ingrate est venu s'installer un couple de Français qui entend développer des cultures maraichères, bio évidemment, et restaurer les maisons abandonnées pour faire revivre le village. Pour eux l'installation des éoliennes n'a pas de sens. Le conflit, jusqu'à présent latent, tourne rapidement à la tragédie.
Rodrigo Sorogoyen excelle dans la peinture de ce milieu paysan, une peinture si réaliste que l'on pense inévitablement à Zola, tout en regrettant que l'éclairage limité des scènes d'intérieur - réalisme oblige - ne permette pas toujours de bien distinguer l'image. Soucieux d'être aussi crédible dans l'exposé du conflit que dans la description d'un milieu, le réalisateur évite avec soin tout manichéisme et si l'on ne peut donner totalement tort aux paysans qui aspirent à une vie plus facile, on ne peut non plus donner totalement raison au couple d'intellos qui a fait le choix inverse, celui du retour à la terre. Ce film, c'est projet de vie contre projet de vie et chacun a ses raisons que l'autre ne comprend pas, ou plutôt n'admet pas. Le sujet n'est pas totalement nouveau, mais il est traité de façon suffisamment efficace pour laisser le choix au spectateur de pencher d'un côté ou de l'autre. Et de sortir du conflit sans recours à la violence ?
L'actualité étant ce qu'elle est, on ne peut tout à fait s'empêcher de voir dans As bestas, une métaphore des conflits idéologiques qui mènent inévitablement à la guerre.
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