Pourquoi lire, si ce n'est pour se mettre provisoirement à la place de quelqu'un d'autre que soi, et vivre d'autres vies que la sienne ?
C'est ce à quoi nous incite le deuxième roman de Dima Abdallah, dont le personnage principal est un homme de la rue. Il a un jour, claqué la porte d'entrée de son appartement, jeté ses clefs dans le première bouche d'égout venue, et depuis n'a pas quitté la rue. Pourquoi, comment en est-il arrivé là, c'est la question que l'on se pose dès les premières pages car on devine bien sûr qu'il y a eu, à un moment de sa vie, un événement hors du commun, une tragédie qui l'a mené à cette rupture radicale. La curiosité du lecteur sera assouvie dans les dernières pages du roman, mais pas avant, parce que l'écrivaine distille régulièrement des indices pour maintenir en éveil la curiosité du lecteur et l'obliger à faire des suppositions. L'art de suspendre la résolution de l'intrigue, comme dans les meilleurs polars.
Bleu nuit,
malgré les apparences, n'est pourtant pas un polar. C'est plutôt la
tragédie d'un homme et avec lui, celle de bien d'autres personnes. Dima
Abdallah a fait de son personnage un ancien journaliste, c'est à dire un
homme qui a l'habitude de regarder autour de lui, d'observer. Et c'est
son regard sur ceux qui comme lui n'ont plus d'autre domicile que la rue
que nous suivons. Un regard plein d'empathie, plein de compréhension,
plus même que de compassion.
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