15 août 2021

Philip Caputo, La Lune du chasseur

Deux références seulement lorsqu'on cherche un livre de Philip Caputo en français, et encore l'un des deux, Clandestin, le livre qui lui a valu le Pulitzer est épuisé, en édition broché comme en édition de poche. Heureusement il reste les bibliothèques et les bouquinistes.  Peut-être... 

Je regrette particulièrement que The longest road n'ait toujours pas été traduit en français parce que ce voyage sur les routes secondaires américaines, depuis le Sud de la Floride jusqu'au Nord de l'Alaska est une formidable traversée des Etats-Unis, et l'occasion d'observer de près une Amérique parfois difficile à comprendre. En entreprenant ce voyage, Philip Caputo n'a qu'une question en tête : "what holds us together", qu'est-ce qui nous rassemble, qu'est ce qui fait de nous un peuple, qu'avons nous en commun ?  L'écrivain n'est pas un donneur de leçons, juste un observateur attentif qui sait faire parler les gens et écouter ce qu'ils ont à dire. Un bon journaliste, et une écriture affinée.


La lune du chasseur, son dernier livre, est sorti en Mai, dans une belle traduction de Fabrice Pointeau. Ce n'est pas un roman à proprement parler, ni un recueil de nouvelles, mais quelque chose entre les deux et tout à fait réussi. L'écrivain reprend le principe de l'unité de lieu, mais pas celui de l'unité d'action, bien que certains personnages se retrouvent d'un récit à l'autre. 

Toutes les histoires (7 au total) sont situées dans la péninsule supérieure du Michigan, une région de forêts et de lacs encore peu habitée. On y vient pour pêcher et surtout pour chasser. On y loge dans des bungalows isolés, on campe en pleine nature.... 

On y vient pour se confronter aux éléments, pour y retrouver des sensations oubliées, et accessoirement tenter de démêler les fils embrouillés du passé et les noeuds du présent. 

Il y est question de nature et la plume de Philip Caputo excelle à rendre les formes, les mouvements, les variations climatiques, les sensations. Les personnages sont essentiellement des hommes, dont on devine sous la carapace macho la fragilité. Et c'est le deuxième point fort de cet ouvrage, l'écrivain excelle à faire comprendre ce qui entrave ces personnages, empêtrés dans leurs désirs, leurs peurs inexprimées et leurs contradictions.

La lune du chasseur désoriente au début, mais on s'immerge peu à peu dans les pages, comme les personnages s'immergent dans la nature. Une immersion régénérante et une lecture finalement vivifiante.



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