31 mars 2019

Ojoloco 2019 : Companeros


Après 2 ou 3 films à demi convaincants, le film d'Alvaro Brechner m'a paru d'une autre force, bien que son sujet soit passablement perturbant.

Uruguay 1973. Les dictateurs au pouvoir s'emparent de prisonniers, non pour les supprimer mais pour en faire des otages. Trois hommes sont ainsi incarcérés dans des conditions abominables, torturés, affamés, privés de tout contact...  l'histoire de l'Amérique latine est pleine de ces récits effroyables, mais le parti pris du réalisateur de filmer ces 12 années du point de vue des prisonniers, quitte à laisser parfois le flou ou l'obscurité envahir l'image est particulièrement judicieux et donne au film toute sa puissance.


Il est difficile de parler de mise en scène alors qu'il s'agit d'un sujet aussi profondément bouleversant, néanmoins c'est bien l'image, le choix des plans, du cadrage, du montage qui touche le spectateur, et le convainc autant qu'il l'émeut.

On est effaré par la "créativité"dont font preuve les geôliers pour torturer, physiquement mais surtout moralement, leurs prisonniers, pour essayer par tous les moyens de les faire craquer, de les mettre au bord de la folie, de les faire renoncer à leur dignité d'êtres humains.
Et l'on est plus encore subjugué par la capacité de ces trois hommes à tenir bon, jours après jours, années après années. Avec eux la résistance humaine paraît sans limite. Comme celle de leurs proches qui n'ont jamais cessé de les attendre.

Et on ne s'étonne pas d'apprendre, par le générique de fin, que ces trois hommes ont par la suite marqué l'histoire de leur pays, par leur engagement politique ou leur talent d'écrivain.

Companeros, le titre français ! mais le titre original La Noche de 12 ans ... est beaucoup plus parlant !


30 mars 2019

Ojoloco 2019 : Los silencios


Ils ont fui la Colombie et une guerre qui n'en finit pas. Ils sont trois, la mère et ses deux enfants Fabio et Nuria. Ils ont trouvé refuge sur une île perdue entre le Pérou, le Brésil et la Colombie. Un bout du monde où les accueille un vague tante.  Ils ont tout perdu, le père a disparu, mais il leur faut réapprendre à vivre.

Le film a quelques chose d'un document ethnologique autant que d'un témoignage social sur ces populations isolées qui vivent dans des conditions précaires et ne peuvent compter que sur elles-mêmes. Survivre, s'adapter et ne trouver de réconfort que dans la présence tutélaire mais totalement imaginaire de ceux qui ont disparu. Bien que très lent, le film est cependant touchant, grâce essentiellement au très beau personnage de la mère, forte et responsable. Un bel exemple de résilience.




29 mars 2019

Ojoloco 2019 : Nuestro tiempo


Un élevage de taureaux dans la campagne mexicaine. Un décor de western ... mais c'est de relations conjugales qu'il s'agit.

Juan est poète, et jouit d'une certaine renommée. Il s'occupe des bêtes tandis qu'Esther, sa femme gère  le quotidien de la famille. C'est un couple libre, qui reconnaît à l'autre la possibilité d'une aventure. Mais on sait depuis longtemps que la théorie achoppe souvent sur la réalité, et lorsqu' Esther s'amourache du celui qui vient dresser les chevaux, la solidité du couple est remise en question.
Dépouillé de ses oripeaux exotiques (les taureaux, les cowboys, les paysages à l'infini, les pluies torrentielles) le film se résume à bien peu : il se croyait au-dessus de la jalousie et des soupçons, il se pensait libre, généreux, ouvert...  mais ne supporte pas que sa femme s'éloigne de lui.


La photo est souvent superbe, mais la caméra de Carlos Reygadas - qui tient le rôle principal -  est trop souvent complaisante : 2h58 c'est beaucoup trop !  Les premières scènes, par exemple, des enfants dans la boue, les garçons, puis les filles, puis les ados.... 20mn au début du film qui installent l'ennui plus que la curiosité ! Le film est certes une grande réussite sur le plan visuel, mais l'histoire pourrait aussi bien se dérouler dans un apparemment parisien ! Tant il est vrai que les relations amoureuses sont les mêmes quel que soit le paysage, le costume ou la langue.

28 mars 2019

Ojoloco 2019 : La Camarista


Il est vrai que dans le cinéma d'Amérique latine, il est souvent question de classes sociales et en particulier d'employées de maison. On se souvent entre autres du film d'Anna Muylaert, Une seconde mère, présentée dans un précédent festival Ojoloco

Dans le film de Lila Avilés, le personnage au centre du film est une femme de chambre dans un hôtel de luxe : tâches répétitives quotidiennes, entraides entre collègues, relations avec la directrice du personnel d'un côté; exigences extravagantes de l'autre. Rien n'est vraiment inattendu :  la jeune femme de chambre parle peu, manifeste rarement ses émotions, comme figée dans sa fonction ce qui est en soi une façon de souligner sa place dans la société.

Le film semble parfois pencher du côté du documentaire plus que du côté de la fiction, si ce n'était les quelques scènes qui suggèrent les fantasmes ou les désirs qui parfois traversent la jeune femme de chambre. Un film intéressant, sans doute dans sa sobriété, mais pas vraiment passionnant.


27 mars 2019

Ojoloco 2019 : Petra


Petra, peintre en devenir, se présente chez Jaume Navarro, artiste reconnu, pour parfaire sa formation. C'est en tout cas le prétexte officiel car en réalité, Petra est surtout à la recherche de son père et son enquête l'a mené jusqu'à ce personnage qui se révèle rapidement aussi odieux qu'il est possible !  Son épouse, garde ses distances avec la jeune fille, un peu perdue dans cette famille peu loquace et franchement peu avenante. En dehors peut-être du fils ....

Le scénario est malheureusement cousu de fils blancs et les secrets de famille pas toujours passionnants. Mais le film de Jaime Rosales permet de retrouver Marisa Paredes, l'actrice fétiche de Pedro Almadovar. C'est déjà ça.


26 mars 2019

Ojoloco 2019 : Yuli


Printemps 2019 : 7e édition du festival Ojoloco consacré aux cinémas espagnols et sud-américains. Un festival qui ne cesse de grandir et que je suis toujours avec beaucoup d'intérêt. Mais le nombre de films, dont certains ne sont présentés qu'une seule fois, et la distance entre les salles de projection contraint hélas à faire de choix. Dommage.

Yuli, le film d' Iciar Bollain était présenté en ouverture. Un film consensuel et séduisant comme il convient pour une ouverture de festival,  mais qui permet de s'intéresser aussi bien au parcours de Carlos Acosta, enfant des rues, fan de hip-hop, devenu danseur classique au Royal Ballet de Londres et autres compagnies prestigieuses, qui doit, au moins en partie, son destin à l'acharnement de son père persuadé du talent de son fils.


Comme tout film cubain qui se respecte, Yuli est aussi l'occasion d'évoquer les conditions de vie sous le régime de Castro, en particulier pendant les années 90 lorsque le secours du "grand frère" soviétique est venu à manquer. 
Un bon début pour le festival Ojoloco 2019. 

24 mars 2019

Les Etendues imaginaires


Le premier film d'un réalisateur singapouriens ? c'est déjà une bonne raison d'aller voir Les Etendues imaginaires, qui se présente, a priori comme un thriller puisqu'un inspecteur de police un rien nonchalant et insomniaque, enquête sur la disparition d'un ouvrier chinois chargé du transport du personnel sur les chantiers titanesques qui permettent à Singapour de gagner des terrains sur la mer.

Je ne suis pas certaine d'avoir bien suivi le déroulement de l'intrigue dont la résolution importe finalement moins que le jeu entre les deux espaces où se construit le film.
L'un, totalement clos, et qui plus est, virtuel puisqu'il s'agit d'un cybercafé où chacun se perd dans les images et les mots de son écran à moins qu'il ne glisse tout simplement vers les étendues imaginaires du sommeil. C'est un monde nocturne éclairé par des néons aux couleurs froides : violet, bleu...


L'autre espace est au contraire, totalement ouvert,  c'est le monde du jour et du travail sur un chantier où se côtoient des immigrés de toutes les nationalités, à la merci de ceux qui les exploitent . Un monde presque aussi virtuel que celui des écrans puisque sont déversés des sables venus d'ailleurs pour créer des îles artificielles. C'est un monde où le beige se fond dans le gris, un monde de machines, de grues, un monde mécanique dans lequel l'être humain n'est qu'un pion sans valeur,



 En négligeant - ou en refusant -  de donner tous les éléments qui permettraient de résoudre énigme et de clore l'enquête,  Siew Hua Yeo le réalisateur, contraint le spectateur à s'intéresser à autre chose,  à reporter son attention sur l'image - les plans sur les chantiers sont souvent d'une stupéfiante beauté - et  à réfléchir à la façon dont les hommes vivent, aux conditions de travail auxquelles ils sont soumis, et à la solitude extrême des migrants. Pour un premier film, ce n'est pas si mal !

Ron Rash, Un Silence brutal



Voilà déjà un bout de temps que je suis cet écrivain originaire de Caroline du Sud et grand amoureux  des Appalaches, sans doute parce qu'il parle mieux que personne de la beauté de cette région et surtout de ses habitants, parmi les plus déshérités de l'Amérique.

Un silence brutal, son dernier roman reprend cette double thématique : l'éloge de la nature à l'état sauvage avec un personnage féminin, Becky, poète à ses heures et qui s'obstine à chercher la lumière même dans les êtres qui en sont le plus dépourvus et de l'autre côté le travail du shérif las d'affronter  les horreurs auxquels il est confronté dans cette région où la pauvreté, l'ignorance et la drogue ont fait des ravages.

L'intrigue tourne autour d'un affrontement entre un investisseur qui a installé un hôtel de luxe dans cette région sauvage pour y attirer de riches touristes, et la population locale qui voit d'un mauvais oeil ses habitudes bouleversées. Lorsque l'on découvre que du kérosène a été versé dans la rivière, tout accuse Gerald, un vieil homme qui entend vivre comme il a toujours vécu.

Bien que très soigneusement construite, l'intrigue policière n'est pour Ron Rash qu'un prétexte pour parler de ce qu'il aime et de ce qui l'inquiète. Et sur ce point le roman est certainement une réussite.
Mais je regrette un peu que les fils qui lui ont permis de monter son roman soient aussi évidents,  comme si on avait oublié d'enlever les échafaudages d'une belle demeure, le chantier une fois terminé. Ce qui n'est pas une raison pour ne pas lire ce livre, et tous ceux qui les ont précédés.

PS. La couverture de la nouvelle collections Noire de Gallimard est élégante, certes mais terriblement austère. Heureusement qu'il y a le bandeau pour l'éclairer un peu. 



23 mars 2019

Les Eternels

Un nouveau grand film  de Jia Zhangke, génial réalisateur entre autres films de Still Life, de A touch of sin ...
Jia Zhangke -  dont on se demande si ses films sont diffusés en Chine tant sa critique, non pas tant du régime mais de l'évolution de la société chinoise est acerbe -  choisit de suivre les tribulations  d'un couple d'amants dans le milieu peu avenant de la pègre.
Petit chef de bande, Bin se fait attaquer par une bande rivale et pour le défendre, Quiao, sa maîtresse et amoureuse passionnée tire plusieurs coups de feu. En l'air ! Mais en Chine, le seul fait de détenir une arme est passible de prison.  Incarcérée pendant 5 ans, Qiao espère retrouver son amant.... qui a changé de vie est fait désormais du "business".

Les Eternels est un film que l'on peut prendre à plusieurs niveaux. On peut ne s'intéresser qu'à l'histoire d'amour et la trouver au fond bien banal : elle est prête à tout par amour; lui, un peu moins. Elle est exigeante, sûre de ses valeurs; lui un peu moins. Jia ZhangKe a fait de sa femme son actrice principale et son égérie, on comprend qu'il glorifie ainsi son personnage.




Mais Les Eternels est avant tout un film sur la Chine d'aujourd'hui, sur la Chine qui s'interroge et ne sait plus où elle va. Qui, d'une certaine façon a gardé toutes ses habitudes, ses façons de faire, ses règles, mais dont les valeurs ont été laminées par le passage du communisme sans doute, mais plus encore par le glissement brutal vers le capitalisme sauvage. Et c'est sur ce point que porte la critique de Jia Zhangke. Parce que Qiao, qui, contrairement à son amant ne faisait pas partie de la pègre, finit par en adopter les règles de loyauté, de fidélité alors que lui n'a choisi que ses intérêts immédiats. 
La pègre plutôt que le capitalisme. Joli retournement ! 




21 mars 2019

Le Chant du loup


Le film d'Antonin Baudry est un de ces films que l'on va voir pour avoir peur - un peu -  et passer deux heures accroché à son fauteuil dans l'attente de la prochaine péripétie qui menace les sous-marinier.  Et découvrir que le salut du monde dépend au final de la capacité d'un seul homme à identifier les bruits les plus infimes.


Un bon film, classique dans sa conception et dans sa réalisation, mais avec un petit plus qui consiste à s'interroger sur ce qui est le pire : l'exiguïté des lieux et la promiscuité, inconcevables pour tout claustrophobe avide de grands espaces ?  La rapidité et la précision avec laquelle les missiles et autres armements nucléaires se déplacent ? Ou ... les "process" et autres protocoles forcément binaires puisque numériques, si codifiés que la moindre erreur, fût-ce celle du donneur d'ordre, ne peut être rectifiée.


20 mars 2019

Chris Offutt, Nuits Appalaches


Parfois les livres sont décevants. Qu'ils soient choisis au hasard ou suivant leur renommée médiatique, en fonction d'une couverture ou d'un conseil d'ami, en les commence avec ardeur mais l'intérêt s'effiloche au fil des pages, que l'on compte péniblement, 30 ... 40 ... A ce stade il vaut mieux abandonner. Ce que je viens de faire à trois reprises, heureusement avec des livres empruntés en bibliothèque !


Avec le dernier roman de Chriss Offutt, Nuits Appalaches, je ne pouvais me tromper.

D'abord parce qu'il s'agit de littérature américaine, qui me déçoit rarement; ensuite parce que j'avais déjà lu et apprécié deux recueils de nouvelles de cet écrivain originaire du Kentucky et plus précisément de cette région montagneuse à l'est de l'Etat, au pied des Appalaches.  Chriss Offutt parle donc de ce qu'il connaît bien.  Et ce qu'il connaît ce sont les petites gens de ces régions minières, des populations un peu frustres qui luttent pied à pied contre la misère et la malchance, avec des moyens par toujours légaux.

Tucker n'a que 18 ans quand il revient au pays, mais il fait partie des vétérans de la guerre de Corée qui ont appris à survivre autant qu'à tuer. Rhonda, elle, a à peine 15 ans lorsque Tucker croise son chemin et la sauve des griffes de son oncle. On les retrouve 10 ans plus tard, ils ont déjà 5 petits, pas toujours bien nés -  et Rhonda est de nouveau enceinte !  Mais les services sociaux menacent de leur retirer leurs enfants ...

L'histoire de Tucker et Rhonda n'a rien d'un roman à l'eau de rose. Dans cette région des Etats-Unis, de toute façon, tout le monde est plus ou moins en mode survie. Et ceux qui parviennent à garder un toit sur leur tête et de quoi nourrir leur famille doivent s'estimer heureux. Mais Tucker plus qu'un autre se bat pour garder la seule chose qui compte à ses yeux, ses enfants.

Le roman de Chris Offutt n'est sans doute pas à mettre dans toutes les mains tant il est sombre, mais si vous le lisez vous serez frappé par la ténacité de cet homme et son courage et vous serez forcément amené à vous interroger sur les limites du bien et du mal, beaucoup plus floues qu'on ne l'imagine quand tout n'est que misère.




18 mars 2019

Sibel



Sibel, un film étrange, comme je les aime. Un film qui nous emmène dans un univers bien loin du nôtre.

Un village perdu loin dans les montagnes turques. Un village où les traditions ont la vie dure, où les femmes ne sortent pas sans couvrir leur cheveux, où les mariages sont arrangés par les parents, où les femmes sont au service de leur père, puis de leur mari.
Dans ce village, une jeune fille, aussi belle que farouche; elle est muette et donc différente. Forcément différente. Elle participe comme les autres aux travaux des champs, mais s'échappe dès que possible dans la forêt pour y traquer le loup.

Le film, construit sur un scénario aussi original est un joli pari réussi; il tient à la capacité de l'actrice, Damla Sönmez, à exprimer toutes les émotions qui la traversent par le seul jeu de son visage ou de ses gestes; il tient aussi à la beauté des paysages filmés, des sous-bois traversés de lumière, des rochers massifs.

Mais il est évident que le film sert avant tout à montrer à quel point cette jeune femme se sent prisonnière d'un monde fait de contraintes et de servitudes. A quel point son besoin de liberté, plus encore que son mutisme, la différencie des autres femmes du village.  En se refusant les facilités de la parole,  et même celui de la musique, Çagla Zencirci et Guillaume Giovanetti, en vrais cinéastes, ont utilisé toutes les ressources de l'image pour exprimer la complexité du monde intérieur de Sibel et les paradoxes d'une société turque en pleine transformation qui s'accroche à ses traditions. 
Une belle réussite qui me fait regretter de n'avoir pas vu leurs précédents films : Noor (2014) et Ningen (2015). Mais je me rattraperai ! 

En attendant, voici deux liens pour ceux que le film  - et le langage sifflé - a fascinés. 
Un article du CNRS : https://lejournal.cnrs.fr/billets/fascinante-parole-sifflee
 Et un autre sur Kuşköy, le village des oiseaux http://couleurs-d-istanbul.over-blog.com/article-31948468.html

16 mars 2019

Fukushima, le couvercle du soleil


Le film de Futoshi Sato est proprement terrifiant. Parce qu'il révèle minute par minute ou presque ce qui s'est passé ce jour de Mars 2011 quand la terre s'est mis à trembler, un peu plus fort que d'habitude au Japon.
Le déroulement de la catastrophe on l'a vaguement suivi à la télé et on a gardé en tête quelques images de la violence de tsunami qui a suivi et noyé la centrale nucléaire de Fukushima. Mais ce que montre le film c'est la façon dont ont réagi en temps réel les autorités d'une part, les responsables de l'entreprise d'autre part et bien sûr les médias. Parce qu'un seul verbe résume tout : "wakarimasen ! ".  On ne sait pas, on ne comprend pas !


Que les catastrophes, quelles qu'elles soient, entraînent la confusion, cela n'est pas étonnant. Mais ce qui étonne, c'est le manque de réflexion avant la catastrophe, et le manque d'informations après, lorsque le pire est déjà survenu. 
Fukushima n'est ni un documentaire, ni un film de fiction; pas non plus un film historique. C'est juste un film qui essaye de montrer qu'avec le nucléaire nous jouons à l'apprenti sorcier. Un jeu mortel. 


15 mars 2019

Le pic épeiche


Il est là tous les matins.
Et prend son petit-déjeuner dans une position pour le moins acrobatique !
Je suis admirative.

14 mars 2019

Iain Levison, Pour services rendus



Le dernier livre de Iain Levison porte en bandeau un commentaire laconique "L'Amérique des menteurs",  commentaire parfaitement justifié, mais trop restrictif car ce que décrit le livre c'est "la politique des menteurs". Un système où l'on échange des services sans se soucier trop de la vérité des faits, pourvu que chacun y trouve son compte.  Le titre anglais Version of events disait d'ailleurs de façon explicite que la version d'un événement dépend de celui qui en témoigne.




Mais Iain Levison est avant tout écrivain et ce qu'il raconte a toujours le parfum de la fiction. Ce qu'il a à nous dire passe par le biais d'une intrigue, de personnages auxquels on s'attache plus ou moins, comme ce Freemantle, vétéran du Vietnam et actuellement chef de la police d'une petite ville du Michigan qui se voit soudain sollicité par un autre vétéran autrefois sous ses ordres et désormais en campagne pour un poste de sénateur. Une anecdote racontée un peu hâtivement à propos de la guerre met en péril sa candidature; il faut d'urgence la rectifier car les médias guettent le faux-pas, l'erreur de communication. 

Tout est inventé, dans ce roman, mais tout a l'air terriblement vrai, surtout les manoeuvres des conseillers en communication ou en marketing, les "spindoctors" capables de vendre un homme politique comme on vend une lessive. Et c'est ce qui fait de ce roman de Iain Levison un livre à la fois divertissant et édifiant, amusant et cependant effrayant. 

13 mars 2019

Vice


Un titre particulièrement bien choisi pour le titre de ce "bio pic" consacré à Dick Cheney : Vice pour Vice Président sans doute, mais l'homonymie permet de suggérer que les agissements du personnage n'ont rien de ... vertueux ! Et en effet, le film d'Adam Mc Kay est un portrait à charge de cet homme qui pendant des années a tiré les ficelles du pouvoir.

Des films sur les arcanes du pouvoir politique, il y en a déjà eu pas mal, mais celui-ci est glaçant parce qu'il ne semble y avoir chez ces "puissants " aucun souci du sort de monde ou même de leur pays, mais une seule motivation, leur propre réussite, leur propre carrière.  Le réalisateur, en mettant en scène dès le début du film, la future Mme Cheney montre bien qu'il s'agit de l'accession au pouvoir d'un couple d'arrivistes, et que le triomphe de Monsieur est la réalisation de ses rêves à elle.


Mais tant de"nominations" tant de prix, tant de récompenses pour ce film ne relève pas tant de l'art cinématographique que d'un geste politique. Le film montre après tout montre clairement que le pouvoir n'est qu'un jeu de marionnettes : il y a les pantins et ceux qui tirent les ficelles ! Du coup le jeu un peu figé de l'acteur principal, bloqué par son maquillage, paraît presque justifié.

Steve McCurry


Pas le moins connu des photographes ! Parce que personne n'a oublié la jeune afghane aux yeux verts et que Steve McCurry s'est fait une réputation de portraitiste hors pair, de coloriste audacieux, en sus de son métier de base - photo-reporter - qui lui a permis d'opérer sur la plupart des territoires en guerre : Afghanistan, Irak, Inde ...

Un passage à La Sucrière à Lyon qui propose jusqu'au 26 Mai une exposition rétrospective des photos de Steve Mc Curry est donc une évidence  pour tous ceux que la photo intéresse.


Je me souviens très bien d'avoir lu et relu ou plutôt vu et revu son livre sur la mousson, fascinée autant par la qualité des photos que par le phénomène météorologique. Et j'ai retrouvé avec plaisir quelques unes de ces photos dans l'exposition de Lyon, l'homme avec de l'eau jusqu'à la poitrine et sa machine à coudre sur l'épaule, par exemple.



La série des portraits est bien sûr fascinante puisqu'il s'agit la plupart du temps de portraits frontaux où l'on est littéralement capté par les regards. Mais ce qui caractérise plus encore le travail de Mc Curry, c'est son goût pour la couleur, les couleurs !



 Il aime plus que tout les contrastes forts, les couleurs violentes, comme un tchador jaune citron qui claque devant une rangée de tchadors bleu Klein (mais là je le soupçonne de forcer un peu sur la couleur ! ). Je préfère la photo ci-dessous, plus sobre côté couleurs mais pas moins parlante.



Aussi pittoresques, aussi belles, aussi séduisantes que soient ces photos, mes préférées, celles qui me troublent le plus sont ses photos de guerre, en particulier celles sur l'Irak ou le Koweit. Parce que les photos de guerre sont là pour témoigner de l'horreur, et c'est ici le cas. Mais les photos de Steve Mc Curry ont quelques chose de plus, elles sont d'une beauté quasi indécente.  En tout cas dérangeante.



La violence. Le chaos . L'absurdité. 
Mais aussi ... la beauté du Mal ?


Une précision : ces photos ont été prises avec un téléphone dans les conditions difficiles de l'exposition. C'est donc à Lyon qu'il faut aller les voir. 

12 mars 2019

Lionel Salaun, Whitesand


La sortie de Whitesand était prévue le 6 Mars et bien sûr je me suis précipitée en librairie, impatiente de découvrir si celui-ci était à la hauteur des précédents. Pas de problème, c'est bien le cas.


Dès les premières pages on se retrouve dans une petite ville du Mississippi, population majoritairement blanche, qui se méfie de tous ceux qui ne lui ressemblent pas, les Noirs comme les étrangers. Aussi, lorsque la voiture de Ray Harper tombe en panne et qu'il se voit contraint de se trouver un travail et un logement, chacun, y compris le shérif, se méfie et s'interroge sur les véritables motivations qui ont poussé cet homme du Nord à venir jusque dans ce coin reculé. Chacun s'interroge parce que chacun a sans doute quelque chose à se reprocher et parce qu'il n'existe pas de petite ville sans histoires un peu troubles. Et dans cette Amérique des années 70, où les couleurs ne se mélangent pas, on est encore prompt à sortir les fusils. 

Lionel Salaün est un écrivain qui se soucie avant tout de raconter une histoire, une histoire forte si possible avec une intrigue bien menée autour de personnages ballotés par la vie, qui ne sont jamais ou tout bons ou tout mauvais, et qui s'efforcent, pour la plupart, de rester maîtres de leur destin en dépit des difficultés qu'ils ont à affronter. 

Mais ce que j'apprécie particulièrement dans ce roman comme dans les trois précédents, c'est la capacité de Lionel Salaün à restituer un lieu, un moment, une atmosphère qui font naître chez le lecteurs des images presque familières, souvenirs de films, de livres lus il y a longtemps, de tableaux peut-être, bref une Amérique totalement imaginaire mais totalement vraie. Une Amérique certes qui ne fait plus rêver, mais qui fascine toujours autant et dont on s'inquiète qu'elle préfigure les évolutions de notre propre société. 

11 mars 2019

La Favorite



Voici un film parfaitement divertissant et cependant intelligent, capable d'intéresser les spectateurs au sombre jeu des intrigues politiques, qui, bien que du passé, ne différent guère de celles d'aujourd'hui : il s'agit toujours de prendre le pouvoir et de le garder (!), en se souciant moins des intérêts du pays que de ses propres intérêts. 

Le message est un brin cynique, mais le film tout à fait réjouissant; en effet le réalisateur, Giorgos Lanthimos, joue à fond la carte du baroque et de l'extravagance avec une reconstitution historique de pacotille qui ne craint pas la caricature parce que la vérité, chacun le sait,  n'est ni dans le décor, ni dans les costumes.  Elle est dans le comportement des personnages, leurs ambitions, leur perfidie, leur absence de morale. Et l'on s'étonne à peine de les voir glisser des figures compassées du menuet à celles nettement plus expressives du hip hop ! 

L'histoire de cette reine, que la maladie autant que ses humeurs empêchent de gouverner et qui en confie la responsabilité à sa favorite permet de mettre en scène la rivalité de deux femmes, aussi belles, aussi intelligentes et aussi féroces l'une que l'autre. Qui a dit que les femmes au pouvoir étaient douces comme des agneaux ? Certainement pas moi ! 

10 mars 2019

Le Musée de Sérignan


Sérignan, une petite ville à côté de Bezier. Petite, mais assez grande pour héberger un Musée d'Art Contemporain. 


Les espaces intérieurs, sont en réalité beaucoup plus vastes  qu'on ne l'imagine en voyant la façade, et les triangles colorés apposés sur les vitres par Buren donnent l'impression, avant même de pénétrer dans les salles, de se trouver à l'intérieur d' un kaléïdoscope.  


Deux artistes sont actuellement exposées dans le musée, deux femmes. L'une portugaise, Lourdes Castro; l'autre allemande, Ulla Von Brandeburg. 



Lourdes Castro propose des oeuvres très variées dans leurs formes et leurs matières sur le thème de l'ombre : Ombres et Compagnie est le titre donnée à son exposition. 


Les oeuvres  - des installations - proposées par Ulla von Brandeburg sont plus difficiles à appréhender parce qu'on ne voit d'abord que des objets disposées sur des surfaces plates. Mais à force de tourner entre les tentures qui délimitent des espaces colorés, on se retrouve peu à peu comme dans les coulisses d'un théâtre l'on pénètre peu à peu dans l'univers imaginaire (et réfléchi) de l'artiste? L'Hier de demain est le titre de son exposition.


Faut-il à tout prix chercher une correspondance entre ces deux artistes ? je ne le pense pas, mais j'ai gardé de mon passage au musée de Sérignan, l'impression que ces deux femmes refusent de prendre au tragique le caractère pourtant éphémère de notre monde. 


08 mars 2019

Jesmyn Ward, Le Chant des revenants


Elle est américaine, elle est née dans le Sud, et bien sûr elle est Noire. Mais avant tout elle est écrivaine et au premier roman lu (Bois Sauvage) on sait qu'elle laissera sa trace dans l'histoire de la littérature. Car Jesmyn Ward écrit comme personne. Et il faudrait prendre le temps de la lire en V.O. pour mieux savourer cette façon qu'elle a de faire entendre les voix du sud, d'en reproduire les sonorités en même temps que les raccourcis syntaxiques, et admirer sa capacité à changer de registre selon les locuteurs, tout en maintenant la fluidité de la narration.




De quoi parle Jesmyn Ward dans ses livres ?  Des conditions de vie des Noirs dans l'Amérique d'aujourd'hui, qui parfois, malgré les apparences, ne sont pas très différentes d'autrefois. Elle y parle de de la succession des générations, de la façon qu'a chacun de réagir aux drames qui touchent inexorablement la famille.

Jojo, l'enfant au coeur de son dernier roman a deux grands-pères, un noir auprès de qui il vit et qui lui a tout appris; un blanc qu'il ne connaît pas et qui ne veut pas le connaître. Son père est en prison et sa mère est une jeune femme paumée incapable de s'occuper de ses deux enfants puisque Jojo a une petite soeur. Lorsque sur un coup de tête, la mère décide d'aller chercher son mari à sa sortie de prison, en embarquant Jojo, la petite Kayla et une amie un peu trop délurée, on se doute que le voyage ne sera pas facile. Et il ne l'est pas.

Jesmyn Ward, en alternant les voix des narrateurs parvient à faire comprendre au lecteur les émotions, les peurs, les espoirs qui traversent chacun d'eux. Dès lors il ne s'agit plus de les juger, mais d'éprouver de l'empathie parce que même la jeune mère, que l'on aurait vite fait de qualifier d'irresponsable, mérite d'être comprise.

Parfois, aux voix des personnages se mêlent celles des disparus, le frère tué, l'enfant de la prison. Parce que dans la culture du Sud des Etats-Unis les morts n'abandonnent pas les vivants. Si Jesmyn Ward était sud-américaine on parlerait sans doute de réalisme magique ... bien que dans Le Chant des revenants il ait surtout une connotation tragique.

En tout cas il faut se laisser emporter par ce livre, se glisser dans la voiture qui monte vers Parchman, la prison d'Etat, partager au fil des pages la vie de ces individus sur qui le passé pèse autant que le présent et retrouver ensuite le confort de son fauteuil, bien loin du Mississippi, bien loin de ce monde si dur, si troublant, si désespérant.


07 mars 2019

Les Affameurs et autres westerns

Trois westerns en deux jours. Une vraie fête pour qui aime le genre. Et quels westerns !
L'impitoyable de Clint Eastwood, Les Affameurs d'Anthony Mann et Sur la piste des Mohawks de John Ford.
1992, 1952, 1939 !
Comme un raccourci de l'histoire du genre et ... de l'Amérique.

Dans Sur la piste des Mohawks il s'agit moins de la conquête de l'Ouest que de la conquête de l'Amérique tout court  avec cette histoire de jeunes pionniers qui essayent de s'installer dans un territoire encore sauvage; mais qui n'a pas encore conquis tout à fait son indépendance vis à vis de l'Angleterre. On est en 1776.


Henri Fonda et ... un Indien de pacotille

Dans Les Affameurs on est beaucoup plus à l'Ouest puisque c'est dans l'Oregon que parvient la caravane d'immigrants escortée par un ancien tueur repenti. Le film fait encore l'éloge des pionniers, qui affrontent avec courage les difficultés de la route, mais se heurtent à la rapacité de leur congénères gagnés par ... la fièvre de l'or. On est en 1849. Tourné en 1952, en pleine période Maccarthyste, le film propose en outre un intéressant débat sur la possibilité ou non de la rédemption.



Chapeau blanc, chapeau noir ... le code couleur est une indication de moralité

Une question reprise dans L'Impitoyable qui met en scène un tueur repenti; il a renoncé aux armes par amour pour sa femme et ne les reprend que pour défendre ... la veuve et l'orphelin ? Presque. Une prostituée défigurée par un tueur sadique. On est en 1880. L'histoire de l'Amérique est écrite.


Clint et Morgan Freeman : le western fait une (petite)  place aux Noirs

Grâce à Dieu


Pas vraiment envie d'aller voir le film : trop de bruit autour de lui et de sa sortie concomitante avec le procès de Barbarin.   Mais je me suis laissée entraîner et ne le regrette pas. Le film est bien fait, efficace, convaincant : il a contribué à nourrir mon anticléricalisme et renforcer mon athéisme !
Je sais gré à François Ozon d'avoir choisi quatre personnages très différents pour montrer les ravages des agressions sexuelles sur les individus et les chemins tortueux que peut prendre la résilience.
Je mettrai donc Grâce à Dieu du côté des films quasi documentaire qui apportent peu à l'histoire du cinéma,  mais beaucoup à la réflexion.

A la recherche des écluses du canal du Midi



Entre l'étang de Thau et Toulouse il y en a 63 je crois, facilement repérables sur Google map, mais pas toujours très accessibles et pas toutes aussi spectaculaires que l'écluse ronde et ses 3 portes : vers Bézier, Agde et l'étang de Thau. 

 

A vrai dire elle n'est plus tout à fait ronde puisqu'elle a été agrandie en 1978 pour permettre aux péniches de 38m50 de manoeuvrer.


Un peu plus loin, en remontant le canal du midi, les écluses de Fonseranes avec leurs 8 bassins ovoïdes et leurs 9 portes constituent un véritable escalier d'eau, un ouvrage d'art exceptionnel, une prouesse technique  : 156 toises de longueur sur 11 toises de pente ! comme on peut le lire sur le plan de M. Riquet, le génial inventeur du canal du Midi.





Parfois, au détour d'une pérégrination, à défaut d'écluse, c'est un pont que l'on découvre, un petit pont bossu et son allée de platanes.

03 mars 2019

Au bord de l'eau


Ciel bleu, eau bleue


Ciel gris, eau grise



Mais c'est joli quand même.