Le Silence des dieux est un roman "différent". Différent de ce qu'on a l'habitude d'appeler roman. Parce qu'il inclut des poèmes, qui viennent soulager, aérer la prose ? Un peu sans doute. Parce que dès le premier chapitre on croit reconnaître la voix de Camus à Tipasa, celle qui s'interroge sur le sens de la vie, n'en trouve pas, mais décide de vivre pleinement quand même? Et de refuser la pierre qui l'écrase? Parce qu'il ressemble à un conte, en racontant une histoire qui a l'air totalement imaginaire, mais qui ressemble pourtant à la réalité ? Sans doute aussi .
Un village tranquille où tous les habitants se connaissent et vivent comme ils ont toujours vécu. Habitués à se contenter de peu et à travailler dur. Mais lorsque du jour au lendemain des soldats bloquent l'accès au village interdisant à quiconque d'entrer ou de sortir, la vie devient plus difficile et les habitants se radicalisent. Le plus riche gagne en pouvoir et désigne un bouc émissaire, Abdelkrim, bientôt contraint de fuir avec sa famille. Les forces du mal sont désormais à l'oeuvre, et la violence se déchaîne.
La trame du récit n'est pas franchement nouvelle, ni même les personnages qui sont ici un peu comme les santons de la crèche, puisque chacun représente un type social : l'épicier, le fonctionnaire, l'imam, le marabout.... Le roman s'inscrit tout naturellement dans une lignée humaniste, qui s'efforce de faire comprendre comment, dans une communauté pourtant paisible, il suffit de pas grand chose pour que tout dérape. Mais la vraie originalité du livre, ce qui le rend "différent", c'est tout simplement la façon dont Yahia Belaskri raconte l'histoire. Une tonalité douce, une ironie parfois amère qui masque à peine un colère rentrée. A cela s'ajoute l'espoir que le changement viendra des femmes, plus rapides que les hommes à modifier leur comportement.