18 janvier 2020

Juan Marsé, Boulevard du Guinardó

Voilà un bien petit livre (120 pages), mais qui n'est pas sans intérêt. Bien qu'il ne s'y passe objectivement pas grand chose d'important : ni suspense, ni intrigue à rebondissement, mais plutôt la chronique d'une journée presque ordinaire dans la vie de deux personnages qui n'ont a priori pas grand chose à commun.


Un flic fatigué, au bord du suicide, vient chercher une gamine orpheline pour l'emmener identifier à la morgue, l'homme qui l'a violée deux ans auparavant. Le sujet n'est pas franchement attirant j'en conviens, mais il faut ajouter que l'histoire se passe à Barcelone, le 8 Mai 1945. C'est la fin de la guerre - mais pas celle du franquisme! Pas non plus la fin des années de misère et de soupçon. Le tout sous la chape pesante de la religion.

Tout l'art de Juan Marsé tient dans sa capacité à recréer l'atmosphère poisseuse qui a sans doute été celle de Barcelone à ce moment là : un homme d'un certain âge, las, revenu de tout sauf d'un certain sens du devoir et de la morale, qui semble lâcher prise devant cette gamine présentée au départ comme une victime mais qui se révèle au final bien plus délurée qu'elle n'en a l'air et s'accommode sans trop de difficulté des aléas de l'existence. En mettant en scène ces deux personnages le romancier semble vouloir confronter deux moments de l'histoire espagnole ;  un passé que l'on préfère oublier et un futur qui manque singulièrement d'attrait. Un passé sombre et brutal, un futur où l'argent tient lieu de morale. Le livre de Juan Marsé est au fond encore plus désespéré qu'il n'en avait l'air.

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